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Le casse-tête du financement du post-conflit avec les Farc

La fin de la guerre avec les Farc n'est qu'une étape sur le chemin de la paix en Colombie, où le gouvernement va devoir relever le défi complexe du financement du post-conflit dans un contexte de chute des cours du pétrole.

Le casse-tête du financement du post-conflit avec les Farc
Face à l'urgence, M. Santos a lancé un appel à la communauté internationale : l'Union européenne versera plus de 575 millions d'euros et les États-Unis ont promis 450 millions de dollars.

Le Président Juan Manuel Santos a réitéré que la paix est le «meilleur investissement» que fasse le pays en mettant fin à 52 ans de conflit avec la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc). Le gouvernement estime que le post-conflit se traduira par une croissance annuelle additionnelle de 1,1 à 1,9%, une meilleure sécurité et davantage d'investisseurs étrangers. Mais la réintégration des guérilleros à la vie civile, comme prévu par les accords de paix conclus le 24 août, a un coût économique élevé. Selon le Sénat, environ 31,4 milliards de dollars vont être nécessaires au cours des dix prochaines années, soit un tiers du budget annuel de 2017 à 78,3 milliards de dollars. «Bien que la situation fiscale soit serrée, le budget est gérable. L'argent qui manque, nous allons l'obtenir. Et il faut comprendre que l'application des accords ne va pas se faire en un jour», assurait M. Santos en août dans une interview à l'hebdomadaire Semana.

Pour le ministre des Finances, Mauricio Cardenas, la paix est un «investissement qui va générer des intérêts». «Les intérêts mêmes de la paix vont servir à financer les engagements pris», déclarait-il à l'AFP il y a quelques mois. Le budget 2017 priorise la durabilité et la consolidation du post-conflit, une ligne à laquelle ont été dédiés 4,1 milliards de dollars ; plus que les 3,9 milliards affectés en 2016 aux programmes de réparation des victimes. Bien que la Colombie soit la quatrième économie d'Amérique latine et qu'elle ait enregistré une croissance moyenne de 3,9% dans la dernière décennie, la chute du pétrole a entamé ses recettes. Pour 2016, les prévisions de croissance ont été revues à la baisse, de 3 à 2,5%. «Je ne sais pas ce que va faire le gouvernement à court terme pour financer le post-conflit», a déclaré à l'AFP Salomon Kalmanovitz, économiste et ex-membre de direction de la Banque centrale Banco de la Republica. Dans ce pays, quatrième producteur de brut d'Amérique latine, le pétrole représente plus de 50% des exportations, 5% du PIB et 16% des recettes publiques. Le budget 2016 avait été établi sur un baril à 50 dollars, mais qui a chuté jusqu'à 30 dollars. Selon la Fondation privée pour l'éducation et le développement (Fedesarrollo), pour chaque dollar en moins sur le baril, l'État colombien perd environ 146 millions de dollars. «Il va y avoir une réassignation des dépenses et du budget, en faveur des territoires les plus affectés» par le conflit armé, selon M. Kalmanovitz.

Les analystes estiment le trou fiscal à quelque 14 milliards de dollars. En 2015, les recettes pétrolières ont avoisiné les trois milliards de dollars, en 2016 elles devraient chuter de 0,8% et de 0,1% en 2017. «Le post-conflit va placer la Colombie dans l'une des situations fiscales les plus délicates depuis longtemps», affirmait en juillet Mauricio Vargas, chroniqueur du quotidien «El Tiempo». Pour faire face, le gouvernement a annoncé une réforme fiscale qui devrait se traduire par une augmentation de la TVA et sera présentée au Parlement après le référendum du 2 octobre lors duquel les Colombiens doivent se prononcer sur les accords de paix. Selon M. Santos, cette réforme ne vise pas à financer le post-conflit, mais à remplacer des taxes qui légalement doivent être supprimées.

Pour l'économiste Eduardo Sarmiento, «la solution» consisterait à relancer l'économie à partir d'un changement de «structure économique» via des politiques industrielles et agricoles qui augmentent les exportations. «De cette manière, la réactivation de l'économie génèrerait des recettes fiscales et créerait les conditions pour augmenter au moment opportun la charge fiscale sur les plus riches», écrivait-il en août dans le quotidien «El Espectador». Face à l'urgence, M. Santos a lancé un appel à la communauté internationale : l'Union européenne versera plus de 575 millions d'euros et les États-Unis ont promis 450 millions de dollars. «C'est une équation assez complexe. Mais l'essentiel de l'accord de paix n'est pas l'économie, sinon que les gens vivent sans peur», a souligné M. Kalmanovitz.

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