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Les investisseurs se rebiffent

Les investisseurs se rebiffent
Présent au capital de plus de 9.000 entreprises, le fonds de 750 milliards d'euros va exposer ses principes sur cette épineuse question dans un «document de position», a indiqué lundi une porte-parole de la division de la banque centrale norvégienne

Le plus gros fonds souverain au monde, le fonds de pension public norvégien, va ajouter sa puissante voix à celle d'investisseurs de plus en plus préoccupés par la rémunération colossale de certains patrons. Présent au capital de plus de 9.000 entreprises, le fonds de 750 milliards d'euros va exposer ses principes sur cette épineuse question dans un «document de position», a indiqué lundi une porte-parole de la division de la banque centrale norvégienne chargée de sa gestion. «C'est un thème que l'on va regarder», a déclaré à l'AFP Marthe Skaar, confirmant des informations du «Financial Times».
Si sa date de parution n'est pas connue, le document ne manquera pas de piquer la curiosité des investisseurs qui considèrent le fonds norvégien comme un modèle, et qui sont irrités par la trop grasse paie de certains dirigeants.

Ces dernières semaines ont vu des frondes retentissantes, y compris parmi des géants de l'industrie. Les actionnaires de BP ont massivement rejeté le 14 avril une forte hausse de rémunération, de 16,4 millions à 19,6 millions de dollars, du directeur général Bob Dudley, alors même que le géant pétrolier britannique venait de boucler l'année 2015 sur une perte abyssale de 6,5 milliards de dollars. Vendredi, ceux de Renault ont également dit non à la paie du PDG Carlos Ghosn. «7,2 millions d'euros pour un mi-temps ?» s'insurgeait un mois plus tôt le cabinet Proxinvest, un des contestataires, dans une allusion à la double casquette du patron du constructeur automobile français, également chef de Nissan. Si ces votes étaient purement consultatifs et n'ont pas été suivis d'effets, ils montrent que la question revêt un caractère de plus en plus sensible. Dans un rapport paru le 21 avril, d'influentes figures du monde des affaires ont estimé que la rémunération des dirigeants des grosses entreprises britanniques récompensait parfois l'échec. La semaine suivante, plusieurs groupes voyaient leurs plans de rémunération fortement chahutés, voire retoqués, par leurs actionnaires.

Dilemme

En Allemagne, Volkswagen s'est attiré les foudres de l'opinion avec les 63 millions d'euros versés à 12 hauts dirigeants au titre de l'année 2015, au moment même où le constructeur automobile essuyait sa première perte (1,6 milliard d'euros) en plus de 20 ans, en raison du scandale des moteurs diesel truqués. Les votes négatifs, comme chez BP et Renault, restent relativement rares.
En France en 2015, les actionnaires ont donné leur approbation à 87%. Mais c'est moins que les 92% enregistrés en 2014, selon l'analyse de 95 assemblées d'entreprise du SBF-120 réalisée par la publication spécialisée «L'Hebdo des AG».

Dès janvier dernier, des experts français réunis par cette publication voyaient la rémunération des dirigeants comme l'un des thèmes dominants des assemblées générales d'actionnaires en 2016. Le fonds norvégien, qui a voté en faveur de l'augmentation salariale de M. Dudley, n'a jusqu'ici pas été très regardant.
Dans 91% des cas, il a soutenu les conditions salariales des patrons américains les mieux payés en 2014, selon une enquête publiée en août dernier par le journal d'affaires Dagens Naeringsliv (DN). Mais là aussi, les temps changent. «Jusqu'à présent nous avons regardé tout ça en nous concentrant sur la structure des rémunérations plutôt que sur leur niveau», a dit le patron du fonds, Yngve Slyngstad, au FT. «Vu l'évolution de la question de la rémunération des dirigeants, nous pensons que nous devrons aussi examiner ce qu'est un niveau de rémunération adéquat pour un dirigeant».

Dans une économie mondialisée et des secteurs hautement concurrentiels, les entreprises sont tiraillées entre un souci de modération, a fortiori en période de réduction d'effectifs, et la nécessité d'attirer les meilleurs talents.
Le fonds norvégien n'échappe lui-même pas au dilemme. DN l'a égratigné ces derniers jours en faisant valoir qu'avec des bonus pouvant atteindre 200% du salaire fixe pour certains cadres, il pratiquait une politique plus généreuse que celle recommandée par l'Union européenne (un plafonnement à 100%, pouvant monter à 200%
dans des cas exceptionnels).

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