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Prix de vente : Maîtriser le sésame

Par Nabil Adel M. Adel est chef d'entreprise, consultant et professeur d’Économie, de stratégie et de finance. Il est également directeur général de l'Institut de Recherche en Géopolitique et Géo-économie à l'[email protected]

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Le prix de vente est ce lien magique entre conquête et fidélisation du client, d’une part, et rémunération des investisseurs, de l’autre. Sa fixation fait l’objet de beaucoup de modèles. Certains sont d’une extrême sophistication (tarification des produits dérivés) et d’autres relèvent davantage de l’intuition des managers (lancement d’un nouveau de produits) et de la pression des marchés (denrées agricoles). La fixation d’un prix de vente doit, en effet, tenir compte de la double contrainte, de satisfaire les clients et de récompenser les actionnaires. C’est un exercice d’équilibriste qui relève autant de la science que de l’art.

Avant de fixer le prix de vente, il y a un préalable indispensable

Dans beaucoup de cas, les entreprises fixent leurs prix de vente en suivant les pratiques du marché ou en s’alignant sur l’offre du principal concurrent. Mais avant de se lancer dans cette tâche délicate, l’entreprise doit au préalable investir dans des systèmes lui permettant de calculer ses coûts de revient et les décliner selon plusieurs axes d’analyse (produits, segments de clients, réseaux de distribution, etc.). La fine connaissance de la formation des coûts permet à l’entreprise de mieux les maîtriser.
Ce faisant, elle obtient un double avantage par rapport à ses concurrents. Elle peut soit réduire ses prix de vente, partant, leur «grignoter» des parts de marché, soit augmenter ses marges et donc pouvoir financer des investissements d’extension de capacités ou de gain de parts de marché par croissance externe (acquisition de petits acteurs). La mise en place d'un système de comptabilité de gestion est donc un outil stratégique pour l’entreprise, surtout dans les marchés où les marges sont faibles et la clientèle est fortement volatile, car sensible aux prix. Dans ces cas, les économies de quelques pourcentages sur les coûts de revient revêtent une importance capitale et deviennent, parfois même, la limite entre la survie et la faillite. Il est donc regrettable que beaucoup d’entreprises, surtout les PME, n’accordent pas à la comptabilité analytique l’importance qu’elle mérite. Certaines n’ont qu’une vague idée de leurs coûts de revient, et donc de leurs marges, par produit.

Quand la technologie devient source d’avantages compétitifs

La baisse des prix est considérée par beaucoup d’entreprises comme le meilleur moyen de gagner des parts de marché. Pour d’autres, la fixation d’un prix élevé leur permet de satisfaire chez leurs clients le besoin psychologique d’appartenance et de différenciation.
Quelle que soit la finalité du prix de vente pour l’entreprise, son élaboration et son évolution doivent être le fruit d’un travail sérieux d’analyse et de traitement de données. Il commence par la compréhension du comportement des clients et le degré d’importance qu’ils accordent aux prix dans la décision d’achat (il faut pouvoir l’exprimer en pourcentage par rapport à d’autres critères de choix). Ensuite, il y a lieu d’élaborer des modèles d’analyse qui transforment les données brutes recueillies en offres de prix adaptés par segments de clientèles.
Ce lien entre analyse statistique et déclinaison marketing doit s’appuyer sur les dernières technologies, en la matière (Customer Relationship Management, Datamining, Big Data, etc.).
De nos jours, les systèmes d’information s’appuyant sur les dernières technologies ne servent plus uniquement à la simple mécanisation des tâches, ni en tant qu’outil d’aide à la décision, ils deviennent de véritables sources d’avantages compétitifs pour l’entreprise, au même titre que l’offre produits, le pouvoir de la marque ou la gestion des réseaux de distribution. Les informaticiens sont désormais au cœur de la création de valeur, au même titre que les producteurs et les commerciaux. Une part du chiffre d’affaires de l’entreprise doit, ainsi, être dédiée à l’acquisition de l’intelligence requise pour la tarification sur des bases scientifiques.

Mieux vivre la dictature du marché : veille marketing

Le réflexe qui consiste à fixer les prix de vente en fonction du niveau de marge que veut l’entreprise pour rémunérer ses actionnaires est voué d’avance à l’échec.
Ce n’est pas au marché (plus précisément au client) de s’adapter aux prix de l’entreprise, c’est l’inverse. En effet, le marché ne suit les prix d’un acteur que dans des cas bien particuliers (innovation majeure, marque très forte ou situation monopolistique). La majorité des entreprises doivent gérer la dictature du marché en matière
de prix.
Il est donc important que le centre névralgique de la firme soit tourné vers son marché, par la mise en place de processus structurés de veille marketing. Il est indispensable pour l’entreprise d’avoir les yeux rivés sur son environnement pour anticiper les changements de prix. Cette démarche suppose l’analyse systématique des prix pratiqués par les concurrents et leur évolution. Mais ceci n’est qu’une infime partie du travail à faire par les «veilleurs».
Bien souvent les modifications des prix de vente ont des sources en amont (pénurie ou excédent de production chez les fournisseurs), en aval (hausse ou baisse de la demande chez les clients, suite à l’apparition d’un produit de substitution) ou en dehors du marché (nouvelles normes réglementaires). L’entreprise doit être en mesure de «guetter» ces mutations avant leur apparition pour mieux s’y adapter.
Autrement, elle subira le choc de plein fouet, tant une modification des prix pour des raisons qu’elle n’aurait pas anticipées peut signifier tout simplement la signature de son acte de décès.
En matière de tarification, il y a des entreprises qui font le marché, d’autres qui s’y adaptent très facilement, alors que certaines le subissent dans leur chair.
Ce n’est pas une affaire de taille, c’est souvent une question de bonne préparation. 

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