La Société marocaine des sciences médicales (SMSM), avec le soutien de l’Ordre national des médecins, vise à travers cette rencontre à relancer le débat autour de la procréation médicalement assistée (PMA) au sein de la société marocaine. Le choix du timing n’est pas fortuit, il intervient quelques semaines avant l’ouverture de la session printanière du Parlement, qui devrait se pencher sur le projet de loi 47-17 relatif à la PMA, soumis au Parlement, après son adoption par le Conseil de gouvernement en avril 2016. Selon la SMSM, «le colloque vise à jeter la lumière sur les dimensions scientifiques, humaines, sociales et juridiques en relation avec le projet de loi».
Cette manifestation, à laquelle prendront part des spécialistes de différents horizons, devrait également faire le point sur les apports et les limites du projet de loi. Pour les organisateurs, le texte de loi devra consolider cette pratique biomédicale, dans le strict respect des enseignements religieux, de la déontologie, des valeurs humaines et de l'identité sociale. Rappelons ici que le projet de loi 47-17 a été élaboré par le ministère de la Santé et vise à renforcer l'arsenal juridique national dans le domaine des sciences médicales et des techniques biomédicales et à combler le vide juridique en matière de pratiques relatives à la procréation médicalement assistée. Ce projet de loi a également pour objectif de définir les principes généraux régissant la PMA.
Malgré son importance, le texte ne fait pas l’unanimité au sein des professionnels de la Santé. Certains déplorent l’attitude unilatérale du département de la Santé, qui n’a pas consulté, selon eux, des spécialistes en lien avec la question, comme les médecins, les théologiens et les juristes. Contacté par «le Matin», Bahae Benomar, spécialiste en fécondation in vitro, a indiqué que «la procréation médicalement assistée, compte tenu de sa vocation multidisciplinaire, nécessite la collaboration étroite de nombreux spécialistes, à savoir les gynécologues, les urologues, les andrologues, les endocrinologues et les médecins ou pharmaciens biologistes». Et d’ajouter que le législateur a besoin des éclairages respectifs de tous les intervenants pour avoir un texte de loi adapté, d’une part, aux avancées scientifiques et leur rapide évolution et, d’autre part, aux données propres à notre éthique musulmane.
S’agissant du volet religieux, Bahae Benomar a expliqué que «les techniques de PMA ont suscité, dans le monde musulman, beaucoup d’intérêt et soulevé des interrogations quant à leur légitimité, ce qui a amené à l’élaboration de fatwas dans de nombreux pays». La première, émanant d’Al-Azhar en 1980, autorise la PMA au sein du couple marié avec les gamètes parentaux, tout ce qui relève du don est interdit (gamète ou embryon), il en est de même de la gestation pour autrui (GPA) nécessitant une mère porteuse. D’après cette spécialiste, il y a un grand manque d’information des couples qui arrivent quelquefois très tardivement au niveau des centres, sachant que le taux de succès dépend directement, entre autres, de l’âge de la femme.
L’autre point qui déplait aux professionnels est la non-reconnaissance de l’infertilité comme une maladie, contrairement aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé, ce qui pose le problème de la prise en charge de l’infertilité. Ainsi, en l’absence de couverture sociale, les charges financières restent très lourdes, toujours selon Bahae Benomar. La SMSM estime que la stérilité, devenue un véritable problème de santé publique, requiert une attention particulière au niveau de la politique de santé. Ce qui nécessite la mise en place des mesures nécessaires pour garantir le droit des personnes privées à enfanter, notamment en termes de couverture médicale de base couvrant les frais des médicaments, les traitements et les interventions chirurgicales d'assistance médicale à la procréation.
Ainsi, l’Assistance médicale à la procréation est considérée comme étant l'une des dernières technologies scientifiques pour faire face aux problèmes de fécondation chez les couples, dont la moyenne mondiale de survenance se situe entre 12 et 15%, selon les statistiques de l’OMS.