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L’inflation maîtrisée, mais à quel prix ?

L’économie nationale se porterait mieux cette année. Ce qui est présenté comme une reprise n'est en fait qu'un effet de rattrapage après une année 2016 en berne. L’inflation qui restera maitrisée montre bien que les indicateurs de croissance ne devraient pas s'affoler, la reprise économique se traduisant souvent par une poussée inflationniste.

L’inflation maîtrisée, mais à quel prix ?

L'activité économique est en train de reprendre, mais l’inflation resterait maitrisée. Une conjonction qui n’est pas tout à fait courante, ni normale du point de vue économique. L’économie nationale devrait ainsi croître de 4,3% cette année, sous l’effet d’un net rattrapage de la valeur ajoutée agricole (11,5%) et d’une amélioration de 3,4% du produit intérieur brut (PIB) non agricole, selon les dernières prévisions de Bank Al-Maghrib (BAM). Dans le même temps, la Banque centrale table sur une relative accalmie de l’inflation. À moyen terme, celle-ci devrait, en effet, rester modérée, selon BAM. Après 1,6% en 2016, elle s'établirait à 1,1% en moyenne cette année, avec la dissipation de l’impact des chocs sur les prix des produits alimentaires à prix volatils, avant de monter à 1,7% en 2018. Sa composante sous-jacente devrait s’inscrire dans une tendance haussière, passant à 1,5% en 2017 puis à 1,9% en 2018, à la faveur de l’amélioration de la demande domestique et de la hausse de l’inflation importée.

En février dernier, l’inflation, appréhendée par l'indice des prix à la consommation, s’est établie à 1,6% en variation annuelle. Cette évolution est attribuable au repli du rythme de progression des prix des produits alimentaires à prix volatils de 6,3 à 1,9% sur une année, incluant principalement une décélération de 14,6 à 5,6% du rythme d’accroissement des prix des légumes frais et un reflux de 10,8% des prix des œufs après une augmentation de 9,5%. La hausse des prix des carburants et lubrifiants s’est, de son côté, accentuée de 19,4 à 20,8%, et celle des tarifs des produits réglementés de 0,6 à 0,7%. Abstraction faite de ces produits, l’inflation sous-jacente s’est inscrite en légère accélération de 1,2 à 1,3%, détaille la Banque centrale.

Le Maroc reste ainsi fidèle à une tradition qui est déjà assez enracinée et qui consiste à garder l’inflation maitrisée. Ainsi, depuis 2008, le pays n’a plus dépassé 2% et affiche un niveau de 1,9% en moyenne sur la période 2000-2009, selon le Fonds monétaire international (FMI), contre 9,3% entre 1990 et 1997. Cette tendance se poursuit. Ainsi, après un taux exceptionnellement bas en 2014, soit 0,4% (le taux le plus bas enregistré depuis 1968, année où l’inflation avait atteint 0,4% après -0,8% en 1967 et -1% en 1966), l’inflation est passée à un niveau modéré en 2015, selon BAM. Elle s’est établie à 1,6%. En 2016, elle s’est stabilisée au même niveau.

L’inflation reste donc maitrisée, au moment où l’on annonce une reprise économique. Un constat qui devrait satisfaire la ménagère (même si elle n'en ressent pas vraiment les effets au quotidien), mais selon les économistes que nous avons sondés, il n'y a pas de quoi pavoiser. Pour l'économiste Mohamed Chiguer, dire que l’on est arrivé à maîtriser l’inflation revient à «enfoncer les portes ouvertes», puisque l’inflation est déjà stable depuis longtemps. Une situation due, selon lui, à la maîtrise de la demande, du maintien à un niveau faible du pouvoir d’achat des consommateurs, ce qui empêche l’installation d’une dynamique économique. Ce qui fait dire à Mohamed Chiguer qu'il n'y a pas de vraie reprise économique.

Nabil Adel abonde dans le même sens. Parler d’une reprise économique, en avançant une prévision de croissance du PIB non agricole de 3,4% relève de l’absurde pour cet économiste qui évoque des cas de pays développés qui arrivent à réaliser des taux pareils, voire supérieurs, tels l’Allemagne. Un pays comme le nôtre, qui est en voie de développement, doit enregistrer un taux de croissance du PIB non agricole à deux chiffres, estime-t-il, en appelant à revoir profondément la politique économique du pays pour pouvoir enclencher une vraie dynamique économique. Et quand la machine tourne, les prix suivent. 

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