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Les parents insatisfaits du renouvellement des manuels scolaires

Les manuels scolaires sont-ils en total déphasage avec la réalité marocaine et les besoins éducatifs de la jeune génération ? C’est une question que l’on ne peut éviter de se poser, surtout après le dernier renouvellement de ces livres qui a suscité la colère de nombreux parents.

Les parents insatisfaits du renouvellement  des manuels scolaires

Depuis le début de l’année scolaire, beaucoup de parents d’élèves se sont manifestés, notamment sur les réseaux sociaux, en publiant des passages de textes extraits de ces nouveaux manuels, exprimant leur colère et leur incompréhension du niveau, jugé très bas, de ces nouveaux manuels qui accompagneront leurs enfants au moins le temps d’une année scolaire. «Il faut absolument revoir ces manuels, car les thématiques sont dépassées et ne correspondent pas au vécu de nos enfants. Je trouve aussi qu’ils sont trop chargés, surtout pour l’arabe et l’éducation islamique. Les textes sont longs avec beaucoup de choses à apprendre, même pour les plus petits. Personnellement, je préfère mille fois que mon enfant apprenne deux notions et deux principes durant l'année et qu'il passe à l'application, plutôt que ces tonnes d'informations généralement mal comprises», témoigne Hasna, maman d’un élève en primaire. Si les manuels de langue arabe et d'éducation islamique sont critiqués pour leur contenu trop chargé, ceux de la langue française sont au contraire «trop basiques» et laissent à désirer, juge-t-on. «Je suis vraiment déçue par la nouvelle édition du manuel de français de la sixième année du primaire. Ce n’est vraiment pas riche en vocabulaire. Pour réviser avec mes enfants, je me rabats souvent sur les sites internet pour chercher des exercices ciblant tous les points de la leçon», déplore Rajâa, une autre maman. Autre point négatif relevé par certains parents, c’est la faible présence des femmes dans les manuels scolaires, et souvent assignées à des rôles stéréotypés comme la prise en charge des tâches ménagères. «Ces manuels sont remplis de messages discriminatoires et ne suivent pas du tout l’évolution des mentalités et de la société marocaine. Par exemple, pour le livre de la langue arabe au CP, on voit l’image d’une petite qui range les coussins et ils persistent et signent en disant qu'elle aide sa maman à accomplir des tâches ménagères. Pour les manuels de l’éducation islamique, c'est laissé à la discrétion des maîtresses d'arabe, sans encadrement, sachant que les messages qu'on passe à cet âge restent pour la vie...», fustige Fatim Zohra, maman d’un élève au CP. Même constat pour le Réseau de jeunes Marocains engagés qui a publié dernièrement une étude sur les manuels (histoire et géographie, éducation islamique et langue arabe). «Souvent dans ces manuels, le discours est toujours orienté vers les hommes, et le rôle de la femme est généralement limité aux tâches ménagères», souligne l’étude.

Et d’ajouter que «le problème ne concerne pas seulement la gent féminine, mais également les couches sociales défavorisées qui font parfois l’objet de comparaison avec les milieux aisés». De son côté, l'Association indépendante des parents d’élèves en enseignement privé (AIPEEP) a souligné que le sujet des manuels scolaires préoccupe aussi bien les parents que les enseignants et qu’elle s’apprêtait à agir pour changer cette situation. «Dans le cadre du lancement du Programme pilote experts pôle compétences et progrès, l’AIPEEP compte donner la parole aux parents avec un appui de 160 experts dans les domaines pédagogiques et de l'enseignement, dont des psychologues et des concepteurs pédagogiques. Ces derniers vont se pencher sur les programmes scolaires d'ici juillet 2018, afin d’émettre des propositions d'amélioration avec une large concertation». 


Questions à Fouad Chafiqui, directeur des curricula et des programmes scolaires au sein du ministère de l’Éducation nationale

«Les manuels concernés par le renouvellement sont ceux de la langue française des niveaux des 5e et 6e années du primaire et des trois années du collège»

Quel est l'objectif derrière le renouvellement des manuels scolaires cette année, sachant qu'ils viennent de l'être l'année dernière ?

Le renouvellement des manuels de français de certains niveaux scolaires vise l’introduction de l’approche actionnelle dans l’enseignement-apprentissage du français comme langue étrangère. Cette méthode a été testée pendant la précédente année scolaire sous l’appellation «Agir autrement pour l’enseignement et l’apprentissage du français». Elle a donné de bons résultats dans les établissements pilotes et a été bien appréciée par les enseignants. Concernant les manuels d’éducation islamique, vu l’ampleur et la profondeur des changements introduits en septembre 2016, les 29 manuels élaborés par les équipes pédagogiques, extérieures au ministère, ont montré des limites lors de l’expérimentation dans les classes. Cela a nécessité une évaluation supplémentaire par les enseignants et les inspecteurs, en plus de celles réalisées par le Conseil supérieur des oulémas et par la Commission nationale d’évaluation des manuels scolaires et des valeurs, évaluation qui a donné lieu à des rapports sur chaque version expérimentale des 29 manuels.

Quels sont les manuels scolaires concernés par ce renouvellement ?
Les manuels scolaires concernés cette année par le renouvellement sont essentiellement ceux de la langue française des niveaux scolaires de cinquième et de sixième années du primaire et des trois années du collège. D’autres manuels ont subi soit des améliorations soit un léger changement du fait de l’évolution du cadre législatif national.

Depuis la publication des nouveaux manuels, beaucoup de citoyens, essentiellement des parents, se sont mis à critiquer sur les réseaux sociaux le contenu de ces livres jugés remplis d'erreurs et d'un niveau assez bas. Que pouvez-vous répondre ?
Pour interagir avec ces réactions, il faudra parler de choses concrètes et ne pas se contenter des critiques dans l’absolu. À titre d’exemple, l’introduction, dans la composante comptines en première année du primaire, d’un conte intitulé «Le navet géant» a soulevé beaucoup de critiques très hâtives sachant que ce conte fait partie de la littérature internationale destinée aux enfants. Il suffit d’introduire ce titre dans un moteur de recherche sur Internet et dans toutes les langues (navet géant, the giant turnip...) pour se rendre compte de l’absurdité des critiques formulées à l’encontre de ce choix qui est largement justifié si l’on procède à l’analyse des valeurs véhiculées par ce conte. 

 

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