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Les régions du Royaume recèlent de «véritables trésors» musicaux

Première documentariste du Maroc, la réalisatrice et productrice Izza Génini est l’auteure de nombreuses œuvres autour du Maroc, de sa culture et de son patrimoine. Née en 1942 à Casablanca dans une famille juive, elle vit depuis 1960 à Paris où elle a consacré tout son temps au cinéma et à la musique du Maroc. Ces deux passions l’ont poussée à réaliser une série de films traitant de la richesse musicale et culturelle du Royaume qu’elle a baptisée «Maroc corps et âme». Invitée au Festival d’Al-Haouz, Izza Génini s’est pliée avec amabilité à nos questions pour nous faire découvrir la richesse de ce patrimoine musical marocain qui est toujours vivace dans ses films.

Les régions du Royaume recèlent  de «véritables trésors» musicaux

Le Matin : Trois de vos films documentaires traitant des différentes facettes de la musique marocaine ont été projetés lors du Festival d’Al-Haouz. Comment vous êtes-vous lancée corps et âme dans ce projet grandiose qu’est le patrimoine musical national sous toutes ses formes ?
Izza Génini : Effectivement. Les films projetés sont au nombre de trois. Il s’agit de «Retrouver Oulad Moumen», la saga de ma famille, «Voix du Maroc», un montage à part de la série documentaire «Maroc corps et âme», qui offre en 10 films une vision de la richesse musicale marocaine, et enfin «Transes» (El-Hal) que j’ai produit en 1981 et dont j’avais confié la réalisation à Ahmed El Maanouni. Chacun de ces films et de tous ceux que j’ai réalisés à ce jour est une aventure à part tant sur le plan de l’inspiration du sujet, de son écriture, de sa production qu’au niveau de son financement. Ils ont tous un dénominateur commun : mon désir de témoigner et de partager cette richesse dont je fus la première éblouie. Et ce en autodidacte, car je ne maîtrisais ni la technique cinématographique ni la connaissance académique de la musique. Je me suis seulement laissée guider par mon intuition, en premier lieu celle de filmer la musique dans son contexte naturel, géographique, humain. C'est la chance et surtout les bons mentors, comme feu Tayeb Saddiki, qui m’ont guidée vers les meilleurs artistes. Hélas, beaucoup d’entre eux ont disparu, dont feus Abdessadek Cheqqara, Haj Houcine Toulali, Baba, Mouha Oulhossein Achiban, surnommé le Maestro, Larbi Batma et Paco. Ils ne sont plus là, mais dans les films ils sont bien là, bien vivants, si généreux de leurs talents… Aujourd’hui, ces films relèvent, me dit-on, du patrimoine. Si c’est le cas, j’en suis fière et reconnaissante à la vie qui m’a mise sur cette voie.

À vos yeux, quels sont les ingrédients à même de promouvoir ce patrimoine et de permettre à vos films de trouver leurs publics ?
Aujourd’hui, les moyens de diffusion et de promotion de la culture et de nos musiques ne manquent pas. Sur le plan technique d’une part avec tous les réseaux de télécommunication télévisuels, auxquels il faut ajouter le nombre incalculable et la qualité des festivals à travers le Royaume et leur rayonnement à l’étranger. Mais malgré cela, j’y apporterais un bémol, particulièrement en matière pédagogique. À titre d’exemple, mes films dont on reconnaît la valeur patrimoniale sur le plan national et la valeur culturelle à l’échelle internationale, je n’ai jamais pu les faire distribuer au Maroc. Manque de distributeurs vidéo, risque de piratage, manque de diffusion culturelle via les médiathèques, le réseau scolaire et universitaire… Et ce n’est pas le moindre des paradoxes. Heureusement, j’ai pu conclure un accord avec la Fondation Majorelle qui diffusera mes films et ceux d’André Goldenberg et Marie-Rose Rabat, dont j’assure la distribution, en streaming gratuit après l’ouverture du Musée Yves Saint Laurent de Marrakech.

Quels sont les styles de musique que vous n’avez pas encore abordés dans vos documentaires et que vous rêvez de produire ?
Ils sont nombreux. Malgré la quinzaine de films que j’ai réalisés, j’ai le sentiment d’avoir à peine soulevé le voile d’une richesse foisonnante. Sans parler de musiciens ou de genres musicaux particuliers, il y a des régions entières qui recèlent, j’en suis sûre, de véritables trésors, mais que je n’ai pas eu l’occasion d’aborder, dont le nord et l’est du Maroc, le Souss, le Sahara et le Tafilalet.

Votre collection de documentaires «Maroc corps et âme» compte aujourd'hui plus d'une vingtaine de films portant sur les différents aspects de la culture et de la société marocaines. Avez-vous réussi à adapter cette collection aux nouvelles normes technologiques ?
J’ai tourné les 11 titres de la série «Maroc corps et âme» en 16 mm et parfois même en 35 mm. À partir de «Retrouver Oulad Moumen», je suis passée à la vidéo et depuis j’ai continué à tourner en vidéo, mais en m’adaptant aux nouvelles technologies qui n’ont cessé d’évoluer. Aujourd’hui, tous les films, y compris ceux qui furent tournés en 16 mm, sont numérisés et ont fait l’objet de deux rééditions DVD, dont la dernière, «Maroc en musique», en est un bel exemple. De nos jours, il me reste à rouvrir un chantier important qui est celui de mes archives : les répertorier, les numériser, les sauvegarder, car il s’y cache peut être quelques trésors ? Voilà ce que je rêve de réaliser. 

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