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Osez prendre l’initiative... Optez pour l’entrepreneuriat !

Même si le chômage bat son plein et que les jeunes en sont les premiers touchés, un grand nombre d'entre eux hésite à prendre la voie de l’entrepreneuriat et créer son propre entreprise dans une démarche d’auto-emploi. La majorité opte encore pour le salariat pour ne pas prendre de risques. Pourtant, il le faudrait bien pour favoriser l’employabilité.

Le constat ne change pas ! Le chômage a atteint 10,6% au troisième trimestre 2017, portant ainsi le nombre total de chômeurs au niveau national à 1.236.000 personnes. Et comme une mauvaise nouvelle n’arrive jamais seule, le Haut Commissariat au Plan (HCP) qui révèle ces chiffres indique, par la même occasion, que les diplômés et les jeunes âgés de 15 à 24 ans font partie des catégories les plus touchées par le chômage, avec 18,2 et 29,3%, respectivement. Cela signifie que l’offre sur le marché de travail n’arrive pas à absorber la demande d’emploi. Il devient ainsi plus que nécessaire de se tourner vers l’autre option qui semble la plus appropriée, c’est-à-dire l’entrepreneuriat. «La solution au chômage ne réside pas uniquement dans la création de postes. Il y a des circonstances économiques et conjoncturelles qui poussent les entreprises à freiner leur développement, à asseoir l’existant ou à disparaitre et donc ne plus offrir d'opportunités de travail. C'est pour cela que je pense que la création de postes et la dynamique économique doivent également passer par l’entrepreneuriat. Celui-ci est une solution très importante pour répondre à la problématique du chômage et l’insertion professionnelle. Une école qui ne se dote pas des deux démarches : préparer pour l’entreprise et pour l’entrepreneuriat, c’est une école qui répond à moitié à sa mission», souligne Mohammed Amine Barkate, directeur de l’École française des affaires (EFA).
L’entrepreneuriat est, en effet, une des solutions miracles pour faire face au chômage, notamment chez les jeunes et les femmes. C'est d'ailleurs pour cette raison que le Maroc multiplie les actions afin d'encourager les jeunes et moins jeunes à suivre cette voie. Que ce soit à travers la mise en œuvre du statut de l'auto-entrepreneur, l’accompagnement des TPE et autres petites entreprises… Or, force est de constater que les initiatives ne sont pas suffisantes, comme en témoigne le rapport Global Entrepreneurship Monitor (GEM) 2016-2017. Ce dernier souligne que même si le Maroc présente des indicateurs relatifs à la culture entrepreneuriale et au potentiel entrepreneurial assez élevés, le taux d’activité entrepreneuriale (TAE) stagne à 5,6%. Certes, ce taux a connu une légère hausse, mais le rapport souligne que cette performance n'est pas suffisante pour générer un nouveau «flux» d’entreprises qui assurerait une dynamique plus entrepreneuriale de l’économie nationale. «Nous sommes convaincus que l’entrepreneuriat est une affaire d’individu porteur de projets. C’est cette “personne” que nous plaçons au centre de nos valeurs. Néanmoins, l’environnement peut faciliter l’acte d’entreprendre. À cet égard, le Maroc dispose d’atouts favorables aux initiatives entrepreneuriales en termes d’infrastructure, de dispositif légal et commercial et de politique publique. Des efforts ont été déployés ces dernières années pour améliorer le climat des affaires en simplifiant les démarches de création d’entreprises», explique Élise Broumm Tarhat, directrice générale Réseau Entreprendre Maroc. Cette dernière rappelle que l’État, à travers la Caisse centrale de garantie (CCG), a mis dernièrement en place le Fonds Innov Invest dont une partie sera destinée à subventionner les projets innovants. Cependant, remarque Élise Broumm Tarhat, «comparé à des pays de niveau de développement similaire, le Maroc connait une carence en entrepreneurs. L’État est appelé à développer encore plus la prise d’initiative à travers le développement d’un système éducatif et de formation qui favorise l’entrepreneuriat et l’amélioration de l’accès au financement en l’adaptant aux besoins des nouveaux entrepreneurs et renforcer la lutte contre les activités informelles».
C’est justement pour sensibiliser à l'importance de la prise d'initiative dans l’entrepreneuriat que l’EFA, en partenariat avec la Chambre française de commerce et d’industrie du Maroc (CFCIM), a organisé courant de la semaine dernière une rencontre sur le thème «La prise d’initiative et l’entrepreneuriat». Cette rencontre s'inscrit dans le cadre des cycles de conférences de l’École et a été animée par le directeur général de Total Maroc, Jean-Louis Bonenfant. «L’EFA et CFCIM, à travers ce cycle de conférences, souhaitent connecter les étudiants au monde de l’entreprise. Notre objectif est de répondre à notre client principal qui est l’entreprise, à travers une formation qui permettra aux jeunes diplômés d’être en adéquation avec les besoins de l’entreprise. Pour les grands groupes, l'important est de pouvoir les accompagner dans leurs développements futurs. Pour les PME et PMI, l’objectif est de leur donner les ressources qui sont capables de les aider à se développer et à survivre dans un contexte concurrentiel. Pour mieux réussir notre mission, il est essentiel d’écouter ces entreprises et de les faire intervenir auprès des étudiants pour qu’ils puissent transmettre leurs messages. Aujourd’hui, il est question de prise d’initiative, de challenge, et du fait de ne pas avoir peur d’un grand groupe, d’oser…», indique Mohammed Amine Barkate.

Oser entreprendre
C'est justement ce courage qui fait défaut à beaucoup de jeunes chercheurs d'emplois, notamment en matière d’entrepreneuriat. «L’entrepreneuriat n’est pas inné, c’est plutôt acquis. On ne nait pas entrepreneur, mais on décide de le devenir tout en prenant en compte les risques qu’une telle expérience peut comporter. Se lancer dans une démarche d’entrepreneuriat c’est faire un pas différent dans sa carrière professionnelle et c’est aussi accepter d’abandonner le monde du salariat avec ses avantages et ses inconvénients pour vivre de nouveaux challenges et défis. Cela parait ambitieux, mais nombreux sont ceux qui n’arrivent pas à faire le pas», explique Karima Rihani, psychosociologue et coach de performance en entreprise. Même son de cloche chez le directeur de l’EFA. Barkate estime, en effet, que la prise d'initiatives et la peur du risque dépendent de l'environnement où grandit chacun, mais que cela ne peut être un frein à l'épanouissement et la réalisation de soi. «J’estime tout de même que l’école joue un rôle important dans la construction de la personnalité de l'étudiant notamment en lui permettant de gagner en confiance en soi. La formation n’est qu’une clé pour l’épanouissement personnel, mais l’élément qui fait la différence entre une école et une autre, c’est sa capacité à participer au développement personnel de l'étudiant. Les gens identifiés comme étant de hauts potentiels au niveau des entreprises le sont grâce à leur personnalité. Ils ont du courage, de la volonté, de l’ambition… et tout cela s’apprend. L’école doit investir dans le développement personnel de ses étudiants et ne pas se concentrer uniquement sur le développement des métiers», indique-t-il. Et d’insister que «notre souhait c’est que nos étudiants, au lieu de réfléchir à l’option salariale, puissent penser à créer leur propre entreprise et devenir eux-mêmes des générateurs d’opportunités de travail. Il y a évidemment un certain risque à prendre quand on est jeune et sans expérience, mais je pense qu’à travers tout ce qui est en train de se mettre en place, que ce soit à travers le programme Cluster de la CFCIM, les think tank des associations professionnelles…, cela devrait réduire cette part de risque chez les jeunes porteurs d’idées». Hormis les soutiens pratiques et accompagnements, Karima Rihani préconise également d'effectuer un travail sur soi pour faire face aux barrières psychologiques qui freinent la prise d'initiatives chez l'individu : «Il s’agit d’abord d’avoir un objectif précis à atteindre, puis d’identifier les compétences à développer et les points de blocage à travailler. Il faut aussi éviter de s’entourer de personnes négatives qui tirent vers le bas et, si nécessaire, recourir à un spécialiste, notamment un coach».


Les obstacles de la prise d'initiatives, selon Karima Rihani, psychosociologue et coach de performance en entreprise

• La peur du changement : La peur est d’emblée une barrière psychologique. Se lancer dans l’entrepreneuriat c’est prendre un grand risque, ce qui engendre le sentiment de la peur.
• Les croyances limitantes : «Je n’y arriverai pas», «Je ne dispose pas des compétences nécessaires pour monter un projet», «L’entrepreneuriat est une démarche vouée à l’échec au Maroc»… Ces croyances et d’autres font que le cerveau accepte la réalité que l’on ne peut pas ou l’on veut se lancer dans l’entrepreneuriat et, par conséquent, la personne cesse de fournir des efforts.
• Les barrières culturelles : Nos parents, nos familles, nos amis favorisent plutôt la stabilité. Autrement dit, ils nous encouragent à opter pour le salarié au lieu de l’entrepreneuriat.
• Le manque de compétences : L’entrepreneuriat n’est pas une démarche aisée et nécessite plusieurs compétences, notamment le courage, la volonté, l’ouverture d’esprit et la capacité de se fixer et de relever des challenges.

 

Entretien avec Élise Broumm Tarhat, directrice générale du Réseau Entreprendre Maroc

«Les jeunes de moins de 25 ans sont les moins entreprenants»

Éco-Emploi : Parlez-nous du Réseau Entreprendre Maroc ?
Elise Broumm Tarhat : Réseau Entreprendre Maroc est une association marocaine de chefs d’entreprise, faisant partie du réseau international d’associations de Réseau Entreprendre, qui a vu le jour en 2006 et qui est engagée dans l’accompagnement entrepreneurial de porteurs de projet en phase d’amorçage et à potentiel de création d’emplois. Notre conviction : «Pour créer des emplois, créons des employeurs». Notre vocation est de faire réussir chaque créateur ou repreneur d’entreprise à fort potentiel. En leur offrant un accompagnement humain personnalisé de trois ans, réalisé par des chefs d’entreprise expérimentés et en activité ; un financement gratuit sans garantie ni intérêt ; une mise en réseau locale, nationale et internationale avec plus de 16.000 chefs d’entreprises basés dans 10 pays. Ces trois composantes sont essentielles au bon démarrage d’une entreprise. Aujourd’hui après trois ans d’activité, 86% des entreprises accompagnées sont toujours en activité et créent des emplois. Nous sommes aujourd’hui présents dans huit villes du Royaume, à savoir Casablanca, Marrakech, Rabat, Agadir, El Jadida, Khouribga, Ben Guérir et Tanger. Grâce à l'engagement bénévole de 300 membres-chefs d'entreprise au Maroc, depuis 2011, près de 200 jeunes entrepreneurs sont devenus lauréats de Réseau Entreprendre Maroc et ont bénéficié ou bénéficient actuellement de notre offre. Ce sont près de 650 emplois formels qui ont été créés à travers les 130 entreprises lauréates et 16 millions de Prêts d’honneur qui ont été accordés. Réseau Entreprendre Maroc fait aujourd'hui partie des six structures d’accompagnement venant d’être labellisées Structures d’accompagnement des start-ups et projets innovants, dans le cadre du Fonds Innov Invest. L’accompagnement des projets innovants sera donc au cœur des ambitions de Réseau Entreprendre Maroc dans 
les mois à venir.

Pourquoi la prise d'initiative en entrepreneuriat demeure-t-elle faible chez les jeunes ?
Chez Réseau Entreprendre Maroc, nous rencontrons de plus en plus de jeunes avec l’intention de créer des entreprises et qui considèrent l’entrepreneuriat comme une carrière professionnelle envisageable. Cependant, les moins de 25 ans représentent moins de 10% de l’ensemble des créateurs que nous accompagnons. Au Maroc, comme beaucoup ailleurs, les jeunes de moins de 25 ans représentent la catégorie la moins entreprenante. Bien que leur intention de créer une entreprise soit élevée, peu d’entre eux passent réellement à l’acte. Le premier frein est l’éducation et la formation à l’entrepreneuriat qui ne favorisent pas suffisamment l’entrepreneuriat. 
Les étudiants sont orientés, dès l’enseignement primaire et secondaire, vers le statut de salarié plutôt que celui d’entrepreneur créateur d’emplois et cela reste vrai même dans l’enseignement supérieur. Le problème du financement constitue sans doute aussi l’une des principales sources de blocage de la croissance de l’entrepreneuriat chez les jeunes qui trouvent des difficultés à répondre aux attentes des systèmes de financements actuellement disponibles. Et enfin, face à la réalité des taux élevés d’échecs des nouvelles entreprises au démarrage (environ 70%, selon les sources officielles) beaucoup de jeunes hésitent à se lancer dans l’entrepreneuriat.


Comment sensibiliser les jeunes aux opportunités qu'offre l'entrepreneuriat et développer chez eux l'esprit entrepreneurial ?
Premièrement, au niveau de l’enseignement, dès le premier âge, l’école doit être reconnue comme étant un élément essentiel au développement de la culture entrepreneuriale chez les jeunes pour permettre de développer les attitudes entrepreneuriales telles que la persévérance, la créativité, l’esprit d’initiative et la responsabilité. Deuxièmement, par l’amélioration de la visibilité, la cohérence et la performance des organismes de sensibilisation, d’aides et d’accompagnement à la création d’entreprises qui doivent mettre le porteur de projet au cœur de leurs dispositifs. Il n’est pas forcément nécessaire de créer de nouvelles structures : il faudrait plutôt renforcer les organismes actifs.

On remarque que la majorité des jeunes qui se lancent dans l'entrepreneuriat choisissent les secteurs des services ou des nouvelles technologies. Comment expliquez-vous cela ?
En effet, à fin 2016, environ 50% des 130 entreprises que nous accompagnons chez Réseau Entreprendre Maroc sont dans les secteurs des services et des NTIC. Cela s’explique par l’orientation des jeunes vers des activités où les coûts de démarrage et les barrières à l’entrée sont les plus faibles. De plus, les jeunes sont généralement les premiers intéressés par la nouveauté, les nouvelles technologies.

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