On dit que le mois du Ramadan apaise les esprits. Pourtant, nous nous sommes malheureusement habitués à voir une mauvaise humeur générale s’installer dans nos rues durant cette période, essentiellement dans les grandes villes. En effet, chaque année le phénomène du «tramdine» fait son apparition dès le premier jour du mois sacré et prend de l'ampleur d'année en année, provoquant parfois des drames. Accidents de circulation, disputes et parfois crimes sont fréquents pendant ce mois. Depuis le début du mois, la presse nationale rapporte régulièrement des cas de personnes piquées par le moustique du «tramdine» et qui finissent souvent par commettre l’irréparable.
Le premier jour du mois du Ramadan par exemple, on a recensé trois homicides. Au cimetière Errahma, un jeune a poignardé son ami suite à une dispute à propos d'une somme d'argent que leur avait donné un individu pour lui avoir apporté l'eau pour asperger la tombe d'un parent. Le deuxième meurtre a eu lieu le même jour à Mohammédia et il a pour cause une histoire de mœurs. Le troisième homicide de cette première journée concerne un jeune homme qui a mortellement blessé l'un des trois individus qui voulaient le détrousser, juste avant le ftour.
D’après Mohssine Benzakour, psychosociologue, le Ramadan n’est pas la cause de la colère excessive des gens. «Ceux qui s’emportent facilement ont des profils de personnes qui s’énervent rapidement. En effet, ce sont des personnes réactives qui ne prennent pas le temps d’analyser les situations avant d’agir. Le Ramadan ne fait que ressortir ce profil. Ce mois sacré est un mois de spiritualité et de piété. Or les gens qui deviennent agressifs semblent avoir une perception contraire du Ramadan. Ceux qui jeûnent vraiment doivent s’abstenir de juger les personnes agressives lorsqu’elles les croisent et doivent aussi éviter de leur répondre ou les énerver davantage, quitte à les laisser passer dans les files d'attente, non par faiblesse, mais par magnanimité», explique le psychosociologue. Et d’ajouter : «Pour éviter de devenir agressif, il est préconisé, dans une situation de stress, de prendre du recul, de compter jusqu’à 10 avant de parler et de respirer profondément. Il est aussi conseillé de ne pas se focaliser sur la situation qui nous irrite et d’essayer de se concentrer sur autre chose. Ce sont des techniques faciles, mais qu’on oublie de mettre en œuvre au moment voulu. Le shour est très conseillé pour les gens qui ont tendance à s’énerver, en particulier si
on privilégie les dattes».
Dépendance
À l’approche de l’heure de la rupture du jeûne, les signes d’agressivité sont de plus en plus nombreux, surtout dans la rue. D’après les spécialistes, notre instinct de survie serait à l’origine de l’état du «tramdine» causé par la privation ou ce qu’on appelle «l9at3a». En mangeant ou en fumant, des neurotransmetteurs sont libérés. Du coup, l’organisme se sent en danger lorsqu’on s’abstient de prendre de la nourriture ou de fumer. Résultat : on agit sur la défensive et on devient plus agressif et impulsif, car le corps a besoin des matières dont il dépend. Toutefois, cela ne justifie pas tous les écarts de langage ou de comportement, voire les crimes, qui sont commis sous prétexte de «tramdine». «Il est vrai que pendant le Ramadan, les fumeurs souffrent d’un manque de nicotine, mais cela ne justifie aucunement les comportements agressifs et violents. Sinon la “9at3a” n’est pas un phénomène inévitable, cela arrive parce que la personne concernée y croit. Pour faire face à ce genre de situation, la personne doit commencer par arrêter de fumer, il faut aussi qu’elle soit consciente que la cigarette n’a rien à voir avec son état psychologique», affirme Mohssine Benzakour, psychosociologue.