Il faut dire que les Sahraouis tiennent fermement aux traditions ancestrales qu’ils ont héritées de leurs aïeux et dont ils sont très fiers. Car le Sahara regorge d’éléments de cette culture hassanie qui constitue un symbole fort au sein de la diversité culturelle du Royaume du Maroc. C’est une fierté que d’avoir cette richesse sahraouie, acquise grâce à une fusion arabo-amazighe, formant une belle mixité mise en exergue dans toutes les composantes de ce legs ancestral. Les chercheurs et les experts qui s’intéressent de très près à la culture hassanie trouvent sa force dans la capacité des Sahraouis à la diffuser et la sauvegarder, à travers leur passion de communication et d’échange avec l’autre.
Questions à Rahal Boubrik, directeur du Centre des études sahariennes, Université Mohammed V de Rabat
«Il est important de mettre la culture hassanie au cœur de la diversité culturelle de notre pays»
Le Matin : Comment peut-on définir la culture Hassanie ? Qu’est-ce qui la distingue des autres cultures ?Rahal Boubrik : La culture hassanie est une culture composite. Elle s’est formée à travers un brassage ethnique issu d’une longue histoire de rencontres entre des populations subsahariennes, amazighes et arabes. La toponymie, les expressions linguistiques, la musique, les costumes…, bref les éléments de la culture hassanie sont l’expression de ce métissage.
Nous pouvons distinguer cette culture généralement par le dialecte hassani, les costumes des hommes (darâ’a) et des femmes (malhfa), la musique (hawal), un mode de vie à dominance nomade (dans le passé) et d’autres traits culturels. On peut limiter l’espace traditionnel et culturel de cette société au nord par Oued Noun (sud du Maroc), au sud par le fleuve Sénégal, à l’ouest il commence à l’Atlantique et s’étend jusqu’à l’Azawâd et à Arawân vers l’est (Nord du Mali). On peut aussi relever plusieurs variantes de cette culture dans ce vaste territoire.Pensez-vous que cette culture Hassanie a pu être sauvegardée et de quelle manière ?
La culture hassanie était intimement liée à un mode de vie bédouin. Avec la disparation de ce mode qui est le squelette de cette culture, nous observons la disparition progressive des éléments de cette culture. Par exemple, la tente noire n’est plus utilisée dans la vie quotidienne comme d’autres objets, vu la sédentarisation de cette population nomade. Il est donc urgent de sauvegarder cette culture à travers des mesures concrètes et non par l’organisation de moussems et de festivals épisodiques qui la présentent sous un angle purement folklorique.Est-ce que la culture Hassanie trouve sa place au sein de la diversité culturelle marocaine ?
On peut noter, dans ce cadre, que la Constitution de 2011 a consacré les efforts consentis par le Maroc pour la promotion des droits culturels et la reconnaissance de la diversité des composantes et des affluents de l’identité culturelle nationale, dont la culture hassanie. À ce propos, l’article 5 de la Constitution stipule, d’une manière explicite, que l’État œuvre à la préservation du Hassani, en tant que partie intégrante de l’identité culturelle marocaine unie, ainsi qu’à la protection des expressions culturelles et des parlers pratiqués au Maroc. Il est donc important de mettre la culture hassanie au cœur de cette diversité culturelle de notre pays, afin de la sauvegarder et la mettre en exergue. C’est dans ce sens que le projet de loi organique relative au Conseil national des langues et de la culture marocaine prévoit la création d’une institution dédiée à la promotion de la culture hassanie au sein du futur Conseil. Nous espérons que les parlementaires, lors des discussions de ce projet de loi, maintiennent cette institution.