Le Matin : Quelles sont les infections ORL les plus répandues en hiver notamment chez les enfants ?
Adil Benlyazid El Hassani : Que l'on parle de rhume, de rhinite ou de coryza, on parle de la même chose : ce sont trois synonymes pour cette infection hivernale, quasiment incontournable chaque année. Elle est provoquée par une multitude de virus différents (on parle de «rhinovirus») et présente deux caractéristiques fondamentales :
Ce sont des virus très contagieux pendant une période de l’année où nous sommes plus fragiles (froid, humidité, contacts plus étroits en milieu fermé...). Il n’existe pas de traitement spécifique (puisque c’est presque toujours un virus). Il faut notamment savoir que les antibiotiques sont totalement inefficaces sur un rhume dont l’origine est toujours virale.
La grippe vraie est, quant à elle, due au virus de la grippe (Virus Influenza) qui se distingue par un profil évolutif, une gravité potentielle spécifique ainsi qu’une prévention possible par la vaccination.
Dans quels cas ces infections peuvent-elles entraîner des complications plus ou moins graves ?
Si la guérison spontanée, avec ou sans traitement des symptômes, est la règle, certains «terrains» plus vulnérables peuvent cependant voir évoluer ce simple rhume en problème plus sérieux... En effet, un rhume peut se surinfecter : des bactéries viennent coloniser les fosses nasales et peuvent s’étendre à d’autres endroits des voies respiratoires.
La communication anatomique entre les différentes zones des voies aériennes supérieures favorise la dissémination des germes. C’est en fait la principale menace qui guette un rhume négligé. L’extension peut toucher les sinus et occasionner une sinusite ou remonter à l’oreille moyenne et provoquer une otite.
Le rhume peut fréquemment aussi descendre vers la gorge (le pharynx) et générer une rhinopharyngite, voire plus bas atteindre le larynx et les cordes vocales par une laryngite, nous réduisant au silence pour quelques jours... Enfin, les bronches peuvent, elles aussi, être touchées : c’est la bronchite aiguë. Par exemple, chez l’enfant, les défenses ne sont pas encore totalement renforcées ; ils sont donc très exposés aux virus et un simple rhume pourra aboutir rapidement à une otite ou une angine. La personne âgée est elle aussi plus vulnérable : un refroidissement au départ banal peut traîner en longueur et mal répondre au traitement des symptômes (douleur, fièvre...). De plus, les seniors sont plus fréquemment porteurs de maladies chroniques (cardiaque, pulmonaire...) qui peuvent s’aggraver lors d’un épisode infectieux.
Y-a-t-il plus de résistances aux germes qu'auparavant ou une stabilité de l'incidence des pathologies ORL ?
La question de la résistance des germes aux antibiotiques ne s’applique qu’aux bactéries puisqu’il n’y a pas de traitement spécifique aux virus. L’usage anarchique et généralisé des antibiotiques dans notre société provoque, en effet, des mutations au niveau des souches bactériennes avec l’émergence de résistances qui posent parfois de sérieux problèmes de traitement. L’usage des antibiotiques ne doit jamais être fait en première intention (car la majorité des infections hivernales sont virales au moins au début) et uniquement en cas de surinfection bactérienne suspectée par le médecin traitant. La prise d’antibiotique en cas d’infection n’a aucune influence sur la guérison, en plus de pouvoir donner des effets secondaires, elle peut accroître le risque de mutations à l’origine des résistances.
Quel est le rôle des parents pour diminuer les infections ORL ? Quand est-il de l'éviction scolaire ?
En première ligne, le nez constitue une porte d’entrée évidente pour les virus ou les bactéries. Lorsque l’on ressent les premiers symptômes de rhume je préconise de réaliser d’abondants lavages des cavités nasales au sérum physiologique hypertonique pour diminuer la quantité de virus présents et de décongestionner le nez. En effet, la congestion nasale est souvent le premier stade qui permet l’infestation virale à plus grande échelle. Plus le traitement est précoce, plus le rhume va pouvoir être contenu facilement.
L’éviction scolaire ne doit être envisagée que si l’enfant est dans un état général altéré. En aucun cas, elle ne peut être
un moyen de prévention du rhume.
Comment limiter les risques ?
En pratique, une personne malade, qui éternue ou tousse, expulse et transmet inévitablement ses microbes à ses plus proches voisins… mais les germes peuvent également se transmettre par contact direct (toucher une personne) ou indirect (toucher un objet, une poignée…).
Ainsi, échapper à toute contamination pendant l’hiver se révèle très difficile !
Le froid extérieur agit lui aussi, mais de façon indirecte en mobilisant les ressources de l’organisme et en l’obligeant ainsi à augmenter son métabolisme pour maintenir la température corporelle. En asséchant les muqueuses des voies respiratoires, le froid les rend par ailleurs plus vulnérables aux agressions et à l'installation de ces infections hivernales.
En hiver, nous devons lutter contre le froid. Le froid diminue les défenses naturelles, qu’on appelle l’immunité. Le corps, devant maintenir une température constante autour de 37 °C, doit mobiliser de nombreux composants, comme les nutriments, les vitamines, les enzymes…
Pour mener à bien cette fonction vitale, une grande partie de ces composants sont réquisitionnés, et seulement une petite partie est disponible pour les fonctions immunitaires. La diminution des défenses naturelles, c’est tout d’abord une question de forme générale et d’hygiène de vie. Pour conserver notre tonus et préserver notre capital santé, il est nécessaire de faire de la prévention en boostant nos défenses immunitaires ! Les rhumes et autres petits virus ne durent jamais bien longtemps… Il faut laisser faire la nature !