Nombre de personnes rechignent à l'idée d'approcher une benne à ordures et se hâtent de se boucher le nez quand elles croisent un amas de déchets sur leur passage. Les chiffonniers, eux, font fi de telles délicatesses. Ils s'aventurent au quotidien dans des poubelles d'où coule le lixiviat, dégageant des odeurs nauséabondes au risque de se faire mal par des objets tranchants.
«Le développement des filières ne sera faisable que s’il préserve l’équilibre social. Il ne peut ignorer le secteur informel qui est déjà très actif dans le domaine du tri et du recyclage», estime Mehdi Chalabi, ajoutant que les études antérieures font état de plus de 7.000 personnes (chiffonniers) qui opèrent dans le secteur informel. En ce qui concerne la prise en charge de ce secteur informel, le responsable a jugé nécessaire d’intégrer les récupérateurs de déchets dans l’économie du recyclage et d’améliorer les conditions sanitaires, environnementales et économiques de leurs activités. On ne peut évoquer le passage de l’informel au formel en matière de tri et de valorisation des déchets sans citer l’exemple éloquent de la décharge d’Oum Azza près de Rabat, exploitée par le groupe français Pizzorno Environnement à travers la coopérative Attawafoq, qui a marqué un tournant décisif dans le traitement des déchets. «Nous avons commencé l'accompagnement de la coopérative en 2008, en travaillant sur la structuration, le recensement, la formation et l’accompagnement des chiffonniers, qui sont actuellement au nombre de 160 ouvriers-trieurs, ainsi que sur la détermination des circuits de vente», a déclaré à la MAP Nisrine Bouchefaa, responsable projets valorisation de Pizzorno Environnement à Rabat. Il a fallu deux ans de travail préparatoire pour aboutir à la création officielle de la coopérative Attawafoq en janvier 2010, a-t-elle précisé, faisant savoir que les chiffonniers, dont le travail «consiste à faire le tri au niveau de la cabine du tri, à récupérer les matériaux triés, les stocker et les vendre», ont bénéficié d’une formation d’initiation au contact avec les machines. Selon Mehdi Chalabi, le cas d’Oum Azza est un exemple à suivre en matière de valorisation et de traitement des déchets, vu qu’il a pu atteindre ses objectifs en améliorant la situation des chiffonniers qui ont désormais un revenu stable et jouissent d’un statut digne. Le centre d’enfouissement d’Oum Azza, qui n’avait qu’une seule ligne de tri avec deux cabines, dispose depuis octobre 2016 d’une deuxième ligne de tri qui va permettre de traiter en totalité 1.100 tonnes de déchets, s’est réjouie Nisrine Bouchefaa.
