Connexion
Le Matin : Après 17 matchs disputés dans ce CHAN 2018, quel bilan sportif faites-vous de cette édition par rapport aux précédentes
versions ?
Frank Simon : Pour le bilan sportif, je suis un petit peu mitigé parce que j’ai vu une équipe qui, pour moi, semble être vraiment très loin des autres à savoir l’équipe du Maroc de Jamal Sellami. Je la trouve bien en avance sur toutes les autres et elle est bien partie pour faire partie du dernier carré. C’est un tournoi à plusieurs vitesses. On voit bien qu’il y a des équipes qui ne se sont pas bien préparées, notamment les équipes francophones comme la Guinée, la Côte d’Ivoire et le Cameroun. On a eu une belle surprise avec le Congo Brazzaville. Je suis content aussi de voir le football soudanais que j’apprécie infiniment. J’ai beaucoup de tendresse pour le football libyen. J’ai un ami là-bas qui entraîne à Tripoli (Diego Garzitto) qui a entraîné un peu le Wydad de Casablanca. J’ai vu un tournoi à plusieurs vitesses dominé par le Maroc. Mais maintenant, c’est la phase des matchs couperets qui va commencer. On sait que ça sera compliqué à partir des quarts de finale. Il faudra que le Maroc assume ce statut de favori. Pour le reste, je suis déçu de l’affluence dans les stades, mais ce n’est pas la faute au Maroc, c’est un fait dans toutes les CAN ou CHAN. Quand l’équipe qui accueille la compétition est qualifiée, il y a du monde, mais pour les autres matchs, c’est un peu moins. Il y avait du monde à Tanger et c’est tant mieux. J’ai vu une animation. J’ai entendu la musique espagnole. J’ai senti que le public de Tanger aime le football africain. En revanche, à Agadir et Marrakech, je n’en ai pas été convaincu. Il faut que le public vienne. Peut-être faudrait-il que la Fédération Royale marocaine fasse un maximum de communication. Que les gens viennent aux stades voir les équipes africaines parce que c’est ça encourager le football africain. Il faut que le public marocain montre sa passion pour le football. Si vous voulez organiser des événements plus importants que le CHAN, à savoir la Coupe d’Afrique des nations et peut-être la Coupe du monde dans quelques années puisque c’est ce que vous souhaitez, eh bien, il faut montrer que vous vous intéressez aux autres matchs que ceux qui concernent le pays. C’est bien d’aimer son pays et ses clubs, mais il faut venir aussi voir les autres parce qu’il y a du talent. La Botola recèle beaucoup de joueurs africains qui peuvent peut-être venir de ces équipes présentes actuellement au CHAN. Donc, je souhaite que le public marocain vienne plus nombreux pour que ça soit une vraie fête pas seulement sur le terrain, mais aussi dans les tribunes.
Vous donnez le Maroc grand favori de ce tournoi, alors qu’il vient d’être tenu en échec par le Soudan ?
C’est le grand prétendant au titre. On le savait même avant le début du tournoi. Il avait éliminé une équipe qui avait les moyens d’aller faire quelque chose qui était l’Égypte.
Quelle lecture faites-vous donc de ce résultat ?
Il y a des circonstances qui expliquent ce match nul. Il y avait dix joueurs sur onze qui avaient été renouvelés par Jamal Sellami pour protéger les titulaires. Il y avait une équipe du Soudan redoutable, sérieuse, disciplinée et sobre. Il y a un grand match du gardien adverse. Ça s’est joué en peu de choses. Le Maroc aura mérité de gagner ce soir (NDLR, dimanche). Pour moi, l’équipe du Maroc qui a éliminé l’Égypte au tour préliminaire est de facto doublement favorite parce qu’elle joue devant son public et parce qu’elle recèle de grands talents. Tous les entraîneurs s’accordent à le dire. Vous avez le Championnat dont est issu le dernier club champion d’Afrique, le Wydad, même si aujourd’hui, il va mal en Botola. Il a remplacé son entraîneur Ammouta par le Tunisien Benzarti. Il n’empêche qu’il y a de grands talents présents dans cette équipe du Maroc. C’est une équipe jeune. Ce n’est pas un hasard si, tout en haut de la tribune, il y a Hervé Renard pour envoyer ses ondes positives à cette équipe. Je trouve que l’équipe du Maroc doit assumer son statut sans complexes. Elle joue un très beau football. J’ai découvert un joueur dont m’avait parlé en juillet dernier Rachid Taoussi, qui était à l’époque l’entraîneur de la Renaissance de Berkane. Ce joueur est Ayoub El Kaabi. Je découvre aujourd’hui que la cellule de recrutement de Berkane avait raison de le prendre. Bien sûr qu’il y avait le président Fouzi Lekjaa qui était derrière aussi parce qu’il y avait le Wydad et le Raja qui s’intéressaient à lui. Ce garçon est aujourd’hui titulaire devant un joueur comme Bencharki qui aurait pu prétendre à ce poste. On doit dire bravo à Jamal Sellami de donner cette confiance à tous ses jeunes joueurs. J’espère qu’ils ne trembleront pas et qu’ils iront au bout parce que pour moi c’est l’équipe la plus intéressante, qui joue le mieux, mais encore une fois on est dans des matchs de coupes et ça sera compliqué.
