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Feu Mohamed Chabâa, le militant pour l’art et la culture

Dans le cadre de son projet, entamé depuis quelques années, consistant à rendre hommage aux célèbres icônes des arts plastiques, l’Espace Expressions CDG porte son choix, cette fois-ci, sur feu Mohamed Chabâa. Et ce, à travers une exposition rétrospective-hommage qui se poursuivra jusqu’au 24 mars prochain.

Feu Mohamed Chabâa, le militant  pour l’art et la culture
L’exposition nous montre des travaux qui n’ont jamais été vus par le grand public.

L’exposition rétrospective-hommage «Chabâa, liberté de l'être, création plurielle» constitue l’une des plus grandes prestations réalisées par l’Espace Expressions CDG. Car elle ne représente pas uniquement un événement pictural de feu Mohamed Chabâa, mais toute une tranche de vie pleine d’innovations et de réflexions d’un avant-gardiste, dont l'héritage pictural et intellectuel témoigne bien de cela. Pour couronner cette initiative et lui donner plus d’ampleur, la Fondation CDG, en la personne de sa directrice générale, Dina Naciri, a organisé, samedi dernier, une table ronde réunissant des artistes, des critiques et tous ceux qui ont connu de très près le défunt Chabâa. Celui-ci, selon le peintre et critique Benyounes Amirouche, a mené une expérience leader et très riche dans l’univers plastique. «D’ailleurs, l’exposition nous montre des travaux que  beaucoup de personnes n'ont jamais vus», souligne Amirouche qui n’a pas manqué de préciser, dans sa présentation de l’artiste, que feu Chabâa a toujours fait allusion à la coupure qu’il y a eu avec le patrimoine et traditions marocains dans les arts plastiques. Sans oublier, comme cela a été rapporté dans le témoignage de Melihi, son enthousiasme et son dynamisme vis-à-vis d’un engagement sur le plan pédagogique et intellectuel.

Plusieurs intervenants ont participé à l’animation de cette table ronde, notamment l’écrivain et critique d’art Moulim Laâroussi qui voyait en feu Chabâa quelqu’un qui voulait décoloniser l’œil du Marocain. «Pour lui, l’art devait avoir un sens. En compagnie de ses collègues, ils cherchaient à reprendre le traditionnel et l’incruster dans le modernisme. C’est là où il a essayé d’initier des collectifs en animant des conférences. Comme il a collaboré avec des architectes et des responsables d’artisanat pour apporter un nouveau souffle à l’artisanat marocain», indique M. Laâroussi. Par ailleurs, la femme de culture Tania Chorfi, qui a travaillé pendant 27 ans à la Fondation ONA, a eu l’occasion de côtoyer de très près feu Mohamed Chabâa et a toujours eu pour lui beaucoup d’estime. «C’était un immense militant pour l’art et la culture qui voulait mettre en valeur notre patrimoine culturel. Cela lui tenait beaucoup à cœur. Car l’identité était quelque chose de sacré pour lui. Il voulait que l’art marocain garde son authenticité, tout en s’ouvrant sur l’international. Avoir des spécificités et des caractéristiques qui nous sont propres était sa lutte quotidienne. Quand il était professeur à l’École des beaux-arts à Casablanca, son souci a été d’inculquer ces valeurs à ses élèves. Sachant qu’à l’époque il y avait des Français à l’école qui encourageaient la peinture naïve. Mais lui voulait arrêter cela, pour montrer ce qu’on est vraiment, à travers notre patrimoine, même si on emprunte la technique occidentale», témoigne Tania qui a aussi loué ses qualités de grand humaniste extrêmement engagé qui avait des valeurs 
exceptionnelles.

Un autre ami intime de Chabâa, l’architecte Mohamed Hamdouni Alami, garde aussi de très bons souvenirs du défunt, avec lequel il a travaillé pendant un certain temps. «Il avait beaucoup d’ambitions. Il estimait décoloniser la culture marocaine de l’impérialisme culturel occidental. Il était contre cette prétendue universalité des valeurs culturelles. C’était un avant-gardiste, très sensible et déterminé dans ses démarches. Il a mené une lutte durant toute sa vie, à travers son engagement profond pour la décolonisation culturelle et sa libération des carcans culturels traditionnels. C’était la seule manière pour lui de concevoir le développement du potentiel créatif. Et ce, dans une relation presque organique avec les intellectuels. Il ne se voyait pas comme un artiste isolé qui fait son art pour le présenter. Il était, également, un penseur. Ce qui est assez rare chez les artistes marocains. Il ne se voyait pas en dehors d’un engagement pour sortir ses concitoyens de ces deux formes de domination et de léthargie, en plus de son côté humain fidèle à l’amitié, qui aimait la vie et voyait dans la réflexion et le travail le seul moyen de s’exprimer et s’épanouir. Comme il était le contraire de beaucoup de stéréotypes. Il osait dire les choses telles quelles sont, pas dans le but de déranger, mais par amitié. C’est ce qu’on peut appeler de l’honnêteté intellectuelle», précise Hamdouni Alami.

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