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Avoir des idées c’est bien, les concrétiser c’est encore mieux

La réussite n'est pas uniquement une question d'idées attractives, mais aussi et surtout une discipline d'aller au bout de ces dernières.

Avoir des idées c’est bien, les concrétiser c’est encore mieux

Au fil des années, on découvre des idées et on s’enrichit à travers celles des autres. Certaines idées sont banales et d’autres peuvent être exceptionnelles, surprenantes, ou tout simplement intéressantes à transformer en opportunités à saisir. La course aux idées du siècle devient une philosophie incontournable de réussite. Dans cette course, nous passons malheureusement très souvent à côté de l’essentiel. Avoir des idées c’est bien, mais avoir des réalisations, c’est encore mieux. La question à se poser est la suivante : Consacrons-nous plus d’attention à fabriquer des idées exceptionnelles au lieu de dédier notre énergie à murir, tester, et améliorer des idées existantes ? Certainement et malheureusement oui.
Dans différentes organisations, la course aux idées créatives est une priorité. Ceci est bien entendu très positif et personne n’osera dire le contraire. Le problème est que nous restons souvent dans la génération des idées créatives et nous ne prêtons que peu d’attention à la discipline d’aller au bout de ces dernières. La discipline est à prendre dans le sens de persévérance, mais aussi dans le sens de prêter une attention plus importante à l’exécution des idées. L’exécution et la discipline autour sont les vraies clés de réussite beaucoup plus que l’originalité des idées derrière. Beaucoup de cadres arrivent à un niveau de leur carrière en disant qu’ils ont beaucoup d’idées et qu’ils n’arrivent pas à les réaliser pour des raisons assez récurrentes chez tout le monde : un marché inadéquat, une demande inadaptée, ou une réglementation qui n’est pas encore prête. Ceci est partiellement vrai, mais il y a aussi une raison fondamentale : nos lacunes en termes de capacité d’exécution et le manque d’une discipline d’aller au bout des idées. Vous pouvez remarquer ce constat dans plusieurs situations professionnelles et non uniquement dans les domaines de la créativité et d’entrepreneuriat/intrapreneuriat. Pour reprendre une expression qui circule souvent dans les entreprises : Certains cadres ou consultants sont très forts dans les PowerPoint, mais restent très limités quand il s’agit de livrer du concret. Nous avons, en effet, souvent l’impression que nous sommes plus entourés de personnes qui excellent l’art de la proposition, mais qui sont tout à fait absents dans la pénible épreuve de la réalisation et du déploiement.
Le confort et la noblesse de la force de proposition n’ont rien à voir avec les aléas de l’exécution. Ce qui est sûr est que proposer à autrui des idées, et les vendre en tant qu’idées du siècle est moins pénible que d’aller au bout de la réalisation ou d’accompagner cette dernière avec l’énergie d’assurer qu’elle réussisse convenablement. Et même en cas d’échec, la réussite résidera dans l’apprentissage et la capitalisation sur un savoir-faire à travers l’expérience et l’échec lui-même pour mieux bâtir des réalisations les prochaines fois. Les lacunes relatives à l’exécution sont perceptibles partout dans les environnements organisationnels. Elles donnent vie à des cultures consuméristes en idées et faibles en réalisations. Ces cultures adorent les shows, les conventions de cadres, et les effets d’annonces, mais baignent dans les inefficacités et se laissent surprendre, quand c’est trop tard, par des concurrents beaucoup plus futés. La question est plus complexe que ce constat de simplicité de la conception et de difficulté du terrain. En effet, une des maladies qui enveniment et mettent constamment en danger les organisations est une conception particulière de la hiérarchie et du pouvoir. Il s’agit de consacrer la responsabilité de concevoir, de réfléchir et d’analyser au niveau des managers, et de dédier celle de réaliser aux collaborateurs. Cette séparation du pouvoir de concevoir/penser et de celui de réaliser ne proviennent pas uniquement des conceptions industrielles du management, mais plus de schémas très anciens relatifs aux classes sociales. Le malheur et le malaise dans certains environnements organisationnels est qu’il y a «plus de généraux que de soldats» une expression très récurrente et très significative que j’ai pu dernièrement relever dans une série d’interviews qualitatifs que j’ai eu l’occasion de réaliser dans le cadre d’un diagnostic stratégique de la relation d’une multinationale avec ses parties prenantes dans 7 pays. 
Encourager le mode «delivery/exécution» n’est pas garanti par une refonte de la conception du pouvoir et de la hiérarchie, il s’agit surtout d’une vraie volonté managériale d’instaurer une culture pro-delivery à travers l’expérimentation, l’autonomie de la prise de décision, la responsabilisation, et la capitalisation sur les échecs. Cette culture devrait aussi être renforcée par une communication efficace et fédératrice des efforts et des quick-wins ainsi qu’un accompagnement des managers et des collaborateurs autour du savoir-agir au lieu de se focaliser sur le savoir-être et le savoir-faire.  * Farid Yandouz est Change & Management Advisor

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