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Ce que recommande la Cour des comptes pour mieux cerner la situation réelle des comptes publics

Le rapport de la Cour des comptes sur l’exécution du Budget 2016 est tombé. Le document pointe plusieurs incohérences, dont les informations incomplètes communiquées par le département des Finances sur les finances publiques. La Cour relève que le montant du déficit budgétaire communiqué par le ministère n’intègre pas toutes les dettes de l’État, notamment celles dues aux entreprises en termes du crédit de TVA et d’Impôt sur les sociétés.

Ce que recommande la Cour des comptes pour mieux cerner  la situation réelle des comptes publics
La Cour des comptes fait remarquer que la dispersion de l’effort de l’État entre différents supports risque de créer un démantèlement budgétaire non toujours justifié.

C’est fait. Comme prévu par la loi organique des Finances, en vigueur depuis juin 2015, la Cour des comptes a publié son premier rapport préliminaire sur l’exécution du Budget 2016. Parmi ses conclusions : la nécessité d’améliorer la qualité des informations communiquées à l’occasion de la publication des résultats de l’exécution de la loi des Finances. Concrètement, les sages de la Juridiction financière du Royaume constatent que le montant du déficit budgétaire communiqué par le département des Finances, arrêté à 40,6 milliards de dirhams en 2016, n’intègre pas toutes les dettes de l’État se rapportant à cet exercice, notamment celles dues aux entreprises en termes du crédit de TVA et d’Impôt sur les sociétés (IS). En effet, relève la Cour, les recettes de TVA sont considérées comme définitivement acquises alors que le Trésor sera appelé à en restituer une partie aux entreprises créditrices. Exemple : le stock du crédit de TVA des entreprises et établissements publics (EEP) a augmenté en 2016 de 1,3 milliard de dirhams pour atteindre un total cumulé de 28,6 milliards. En outre, les dettes de l’État vis-à-vis de certains EEP, autres que celles liées au crédit de TVA, totalisent à fin 2016 un montant de 5,5 milliards de dirhams. Ce chiffre concerne six grandes entreprises publiques : le groupe OCP, Autoroutes du Maroc (ADM), l’ONEE  (Office national de l’électricité et de l'eau potable), l’ONCF (Office national des chemins de fer), l’ONDA (Office national des aéroports) et RAM (Royal Air Maroc).

Ces dettes se rapportent au crédit d’IS, aux engagements pris par l’État dans le cadre des contrats-programmes et à des prestations à caractère commercial. Par ailleurs, soulignent les magistrats de la Cour, la présentation des réalisations budgétaires fait état des recettes fiscales en montants nets, après déduction des transferts faits aux collectivités territoriales sur le produit de la taxe sur la valeur ajoutée, de l’IS et de l’impôt sur le revenu. Or, cette présentation ne permet pas de renseigner sur le poids réel de la fiscalité. Autre incohérence : les contributions de l’État en tant qu’employeur cotisant aux régimes de prévoyance et de couverture sociale ne sont pas intégrées dans les dépenses du personnel. Résultat : cette situation ne permet pas d’appréhender le poids réel de ces charges. Par ailleurs, les charges du personnel sont imputées sur les budgets des ministères, le chapitre charges communes et certains comptes spéciaux du Trésor. À ces rubriques, s’ajoutent les charges de personnel des établissements publics à caractère administratif dépendant des subventions de l’État. Selon la Cour, pour pouvoir appréhender le poids réel de la masse salariale sur le budget de l’État, un retraitement de certaines données et la communication d’informations complémentaires s’avère nécessaire. En effet, limité aux charges inscrites au titre fonctionnement du budget général de l’État, le total des dépenses du personnel de 104,3 milliards de dirhams pèse pour 56% du budget de fonctionnement et 11% du PIB. Or, après retraitement des charges de personnel, en y ajoutant les contributions de l’État aux régimes de retraite et aux mutuelles et les subventions de fonctionnement allouées aux établissements publics administratifs, destinées à couvrir les salaires de leurs agents et salariés, le poids de ces dépenses enregistre des niveaux bien supérieurs. Il culmine, en effet, à 64,3% du budget de fonctionnement et 12,7% du PIB. Sur le chapitre dépenses d’investissement, la Juridiction financière indique que l’effort d’investissement consenti par la loi de Finances est porté principalement par le budget général de l’État, les comptes spéciaux du Trésor et accessoirement les Services de l’État gérés de manière autonome (SEGMA). Dans le budget général, les crédits d’investissement sont imputés aux budgets des ministères et au chapitre charges communes-investissement. En outre, la classification budgétaire de certaines dépenses comme faisant partie des dépenses d’investissement, telles que les acquisitions liées au fonctionnement normal des services de l’administration, amplifie les réalisations en la matière d’autant plus que ces dépenses ne contribuent pas nécessairement à la formation brute du capital fixe. La Cour fait également remarquer que la dispersion de l’effort de l’État entre différents supports risque de créer un démantèlement budgétaire non toujours justifié. Explication : des opérations de même nature ou de nature proche sont imputées indifféremment sur différents supports budgétaires (chapitre investissement des ministères, chapitre charges commues-investissement, comptes spéciaux du Trésor et accessoirement les SEGMA). L’imputation d’une partie importante des dépenses d’investissement sur le chapitre des charges communes, au lieu de transiter par les budgets des ministères sectoriels concernés, risque, d’après les magistrats de Driss Jettou, de ne pas permettre d’apprécier à sa juste valeur l’ampleur de l’effort consenti par les différents intervenants dans l’action publique pour la réalisation de leurs politiques sectorielles. Pis, elle pourrait même limiter le pouvoir d’impulsion de certains ministères sectoriels, voire nuire à l’efficacité et au rythme d’exécution de certains projets. Ceci est surtout valable pour les transferts consentis aux EEP au titre des augmentations de capital, des subventions d’investissement ou d’engagements pris dans le cadre de contrats-programmes.


Le ministère doit améliorer sa communication 

La Cour des comptes a formulé plusieurs recommandations au ministère de l’Économie. Il s’agit notamment d’améliorer les communications se rapportant aux finances publiques, en publiant les informations complémentaires permettant de mieux cerner la situation réelle des comptes publics en termes de recettes, de dépenses et d’engagements. Dans ce sens, il convient de faire ressortir au niveau des ressources, les recettes fiscales brutes et les données sur les restes à recouvrer, et au niveau des dépenses, la part des recettes fiscales transférée aux collectivités territoriales, les dépenses exceptionnelles et les arriérés de paiement. La Cour recommande également d’intégrer dans les états d’exécution du budget et dans les informations complémentaires qui l’accompagnent, toutes les dépenses se rapportant aux charges de personnel, notamment les cotisations patronales aux régimes de retraite et de prévoyance, les primes et indemnités transitant par les CST et les SEGMA ainsi que les dépenses du personnel des établissements publics administratifs couvertes par les subventions de l’État.

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