Menu
Search
Samedi 27 Avril 2024
S'abonner
close
Samedi 27 Avril 2024
Menu
Search
Accueil next Culture

La sauvegarde des musiques dans le monde de l'Islam en débat

Plusieurs musicologues et chercheurs de différents pays ont présenté les 5 et 6 juillet les différentes expériences menées dans plusieurs pays pour sauvegarder les traditions musicales.

Comment préserver le patrimoine musical du monde islamique ? Telle est la principale question discutée les 5 et 6 juin au congrès international de sauvegarde et transmission des musiques dans le monde de l'Islam organisé à Assilah. Des ethno-musicologues, des chercheurs et des musiciens invités par le 40e Moussem culturel d'Assilah ont présenté différentes expériences menées dans plusieurs pays pour sauvegarder les traditions musicales. On a ainsi cité la Fondation Amar (Arab Music Archiving and Research) au Liban qui a pour objectif de conserver et de diffuser la musique arabe classique, des débuts de l’enregistrement à la fin XIXe siècle au début des années 1930. La Fondation dispose d'environ 6.500 disques, ainsi que de milliers d’heures d’enregistrement sur bobine et des cylindres de cire. Elle a aussi lancé la Radio podcast Rawdat Al-Balabil qui diffusait des émissions de l'héritage musical produites par l’Égyptien Mustafa Said, musicologue, musicien et directeur d'Amar. Les archives sonores de l'Université de Kaslik au Liban préservent aussi un important héritage du monde musulman. De même pour la Photothèque nationale de Tunisie qui dispose de 3.000 pièces et le Centre du patrimoine musical du Yémen qui fonctionne malgré la guerre grâce à sa page Facebook. «Tous ces centres nous apportent des outils permettant de construire une mémoire pour les générations à venir», souligne Jean Lambert, ethno-musicologue, maître de conférences (HdR) au Muséum national d'histoire naturelle et directeur de la collection «Hommes et Musiques» à Paris. Et d'ajouter que grâce au numérique et recherches scientifiques, on peut reconstituer le patrimoine musical de groupes qui ont éclaté et dépasser les problèmes des frontières. Dans le même veine, Mustafa Said a montré à la présence le potentiel de recherche avec des musicologues pointus pour restituer les vrais tempos. Pour sa part, Anas Ghrab, maître-assistant à l'Institut de musique de Sousse, a souligné que pour apporter de nouveaux résultats à ce domaine, on doit prendre en considération la relation entre les chercheurs et les machines. Et de préciser que dans le monde arabe, on est toujours confronté aux problèmes de partage des données. En effet, certains centres de recherche et propriétaires de collections musicales restent méfiants à l'égard du partage public de leurs enregistrements. Malgré les multiples tentatives menées pour sauvegarder les musiques dans le monde de l'Islam, la préservation de ce patrimoine immatériel reste compliquée. Scheherazade Hassan, ethno-musicologue et chercheuse d'origine irakienne, a attiré l'attention sur les enregistrements qui sont encore dans des collections privées ou sur les marchés. En effet, plusieurs héritiers de grands artistes et collectionneurs mettent en vente des collections rares, le résultat de plusieurs années de recherche et de passion. Ils les cèdent à celui qui paie plus sans considérer la valeur de ces collections qui préservent l'identité culturelle. Scheherazade Hassan a aussi soulevé la problématique des collections et archives détruites pendant les guerres comme c'est le cas en Irak et au Yémen. Selon cette chercheuse qui collabore avec l'Unesco pour sauvegarder le patrimoine musical, certains pays n'accordent pas une grande importance à ce volet. Et de fait, ils n'apportent aucune aide aux chercheurs. La seconde journée du colloque a été dédiée aux problématiques de la pratique et de la création musicale en situation de migration et d’exil. Ces processus se sont largement amplifiés ces vingt dernières années, en conséquence de bouleversements politiques et économiques, mais aussi en lien avec des volontés artistiques de découverte et de partage initiées en Orient comme en Occident, au Nord comme au Sud. Les participants au congrès ont souligné qu'il n'y a pas de frontières pour la musique. Les artistes s'adaptent aux nouvelles situations et créent une sorte de fusion ou de complicité avec d'autres cultures pour diffuser leur musique. Néanmoins plusieurs traditions musicales sont à préserver pour éviter qu'elles ne disparaissent à force d'y ajouter les rythmes modernes. 

Lisez nos e-Papers