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Vivement un statut juridique pour les médecins du sport

La médecine du sport est une spécialité aux nombreuses facettes, pouvant s’adresser à des sportifs de tous les niveaux, aux problèmes et attentes très variés. Le sportif de compétition aura régulièrement recours à la médecine du sport en raison de sa charge d’entraînement élevée et des accidents sportifs dont il peut être victime. Autrement dit, c’est une médecine indispensable pour la pratique du sport de haut niveau et même amateur. À quelques semaines du coup d’envoi de la saison sportive, le «Matin» s’est penché sur cette catégorie de praticiens très proches des sportifs pour se poser plusieurs questions : combien sont-ils au Maroc ? Dans quelles conditions exercent-ils ? Quel est leur statut juridique ? Combien sont-ils payés ? Sont-ils assurés ?...

Vivement un statut juridique pour les médecins du sport

À en croire Dr Abdelhamid Khadri, secrétaire général de l’Association marocaine de médecine du sport (AMMAS), il existe 1.172 médecins du sports au Maroc. Un chiffre que conteste Dr Mohamed Atik, ancien médecin du Raja de Casablanca qui trouve ce chiffre très exagéré. Pourquoi ? Parce qu’il considère que les fonctionnaires du ministère de la Santé ne devraient pas être considérés comme médecins du sport : «Un médecin de santé publique n’a pas le droit d’exercer à titre privé, à moins qu’il obtienne un détachement. Et dans ce cas de figure, il ne doit toucher qu'un seul salaire. Et un médecin de santé de publique n’a pas le droit de quitter son centre de santé ou son hôpital pour s’occuper à temps plein d’un club ou d’une fédération. Il y a un choix à faire», a-t-il précisé. Et de poursuivre que la majorité de ces médecins n’ont jamais pratiqué la médecine du sport et qu’ils ont fait juste la spécialité pour monter dans l’échelon et gagner plus d’argent. Quand on sait que 72% des médecins du sport sont des fonctionnaires du ministère de la Santé, dixit Dr Khadri, le chiffre de 1.172 médecins du sport est à prendre avec beaucoup de précautions.

Les clubs et les fédérations ne jouent pas le jeu
Reste la question de savoir si lesdits fonctionnaires doivent être considérés des médecins du sport ou pas. Pour l’Association marocaine de médecine du sport, il s’agit bel et bien de médecins du sport qui ont un statut de fonctionnaire. Au-delà de cette bataille des chiffres, ce qui retient l’attention est le fait que tous ces praticiens n’ont pas de statut juridique propre. Eh oui ! cela peut paraître insensé, mais c’est le cas. Au Maroc, il n’y a pas de texte juridique qui définit ce qu’est le médecin du sport ou la nature de son contrat avec un club ou une fédération. Ce vide juridique fait dire au Dr Khadri que «la majorité des médecins du sport travaillent dans un no man’s land. Ils sont là, ils travaillent, mais en cas de problème, ils sont abandonnés à eux-mêmes et n’ont aucun recours», a-t-il expliqué. Un avis partagé par Dr Atik qui assure que les responsables du sport au Maroc considèrent le médecin du sport comme quelqu’un sans importance. Alors qu’il est présent dans la vie du groupe ou de l’équipe à tous les niveaux : prévention, nutrition, accompagnement, soins, rééducation… Dr Khadri va encore plus loin en assurant que le dernier souci du président d’un club ou d'une fédération est d’engager un médecin : «Le président d’une fédération se donne beaucoup de mal pour trouver un entraîneur qu’il paye au prix fort, mais il ne lui viendra jamais à l’esprit l’idée d’engager un médecin. Et même quand il l’engage, il lui donne une misère. Je ne dis pas que tout se réduit à l’argent, mais quand on donne une rémunération à quelqu'un, elle doit être correcte. Je sais qu’il y a des entraîneurs qui ont des salaires de ministre. Nous ne voulons pas de salaire de ministre. Nous voulons quelque chose qui soit honorable pour le médecin. Et ça, on ne l’a pas encore. Le statut de médecin du sport doit être reconnu. Et c’est pour cela que nous militons. Sa situation matérielle et morale doit être rehaussée pour qu'il puisse donner le maximum de lui-même». 

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Entretien avec Dr Abdelhamid Khadri, secrétaire général de l'AMMAS

La majorité des médecins du sport travaillent dans un no man’s land

Le Matin : Vous avez organisé récemment une journée de réflexion et de concertation visant à établir une stratégie de promotion de la médecine du sport dans le Royaume, mais est-ce que le médecin du sport dispose déjà d’un statut lui permettant d’exercer dans des conditions adéquates ?
Abdelhamid Khadri :
Non. Le médecin du sport n’a pas de statut. Il n’y a pas de texte juridique qui définit ce qu’est le médecin du sport ou la nature de son contrat avec un club ou une fédération. Normalement, quand un médecin travaille avec un club, il doit avoir obligatoirement deux choses : un contrat et une assurance de responsabilité civile. Ce n’est pas le cas au Maroc. La majorité des médecins du sport travaillent dans un no man’s land. Ils sont là, ils travaillent, mais en cas de problème, ils sont dos au mur. Ils n’ont aucun recours. Pour ce qui est du statut du médecin, il faut qu’il y ait un contrat type et une assurance professionnelle annexée au contrat type. Et c’est sur la base de ces deux choses-là que l’on peut dire que le médecin a un statut au sein d’un club ou d’une fédération. Pourtant, nous avons 1.172 médecins du sport au Maroc.

Vous me dites qu’il y a 1.172 médecins du sport au Maroc qui exercent sans avoir un statut, c’est quand même un peu bizarre ?
Non, ce n’est pas bizarre parce que 72% de ces personnes sont des fonctionnaires du ministère de la Santé et le reste est dans le secteur privé. Ils n’ont pas de statut en tant que médecins du sport, mais ils ont un statut dans la fonction publique ou dans le secteur privé. Ces gens-là sont soit fonctionnaires du ministère de la Santé et, de ce fait, ils perçoivent une indemnité de spécialiste, même sans pratiquer la médecine du sport, soit ils sont dans le secteur privé et ils font de la médecine générale ou sportive.

Donc on est en face à des fonctionnaires du ministère de la Santé ou des gens qui exercent dans le privé, mais qui sont à la recherche d’un statut de médecin du sport ?
Non, ce n’est absolument pas ça notre objectif. L’objectif de l’Association marocaine de médecine du sport (AMMAS) est l’amélioration continue des compétences du médecin du sport et des cadres médico-sportifs à travers la création de structures universitaires, de formations de base et de plans annuels de formation continue qui peuvent déboucher sur des études et des recherches scientifiques se rapportant à l’éducation physique et au sport. 
Pour cela, il faudra redéfinir la place et le rôle du médecin du sport (statut, qualification, situation matérielle et morale, nouveaux horizons professionnels…) et de l’encadrement médico-sportif dans une approche de standardisation de la prise en charge médico-sportive. Nous arrivons aujourd’hui à un moment où les gens prennent conscience de l’importance de la médecine du sport dans la performance sportive. Sans la médecine du sport, on ne peut avoir de sport de haut niveau. Il nous semble maintenant que la médecine du sport mérite d’avoir un statut et un code sportif afin de restructurer le secteur.

Est-ce que les médecins du sport ont un même cursus de formation pour prétendre tous à un même statut ?
Nous avons beaucoup de médecins du sport, mais leur qualité est différente pour la simple raison qu’il n’y a pas de formation universitaire unique. Certains ont été formés à l’étranger. Dernièrement, il y a eu une formation dispensée à Casablanca. Bien sûr que le contenu est différent entre ces différentes formations. 
Certains ont été formés en deux ans, d’autres l'ont été en quelques semaines. Ce n’est pas normal. Il faut qu’il y ait un standard pour toutes les formations afin que le médecin soit à la hauteur. 
Cela dit, il y a des médecins compétents et qui travaillent au niveau des fédérations internationales, mais il y en a d’autres qui n’ont fait qu’une semaine ou deux de formation et auxquels on a donné la qualification de médecin du sport et qui, à mon sens, ne le sont pas. 
Ce sont des gens qui ont effleuré la médecine du sport, mais celle-ci est beaucoup plus ardue que cela. Il faut un cahier des charges pour savoir qui fait quoi et comment sont formés les médecins du sport. Il faut qu’il y ait un référentiel. 
C’est ce que nous sommes en train de préparer. 

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