Le Matin : L’innovation peut constituer l’un des principaux moteurs de croissance du continent africain. Estimez-vous qu’elle figure aujourd’hui parmi les priorités des gouvernements africains ?
Moubarack Lô : Effectivement, il y a un consensus mondial selon lequel l’innovation est l’un des principaux moteurs de compétitivité, de croissance et de développement d’un pays. Les pays qui innovent avancent mieux que ceux qui innovent moins. Selon le dernier classement de l’indice mondial de l’innovation, c’est l’Afrique du Sud qui se positionne au premier rang africain, suivie de la Tunisie et du Maroc. Si des pays investissement massivement dans l’innovation comme le Kenya dans l’IT et le Maroc dans les énergies renouvelables, globalement, les États africains ont encore du chemin à faire. Ce n’est plus un luxe, tous les gouvernements africains doivent faire de l’innovation une priorité, car il existe une très forte corrélation entre l’innovation et le niveau de développement.
Quelles seraient vos recommandations pour les pays qui peinent encore à investir l’innovation ?
Le défi de l’Afrique est de savoir comment accélérer le développement de l’innovation. Les pays comme le Kenya et le Maroc, par exemple, peuvent servir de cas d’écoles pour nombre de pays africains, en partageant notamment avec eux les Best Practices dans leur domaine d’expertise. Par ailleurs, réussir une bonne stratégie d’innovation implique une approche intégrée et cohérente qui repose sur trois piliers. Toute d’abord, la stratégie du développement du pays doit être fondée sur l’innovation. Deuxièmement, les gouvernements doivent mettre en place des plans d’action très précis qui doivent être suivis et évalués régulièrement. Enfin, il s’agira de mobiliser les ressources nécessaires pour encourager la R&D, accompagner les startups et inciter le secteur privé à investir dans l’innovation à travers notamment des dégrèvements fiscaux.
L’innovation dans le secteur agroalimentaire est indispensable pour la sécurité alimentaire du continent. Existe-t-il des partenariats dans ce sens entre le Maroc et le Sénégal ?
Dans le domaine de l’agroalimentaire, le Sénégal dispose d’une grande expérience et des avancées majeures dans la recherche et développement, grâce aux travaux et investissements de l’Institut sénégalais de recherche agricole (ISRA). En parallèle, l’intervention de l’OCP et son expertise dans les fertilisants permettront, sans doute, de combiner cette recherche fondamentale et appliquée de l’ISRA avec les nouvelles méthodes de production de l’OCP. L’objectif est de permettre au petit agriculteur de gagner en productivité et compétitivité.