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Grande étude dans le pipe chez l’Observatoire national du développement humain

Le Maroc est déterminé à poursuivre sa lutte contre le mariage précoce. Le phénomène dont les ravages socio-économiques ne sont plus à prouver fera l’objet d’une grande étude à lancer par l’Observatoire national du développement humain. Celle-ci permettra à l’institution de comprendre et connaître l’ampleur (prévalence et tendance) du phénomène dans toutes ses formes (officielles et coutumières) et aussi ses caractéristiques (sexe, âge, géographie, contexte social, etc.). Il s’agit également de comprendre les formes de mariage coutumier les plus communs au Maroc avec une analyse des déterminants du mariage précoce, notamment la législation, les normes sociales et les facteurs économiques, sociaux et environnementaux.

L’Observatoire national du développement humain (ONDH) planche sur une grande enquête sur le phénomène du mariage précoce au Maroc. L’étude à laquelle l’Observatoire réserve un budget de 2,18 millions de dirhams comprendra trois volets principaux. Un volet quantitatif, qui fera le point sur l’évolution, les caractéristiques et la situation du mariage précoce à partir des données existantes et insistera sur les déterminants et les implications du mariage précoce. À ce niveau, un travail de modélisation est nécessaire pour expliquer le phénomène et évaluer son impact. Le deuxième volet, quant à lui, sera dédié à l’examen des politiques publiques et juridico-institutionnelles qui, sur la base d’une analyse approfondie des lois et des programmes existants, évaluera les acquis et mettra en exergue les insuffisances en termes de réponse et de lutte contre le mariage précoce. Enfin, un volet qualitatif qui, sur la base de la collecte de l’information complémentaire qui n’est pas approchée par les données quantitatives, apportera un éclairage sur la situation et les implications du mariage précoce.
Les éclairages qui seront apportés par cette étude, à travers ces trois volets, permettront aux décideurs de disposer d’une vision actualisée et complète sur le phénomène, ses causes et ses retombées. Concrètement, l’étude à mener devra permettre à l’ONDH de comprendre et connaître l’ampleur (prévalence et tendance) du phénomène dans toutes ses formes (officielles et coutumières) et aussi ses caractéristiques (sexe, âge, géographie, contexte social et niveau de vie, etc.). Il s’agit également de comprendre les formes de mariage coutumier les plus communes au Maroc avec une analyse des déterminants du mariage précoce, notamment la législation, les normes sociales, ainsi que les facteurs économiques, sociaux et environnementaux. Le tout assorti d’une évaluation des conséquences des mariages précoces : divorce précoce, droits reproductifs, grossesse précoce, mortalité maternelle, violence conjugale, éducation et exposition à la pauvreté et à l’exclusion.
L’étude s’intéressera, en outre, à l’identification et l’analyse des perceptions sociales et culturelles qui entourent et font perdurer le phénomène. Pour l’ONDH, une connaissance qualitative et quantitative sur la prévalence et les conséquences du mariage précoce est une première étape pour se doter d’une stratégie de lutte contre le phénomène. En fait, au niveau de la connaissance, le phénomène est très peu connu et investigué au Maroc pour plusieurs raisons. D’abord, la rareté, voire l’absence d’étude transversale approfondie alliant les aspects qualitatifs et quantitatifs sur le mariage précoce. Ensuite, des lacunes au niveau de données concernant les formes les plus invisibles ou coutumière de ce phénomène. Enfin, très peu d’études ont touché à la question des appréciations et des motivations des enfants, des familles, des membres influents de la communauté, ou ont examiné l’impact des mariages sur le vécu des jeunes mariés (garçons et filles) et sur la vulnérabilité des enfants sur le moyen et long terme.
L’ONDH rappelle que le mariage précoce, selon les Nations unies, constitue une violation des droits de la personne et renforce le cycle de pauvreté intergénérationnelle. En effet, le droit à consentir librement et pleinement au mariage est un droit humain fondamental reconnu dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme (DUDH) de 1948 et dans de nombreux instruments successifs de droits humains. «Aujourd’hui, malgré la ratification de ces conventions qui se sont traduites par la fixation de l’âge légal au mariage, aussi bien pour le garçon que pour la fille, à 18 ans par le Code de la famille, la fréquence du mariage précoce connaît une évolution positive au cours de la dernière décennie», constate l’ONDH. Les données du ministère de la Justice confirment cette tendance haussière puisque le taux de mariage précoce a doublé depuis 2004, date d’entrée en vigueur du Code de la famille.

Il est ainsi passé de 7,75% (18.341 mariages) à 10,02% en 2016 (30.203), dont 96% concernent les filles. Ces chiffres ne comportent pas les cas de mariages coutumiers (mariage de la fatiha ou autres) qui échappent totalement au registre officiel et sont soumis au seul bon vouloir des adultes impliqués. «Les effets préjudiciables du mariage précoce remettent en cause la pertinence et l’efficacité des systèmes de protection des enfants et notamment des filles à plusieurs niveaux. Les jeunes épouses ne sont pas toujours en mesure de négocier les rapports sexuels ou l’utilisation des contraceptifs, elles sont de ce fait de plus en plus confrontées aux grossesses non désirées, aux infections sexuellement transmissibles, à la mortalité maternelle et néonatale et pour plusieurs cas à la violence conjugale», souligne l’Institution rattachée au Chef du gouvernement. Pour faire face à ces effets et respecter les engagements internationaux auxquels il a adhéré, le Maroc a déployé des efforts au niveau institutionnel, législatif et au niveau des politiques et programmes sectoriels. Ainsi, en 2015, le pays a développé des actions «importantes» pour la mise en œuvre de la politique publique intégrée de protection de l’enfance, de son programme national de mise en œuvre (2015-2025) et de la Charte de réforme de la justice qui représentent des cadres stratégiques pour la protection effective et durable, notamment contre toutes les formes de violence à l’égard des enfants, y compris les violences sexuelles. Dans ce cadre, des mécanismes de recours et de prise en charge, notamment au niveau des hôpitaux, des tribunaux, de la police, des centres de protection de l’enfance et des écoles ont été mis en place.
Par ailleurs, la loi 103-13 sur la violence à l’égard des femmes incrimine de nouvelles infractions, telles que le fait de forcer une autre personne à contracter un mariage en utilisant des violences ou des menaces, et punit d’une peine d’emprisonnement qui est doublée si l’infraction est commise entre autres contre une mineure. Toutefois, relève l’ONDH, d’importantes faiblesses sont relevées au niveau de la prévention et de la prise en charge. Cela s’explique, en partie, par des insuffisances dans la mise en œuvre des dispositions juridiques. En fait, bien que le Code de la famille ait fixé l’âge du mariage pour les garçons et les filles à 18 ans révolus (article 19), les exceptions incluses dans les articles 20 et 21 permettent encore d’accorder les demandes de mariage des enfants. Ces dérogations s’appliquent généralement aux filles mineures qui sont mariées très tôt, aussi bien dans le milieu rural que dans les zones urbaines, et qui appartiennent à des couches défavorisées. 

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