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Le monde s’accélère, le mode de contractualisation doit suivre !

Il est clair que le monde du travail est en pleine mutation avec l’arrivée continuelle des nouvelles formes de contractualisation, notamment le freelancing. Un mode qui semble répondre aux attentes clés d’autonomie et de flexibilité exprimées essentiellement par les jeunes diplômés, mais également par les entreprises.

Le monde s’accélère, le mode de contractualisation doit suivre !

Donnant la primauté à l’agilité, à l’innovation à la créativité, et à la flexibilité, le monde du travail favorise l’émergence d’une nouvelle vague de travailleurs : les indépendants. Dans sa dernière note sur les principales caractéristiques de la population active occupée en 2018, le Haut-commissariat au Plan avait signalé que «les travailleurs indépendants représentent 30% de la population active occupée». Un chiffre significatif. 
Mais que recèle cette notion de travailleur indépendant ? Il s’agit bien d’une personne qui exerce une activité économique pour son propre compte à l’instar du travailleur freelance qui suscite de plus en plus l’intérêt de nombreuses entreprises, soit dans le cadre d’une mission déterminée ou pour un service régulier. 
«Nous offrons un poste d’emploi freelance», «Besoin urgent de travailleurs freelance…» «Société cherche freelance dans le domaine de…», «Vous êtes freelance, alors envoyez-nous votre CV…»… On constate que ce genre d’annonces pullulait les supports de communication. Quels avantages trouvent donc les entreprises à ce modèle ? Youssef Guerraoui Filali, directeur du Centre marocain pour la Gouvernance et le Management, explique ce succès par la rationalisation des coûts. «Généralement, les contrats de prestations de service auprès de freelances sont moins chers que la passation de commandes auprès de sociétés». De plus, les entreprises clientes tirent profit d’innovateurs indépendants capables de proposer des innovations incrémentales ou disruptives pour leur clientèle. 
Un constat largement partagé par Meryem Benslimane, consultante en développement des compétences et en ressources humaines. Cette dernière atteste que de plus en plus d’entreprises optent pour cette pratique dans l’objectif de «limiter les charges salariales et se concentrer sur le métier de base, raison pour laquelle une bonne organisation s’impose et, le cas échéant, un référentiel en matière d’exercice sur le marché doit avoir lieu».
Outre l’allègement des frais, la flexibilité qu’offrent les indépendants assure le succès d’un projet et permet d’atteindre les résultats escomptés dans le temps imparti. Plus encore, les non-salariés permettent aux organisations de côtoyer des compétences clés qui répondent à des exigences spécifiques à savoir : innovation, empathie, créativité, écoute, agilité, communication, adaptabilité, intelligence émotionnelle et collective. Ça fait partie de ce qu’on appelle les «soft skills» très prisés par les entreprises apprenantes.

Les raisons pour être indépendant
Le modèle se montre en parfaite harmonie avec les attentes de la nouvelle génération surtout, comme le confirme Youssef Guerraoui Filali, dans un marché de travail morose et quasiment saturé. Le freelance est un travailleur autonome non salarié, ce qui lui permet de constituer un portefeuille d’affaires diversifié grâce à sa façon de faire. Ce féru de la technologie dispose d’une véritable culture du numérique lui permettant de transmettre son savoir, son expertise et ses connaissances. Un impératif absolu pour pouvoir exercer son statut avec beaucoup de professionnalisme et d’aisance. Toutefois, pour assurer la réussite de cette tâche, Meryem Benslimane recommande le respect de certaines règles, notamment la clarification de la mission, mais aussi le choix judicieux du profil freelance ; la communication transparente avec l’ensemble des collaborateurs autour de l’activité du freelance pour assurer l’implication de tous. S’ajoute à cela : la définition des objectifs orientés résultats.
Le directeur du Centre marocain pour la Gouvernance et le Management recommande, quant à lui, aux jeunes d’opter pour ce mode de travail vu que le salariat reste limité et ne permet pas au travailleur de réaliser rapidement son indépendance financière. «Quand vous êtes salariés, il faut travailler plusieurs années, voire quelques décennies pour assurer sa retraite, alors que le travailleur indépendant peut gagner sa vie en quelques années s’il arrive à se distinguer des autres, et par conséquent à décrocher des contrats importants de prestations de services. Ainsi, il pourra faire fructifier ses rémunérations et réaliser des investissements importants», explique-t-il. Faire preuve de modestie et s’inscrire dans l’expérimentation progressive est aussi bénéfique pour les porteurs de projets. «Une simple petite prestation de service peut vous faire apprendre beaucoup de choses. Il est important aussi de gagner la confiance des autres, faire efficacement un premier petit travail augmentera vos chances pour travailler sur d’autres projets plus rémunérant. Le développement de la confiance entre l’entreprise et le freelance permet de faire émerger de nouvelles commandes en faveur de ce dernier», dit-il. Au final, le freelance doit être imprégné par la recherche et l’apprentissage. «Plus vous êtes curieux et créatif, plus vous allez innover dans votre travail. Quand on recourt au freelance, on recherche une compétence particulière», affirme Youssef Guerraoui Filali. Côté juridique, Said Naoui, Docteur en droit et avocat au barreau de Casablanca, insiste dans son entretien accordé au Matin sur le fait «de définir la nature du contrat freelance qui doit respecter en outre les conditions juridiques de sa “coexistence”» (voir entretien).
Notons enfin qu’un travailleur ayant opté pour le statut d’un indépendant freelance doit respecter ses obligations pour exercer sa profession en toute légalité. « Le contrat de free-lance a un caractère obligatoire qui lui donne « force de loi ». Il créé des droits et des obligations entre les deux parties. Ainsi les principaux droits du travailleur indépendant sont : l'exercice d'une activité professionnelle pour son compte et encaissement des bénéfices de cette activité ainsi que l'organisation autonome de son travail. Pour cela, il doit Tenir une comptabilité et respecter les règles de droit en vigueurs ». fait savoir Me Naoui. Côte statut, Une large palette de possibilités s’offre au freelance indépendant : opter soit pour une entreprise individuelle ou une société SARL. Egalement, il est possible de démarrer en tant qu’auto entrepreneur. 

Etre patenté, c’est encore mieux ?
« Ils sont aujourd’hui plus de 93.000 à avoir accédé au statut sur plus de 107.000 personnes ayant déposé leurs demandes. Les femmes atteignent à ce jour 31% du nombre global alors qu’elles représentaient à peine 9% au début du lancement. Par secteur d’activités, 38% des auto-entrepreneurs opèrent dans le secteur industriel, 13% dans l’artisanat, 43% dans le commerce et 6% dans les services produisant un chiffre d’affaires de plus de 633 millions de dirhams ». Ces chiffres démontrent clairement l’engouement par les Marocains pour ce dispositif qui répond à leurs attentes  en termes d’auto-emploi et de création de richesse et de valeur économiques.
 Mis en place en vertu de la loi n° 114-13, ce cadre juridique simplifié profite «à toute personne physique qui exerce, à titre individuel, une activité commerciale, industrielle, artisanale ou une prestation de services» et dont les avantages fiscaux et sociaux sont légion et correspondent parfaitement aux attentes d’une frange de la société en quête de stabilité financière.»… Ses avantages sont légion : simplification des procédures de création et de cessation, exemption de l’obligation d’inscription au Registre du Commerce, non-assujetissement à la TVA, Fiscalité réduite : 1% du chiffre d’affaires pour les activités industrielles, commerciales et artisanales et 2% pour les prestations de services, possibilité de facturation, possibilité d’exercer l’activité à domicile, l’insaisissabilité du domicile principal. L’auto-entrepreneur peut aussi bénéficier des services financiers au même titre que les entreprises classiques. Ainsi, l’auto-entrepreneur peut créer son compte bancaire professionnel auprès de la banque de son choix et obtenir un financement pour son activité. A noter que plusieurs banques de la place ont mis ou sont en cours de mettre en place des offres adaptées à cette forme d’entrepreneuriat.
« Les auto-entrepreneurs sont considérés comme des entreprises innovantes qui se créent en fonction des nouveaux marchés. Ils sont un élément moteur de l’aménagement du territoire et du maintien d’une économie de proximité. D’où la nécessité de les accompagner afin d’assurer la pérennité de leurs activités et celle du Régime qui devrait servir, dans un futur proche, de modèle au niveau régional. Par conséquent, la réussite du Régime de l’auto-entrepreneur est tributaire de l’accompagnement et de l’appui techniques et financiers post-création de ces entreprises… D’où l’urgence d’instaurer un accompagnement pré et post-création des AE », avait déclaré Amal Cherif Haouat, DG Attitude conseil, Experte en accompagnement individuel et autoentreprise. 


Trois questions à Me Said Naoui, Docteur en droit et avocat au barreau de Casablanca

«Le freelance doit tenir une comptabilité et respecter les règles de droit en vigueurs»

Management & Carrière : Le contrat freelance est très en vogue ces dernières années. Qu’est-ce qu’un freelance juridiquement parlant et quelles sont ses conditions de validité ?
Me Said Naoui
: Un freelance est une personne qui exerce une activité professionnelle avec la qualité de travailleur indépendant. Elle n’a pas de contrat à long terme comme les salariés en contrat de durée déterminée ou indéterminée, mais elle réalise son activité professionnelle sous la forme de missions, rémunérées par ses clients. On retrouve en particulier ce statut dans les domaines des médias, de l’informatique, de la formation et du conseil. Le freelance effectue pour autrui une prestation rémunérée réalisée en toute indépendance et avec des moyens propres. Un contrat est valide lorsqu’il respecte les conditions juridiques de sa formation, l’accord des volontés des deux parties. Cet accord se forme par la rencontre entre une offre de contracter et son acceptation. S’y ajoutent la capacité des deux contractants, une cause licite et un objet certain et licite. Si ces conditions sont remplies, il en résulte que le contrat est valable. Ainsi, il produit ses effets entre les deux parties. Il crée des droits et des obligations entre eux, qui doivent les honorer. 

Quels sont les droits et les obligations du travailleur indépendant inhérentes au contrat de freelance ?
Le travailleur indépendant n’a pas de lien de subordination hiérarchique avec un employeur. Il doit déclarer et signaler son existence. Aussi, il doit s’inscrire au registre de commerce comme personne physique. Ainsi, le contrat de freelance a un caractère obligatoire qui lui donne «force de loi». Il crée des droits et des obligations entre les deux parties. Les principaux droits du travailleur indépendant sont : l’exercice d’une activité professionnelle pour son compte et encaissement des bénéfices de cette activité ainsi que l’organisation autonome de son travail. Pour cela, il doit tenir une comptabilité et respecter les règles de droit en vigueur. 

Afin de prévenir tout litige entre la société cliente et le freelance, quelles sont les clauses spécifiques à intégrer dans ce type de contrat ?
Il faut essentiellement définir la nature du contrat, qui est un contrat freelance, et fixer la date de fin de contrat, la tâche ou la mission à effectuer par le travailleur indépendant, objet de ce contrat. 


Entretien avec Youssef Guerraoui Filali, directeur du Centre marocain pour la Gouvernance et le Management

«Au Maroc, nous avons véritablement besoin de plateformes dédiées aux freelances, constituant des marchés virtuels entre les entreprises et les freelances»

Management & Carrière : Travail en freelance : pensez-vous que ce mode de travail intéresse les cadres marocains ? 
Youssef Guerraoui Filali
: La pratique d’une activité professionnelle sous la casquette de travailleur indépendant permet de générer des revenus en freelance. En effet, il s’agit de réaliser des missions précises et pour une durée bien déterminée en contrepartie d’une rémunération. Ce mode de travail est très répandu dans les domaines du numérique et des multimédias, du conseil et de la formation. Au Maroc, ce mode de travail autonome est en forte progression eu égard aux multiples défis économiques et aux impératifs de compétitivité et de mutations technologiques. Les entreprises cherchent de plus en plus des freelances quand il s’agit de commandes très pointues, nécessitant des expertises particulières telles que des innovations publicitaires, des modifications web, des modélisations architecturales… 

Concrètement, quels sont les profils qui optent pour ce type de travail ?
Principalement, ce sont les métiers de l’ingénierie informatique, de la robotique et de l’intelligence artificielle, susceptibles de stimuler la croissance et d’inscrire les entreprises sur des chaines de valeur mondiales. De ce fait, le freelance doit disposer de compétences particulières afin de pouvoir décrocher des contrats «de prestations de service». Au-delà de la formation, il doit justifier d’une expérience probante dans son domaine d’intervention et mettre en avant ses réalisations et projets bouclés dans le cadre de missions de freelance.

Peut-on parler d’une opportunité ou d’une menace pour les entreprises surtout que ce mode de travail offre plus d’autonomie aux jeunes de la génération Z ?
Pour les entreprises, il s’agit d’un paradoxe. D’un côté, c’est une opportunité en matière de rationalisation des coûts. Généralement, les contrats de prestations de service auprès de freelances reviennent moins chers que la passation de commandes auprès de sociétés. Encore mieux, les entreprises clientes tirent profit d’innovateurs indépendants capables de proposer des innovations incrémentales ou disruptives pour leur clientèle. D’un autre côté, c’est une menace pour certaines entreprises de prestations classiques. Certaines catégories d’entreprises disparaitront puisqu’on préfère réaliser de la sous-traitance auprès de freelances. C’est aussi une opportunité certaine pour nos jeunes, surtout dans un marché travail morose et quasiment saturé. Le freelance est un travailleur autonome non salarié, ce qui lui permet de constituer un portefeuille d’affaires diversifié. C’est aussi une alternative d’auto-emploi et de promotion du statut d’auto-entrepreneur. Par conséquent, le travail de freelance doit être encadré juridiquement parlant par la réglementation marocaine, au même titre que les pays émergents ou développés.

Quels sont les facteurs qui entravent le bon fonctionnement de ce mode de travail qui a fait ses preuves ailleurs ?
Au Maroc, nous avons véritablement besoin de plateformes dédiées aux freelances, constituant des marchés virtuels entre les entreprises et les freelances. Cela permettra de développer ce mode de travail et par conséquent d’institutionnaliser les métiers du freelance. Encore mieux, l’encadrement dudit mode réglementera les rémunérations de telle sorte à suspendre le travail en noir, mais cela ne doit pas constituer une pression fiscale sur les freelances débutants qui ont véritablement besoin d’appui et d’encouragement. 
Au-delà, il s’agira de définir aussi un certain nombre de profils faisant l’objet de freelances et à travers un cahier de charges précisant les conditions d’accès et les exigences professionnelles. S’agissant de rémunérations variables qui dépendent du cas par cas, la publication d’une grille ou d’une fourchette des tarifs par secteur/type de prestation serait louable et permettra d’encadrer au mieux ce mode de travail. 

 

 

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