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Le nombre de mariages précoces au Maroc a atteint plus de 25.500 cas en 2018

Le mariage des filles mineures représente incontestablement le talon d’Achille qui entrave encore la consécration d’une véritable égalité entre les sexes. Malgré tous les efforts consentis pour prévenir ce type de mariages, les statistiques du ministère de la Justice attestent que le phénomène a encore la peau dure. En effet, 25.514 actes de mariage précoce ont été établis en 2018, soit une part de 9,5%. Le phénomène devient inquiétant, comme le souligne Ahmed Chaouki, délégué interministériel chargé des droits de l’Homme, vendredi à Rabat, qui appelle à une mobilisation de tous les acteurs et une prise de conscience collective.

Le nombre de mariages précoces au Maroc a atteint plus de 25.500 cas en 2018

«Les filles mineures ne sont pas supposées être mariées à un âge précoce. Elles ne doivent pas payer les frais de l’absence de programmes de développement dans les zones rurales. Nous ne devrons pas être soumis aux pratiques sociales encore enracinées au sein des familles de certaines régions où le mariage commence par un marchandage financier et finit parfois par la traite des êtres humains». Les propos très forts sont ceux d’Ahmed Chaouki, délégué interministériel chargé des droits de l’Homme, qui intervenait vendredi lors d’une rencontre nationale sur le mariage des mineurs intitulée «Mariage des mineures : abolir l’exception, rétablir la norme», organisée à l’initiative du Conseil national des droits de l’Homme.
D’après le haut responsable, le mariage des mineurs, surtout les filles, est devenu «un phénomène effrayant, inquiétant et en hausse continue soulignant que la société n’a plus besoin d’arguments et d’alibis pour annuler l’exception, car il existe une forte volonté politique exprimée dans la Loi suprême de l’État, à savoir la Constitution de 2011».
En effet, et comme l’a rappelé le ministre de la Justice, Mohamed Aujjar, dans son intervention, bien que le Code de la famille ait fixé l’âge légal du mariage à 18 ans, la Moudawana a stipulé dans son article 20 que le juge de la famille peut faire des exceptions et autoriser le mariage en deçà de cet âge, à condition de motiver et de justifier sa décision. Une exception qui représente souvent une brèche pour de nombreuses familles dans le monde rural pour marier leurs jeunes filles, particulièrement dans certaines régions où le mariage des filles mineures et une pratique ancrée et un véritable phénomène sociétal.
Selon les statistiques, le nombre des filles mineures mariées en 2018 a atteint 25.514 cas, soit 9,5% de l’ensemble des mariages. Si ce taux est légèrement en baisse par rapport à 2011, note le ministre, c’est parce que l’année 2011 est considérée comme l’année qui a connu le pic des mariages précoces (39.031 filles mariées, soit un taux de 12%). Nonobstant cette réalité, le phénomène, bien qu’il ait la peau dure, accuse toutefois un léger recul. Une régression due selon le chef du département de la Justice à l’unification des efforts de tous les acteurs concernés, notamment le ministère de la Justice, les différents autres départements gouvernementaux, le CNDH, les magistrats, la société civile et les médias qui n’ont eu de cesse de sensibiliser l’opinion publique à ce phénomène. Une mobilisation qui devra se poursuivre, note le haut responsable, qui estime par ailleurs nécessaire de rapprocher les visions aussi bien législatives que sociales et humaines tout en intégrant le volet économique et social des familles en état de précarité, afin de mettre en place une approche multidimensionnelle pour lutter contre ce phénomène.
Sur ce volet justement, José-Luis Herrero, chef du Bureau du Conseil de l’Europe au Maroc, a mis l’accent sur la nécessité d’élargir les actions de sensibilisation pour pousser à une prise en conscience générale de ce phénomène qui constitue selon lui une atteinte aux droits fondamentaux des filles mineures à choisir leur destin, du moment que la majorité des mariages des mineures sont des mariages forcés organisés sans le consentement des jeunes filles.
Philip Holzapfel, chargé d’affaires auprès de la Délégation de l’Union européenne au Maroc, a indiqué pour sa part que le suivi de cette question du mariage des mineures est une priorité du dialogue politique et technique entre le Maroc et l’Union européenne, rappelant dans ce sens que l’UE soutient, dans le cadre de l’appui budgétaire au plan gouvernemental pour l’égalité Mousawat, les actions des différents acteurs qui travaillent à sensibiliser les parties prenantes et à mettre en place des dispositifs législatifs et opérationnels permettant de suivre la situation afin de limiter le phénomène. Il convient de souligner que l’organisation de cette rencontre fait suite à la campagne nationale de sensibilisation lancée par le CNDH à travers ses treize commissions régionales et qui a connu l’organisation de 30 activités auxquels ont pris part plus de 1.000 participants. Ce forum vise ainsi à s’ouvrir sur les dynamiques actives dans ce domaine, dans la perspective d’élaborer un mémorandum sur le mariage des mineures et de lancer la mobilisation autour de celui-ci.

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