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Le «Crowdfunding», enfin un cadre réglementaire !

Longtemps attendu et réclamé par l’écosystème entrepreneurial marocain, le financement collaboratif «Crowdfunding» a finalement fait un pas en avance dans le circuit législatif. Le projet de loi n° 15-18 était donc bien au menu du premier Conseil de gouvernement de cette rentrée où il a été approuvé. Une fois entrée en vigueur, cette nouvelle réglementation devra stimuler le secteur des startups et promouvoir l’entrepreneuriat et l’innovation au Maroc.

Le «Crowdfunding», enfin un cadre réglementaire !

Concocté par le ministère de l’Économie et des finances, le projet de loi n° 15-18 sur le «Crowdfunding» avait été déposé auprès du Secrétariat général du gouvernement en mars 2018. Depuis, il a fait son bonhomme de chemin dans le circuit législatif pour atterrir finalement au Conseil du gouvernement, fin août dernier, où il a été adopté. Ce projet trace le cadre d’un financement qui implique le grand public dans la collecte de fonds. L’objectif de promouvoir l’entrepreneuriat et l’innovation et soutenir l’émergence de projets sociaux, culturels et créatifs. Sur Internet et des réseaux sociaux, le «Crowdfunding» commence à prendre de l’ampleur, permettant à des porteurs de projets de récolter des fonds pour se développer. 

Zoom sur ce mécanisme de financement ouvert et partagé
Le «Crowdfunding» est sur toutes les lèvres. Ce mode de financement par la foule, privilégié par les innovateurs et les associations, séduit de plus en plus les startups et les porteurs de projets qui ne peuvent ou ne veulent pas financer leurs projets via les formules classiques (banques, prêts d’honneur, etc.).
Le principe est simple. Le porteur de projet lance une campagne sur des plateformes de «Crowdfunding», où il présente son projet et l’usage qui sera fait du montant qu’il cherche à collecter. Autrement dit, il s’agit d’une campagne de communication fixée dans le temps, visant à engager la communauté et collecter une somme d’argent pour un objectif bien défini.
Bien au-delà du financement, le «Crowdfunding» permet, en effet, aux entrepreneurs de faire connaître leurs projets et d’accroître leur crédibilité sur le marché. En créant une campagne de financement, via une plateforme marocaine ou étrangère, les porteurs de projets ont un accès rapide au marché, ce qui leur permet de tester leurs produits auprès de leur cible, économisant ainsi du temps et de l’argent. 
«“Le Crowdfunding” est un moyen de financement très flexible, il n’est limité que par la volonté des communautés qui veulent soutenir le projet. Ceci dit, il est mieux adapté pour les projets “B2C”, c’est-à-dire ceux qui visent des particuliers. L’objectif étant de récolter des petites sommes de beaucoup de personnes, des “backers”, c’est plus facile d’atteindre cette masse critique chez les particuliers qu’en visant des entreprises», explique Eric Asmar, CEO de Happy Smala, une agence de conseil en Finance alternative et en Innovation, pionnière du «Crowdfunding» au Maroc à travers la plateforme Smala&co.

La loi n° 15-18, un nouveau souffle pour le secteur
Il faut noter que l’expérience du financement collaboratif, qui intéresse de plus en plus de porteurs de projets dans le Royaume, n’en est qu’à ses débuts. Mais avec l’arrivée du cadre juridique encadrant ce mode de financement participatif, l’avenir semble prometteur. En effet, ce projet de loi, comme annoncé par le gouvernement, s’inscrit dans le cadre des efforts et initiatives des pouvoirs publics visant à renforcer l’inclusion financière, notamment parmi les porteurs des petits projets, à appuyer le développement économique et social et à canaliser l’épargne vers de nouvelles opportunités d’investissement. En clair, cette réglementation trace le cadre d’un financement qui implique le grand public dans la collecte de fonds. L’objectif étant ainsi de promouvoir l’entrepreneuriat et l’innovation et soutenir l’émergence de projets sociaux, culturels et créatifs. «Cette nouvelle loi apportera un nouveau souffle au développement économique et social du Maroc, puisqu’elle permettra une meilleure inclusion financière des petits projets qui trouvent des difficultés à accéder aux sources de financement classique (en capital ou en dette). Mais l’encouragement ne doit pas s’arrêter à une loi, l’État doit également pouvoir mettre en place un plafond de levées de fonds favorable à des projets ambitieux», souligne Adnane Addioui, président du Centre marocain pour l’innovation et l’entrepreneuriat social (MCISE).
Même son de cloche auprès d’Eric 
Asmar : «L’approbation du projet de loi est une étape importante pour le secteur, mais il reste encore beaucoup de travail avant de pouvoir opérer des plateformes et lancer des campagnes. Il reste également un travail de sensibilisation auprès du grand public par rapport au fonctionnement et aux avantages du “Crowdfunding”».
Selon l’expert, un(e) entrepreneur(e) peut lancer une campagne de prévente à partir du moment où il/elle a un prototype complet de son produit ou service et un plan pour en produire assez pour satisfaire les commandes de sa  communauté de «backers».
La réussite de cette démarche repose sur un travail rigoureux allant du choix de la plateforme et de l’objectif financier à la définition de la stratégie de communication pour engager la communauté ciblée et gagner sa confiance. Il faut aussi être prudent dans le choix des messages et des canaux de communication et la fidélisation de sa communauté.
«Une campagne de “Crowdfunding” est avant tout une campagne de communication, dont il est essentiel d’avoir déjà mis en place des canaux online et offline et d’avoir cultivé une communauté de soutien à votre projet. Les membres de cette communauté seront les premiers à contribuer au financement du projet, et à convaincre d’autres personnes de les rejoindre», rappelle le responsable de la plateforme Smala&co. Et qui mieux que le porteur de projet peut être ambassadeur de son projet. Alors à vos projets entrepreneurs et surtout donnez aux autres l’envie de vous soutenir ! 


Les grandes lignes de la Loi n° 15-08

Le texte de loi sur le «Crowdfunding» vise à assurer la mobilisation de nouvelles sources de financement au profit des très petites, petites et moyennes entreprises et des jeunes porteurs de projets innovants, et la participation active des Marocains du monde aux projets de développement du pays via un mécanisme de financement simple, sécurisé et transparent. Le projet de loi a également pour objectifs de promouvoir la libération du potentiel créatif et culturel des jeunes et de renforcer l’attractivité et le rayonnement du Pôle financier de Casablanca. Le texte, a poursuivi le ministre, définit le cadre juridique de l’exercice, par les sociétés de financement collaboratif (SFC), des différentes formes de financement collaboratif. Il établit aussi un dispositif complet de régulation de ces activités, prévoit, en particulier, la création du statut de gestionnaire de plateformes de financement collaboratif (PFC), et définit un dispositif d’agrément des SFC et de supervision et de surveillance de ces activités. Le projet de loi établit, en outre, les procédures et modalités de création et de fonctionnement des sociétés gestionnaires des PFC et définit les engagements et obligations de la SFC, notamment en matière d’information du public, de publicité, de reporting.


Entretien avec Eric Asmar, CEO de Happy Smala

«Nous sommes optimistes par rapport au futur»​

Management et Carrière : Quel état des lieux faites-vous de l’évolution du «Crowdfunding» au Maroc ?
Eric Asmar
: L’approbation du projet de loi est une étape importante pour le secteur, mais il reste encore beaucoup de travail à faire avant de pouvoir lancer des plateformes et mener des campagnes.
D’abord, certains éléments techniques du projet de loi sont à revoir, afin de permettre aux opérateurs des plateformes et aux porteurs de projets de procéder dans l’esprit inclusif et ouvert de ce modèle. Il reste également un travail de sensibilisation auprès du grand public par rapport au fonctionnement et aux avantages du «Crowdfunding» (CF).
Néanmoins, nous sommes optimistes par rapport au futur, car beaucoup de monde attend le feu vert du Parlement pour pouvoir réaliser leurs projets ou en lancer des nouveaux.

Maintenant que le cadre juridique pour le financement participatif est en place, quelles perspectives pour les acteurs du secteur ?
Avec quelques ajustements à faire encore sur le texte de loi, les acteurs actuels du marché pourront opérer plus efficacement et accompagner plus de porteurs de projets dans toutes les régions du Maroc. Il n’est pas évident d’estimer la taille du marché marocain à ce stade précoce, mais des estimations régionales ont été effectuées par la Banque mondiale estimant le marché du CF en Afrique et dans la région MENA (Moyen-Orient/Afrique du Nord) à 2,4 milliards de dollars et 5,5 milliards de dollars respectivement. Le Maroc appartenant aux deux régions, sa position géostratégique lui permet donc de bénéficier des opportunités de croissance offertes par le CF dans les deux régions. 

Selon vous, ce mode de financement est-il adéquat pour tous types de projets ?
Le «Crowdfunding» est un moyen de financement très flexible, il n’est limité que par la volonté des communautés qui veulent soutenir le projet. Ceci dit, il est mieux adapté pour les projets «B2C», c’est-à-dire ceux qui visent des particuliers. L’objectif étant de récolter des petites sommes de beaucoup de personnes, des «backers» dans notre jargon, c’est plus facile d’atteindre cette masse critique auprès des particuliers qu’en visant des entreprises.
Selon notre expérience, les projets culturels et créatifs tels que la mode et les accessoires, la musique et les livres et BD suscitent un grand intérêt chez les Marocains. Les projets caritatifs et humanitaires comme les campagnes menées chaque année à la rentrée pour les fournitures scolaires mobilisent également un soutien important du grand public. Les nouveaux marchés de prêt et d’investissement collaboratif se développent rapidement au Moyen-Orient, et nous constatons qu’ils peuvent devenir des moyens importants de financement pour les TPME (Très petites et moyennes entreprises).

Pour les jeunes entrepreneurs, à quel stade de développement est-ce possible de lancer une campagne de «Crowdfunding» ?
Ceci dépend du type de projet et le type de financement recherché, mais de manière générale, un(e) entrepreneur(e) peut lancer une campagne de prévente à partir du moment où il/elle a un prototype complet de son produit ou service et un plan pour en produire assez pour satisfaire les commandes de sa communauté de «backers».
Avant de lancer une campagne de prêt ou d’investissement collaboratif, le projet doit déjà être en phase de commercialisation, voire de croissance, car les montants de financement sont plus importants et les exigences des «backers» aussi. 


Déclaration de Adnane Addioui, président du MCISE

«Le Principe de base du “Crowdfunding” est qu’un groupe de personnes donne directement de l’argent à une personne/projet pour différentes raisons (social, économique, etc.). Notons aussi que le don est de loin la forme la plus répandue. Le gouvernement a pris conscience de l’importance du financement participatif et l’a démontré par l’adoption d’une loi qui permet son application. Cette nouvelle loi apportera un nouveau souffle au développement économique et social du Maroc, puisqu’elle permettra une meilleure inclusion financière des petits projets qui trouvent des difficultés à accéder aux sources de financement classique (en capital ou en dette). Mais l’encouragement ne doit pas s’arrêter à une loi, l’État doit également pouvoir mettre en place un plafond de levées de fonds favorable à des projets ambitieux. L’impact en sera double : la multiplication de Business Angels au Maroc et la montée en puissance des startups innovantes et, par conséquent, le développement social et humain du pays. D’un autre côté, l’État doit s’assurer des bonnes conditions de son utilisation : sécurité des transactions et un cadre juridique favorable à la dématérialisation des démarches administratives qui autorise notamment les signatures électroniques et les votes en lignes pour les assemblées générales prenant en compte les petites entreprises innovantes à travers tout le Maroc. Les acteurs non gouvernementaux doivent aussi se doter des moyens pour pouvoir initier le public à ce type de financement et de le rendre “mainstream” et donc faisant partie de la culture locale.» 

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