Arrivé, il y a trois jours à Doha, Soufiane El Bakkali poursuit sa préparation sous la direction de son entraîneur Karim Tlemçani. Serein et beaucoup plus apaisé au moment d’entrer dans l’arène et se lancer dans la quête d’un titre mondial, le natif de Fès sait que tous les regards sont tournés vers lui. Forcément, cela pourrait lui ajouter un peu plus de pression. Non, répond Ayoub Mendili, directeur technique national : «je peux vous dire que Soufiane El Bakkali est un champion immunisé contre les influences extérieures. Il est du genre à ne pas avoir besoin d’un accompagnement psychologique. C’est vrai qu’il a besoin des consignes de son entraîneur, mais c’est un champion qui sait ce qu’il fait», nous a-t-il indiqué.
Il faut de dire que du haut de ses 23 ans, El Bakkali a acquis de l’expérience nécessaire pour ce genre de rendez-vous. Quatrième aux JO de Rio de Janeiro et médaillé d’argent aux Mondiaux de Londres en 2017, le Marocain a même réussi à descendre sous la barre des 8 minutes lors du meeting Herculis de Monaco le 20 juillet 2018 (7:58.155), devenant ainsi le dixième coureur le plus rapide de la distance. L’expérience acquise lors de ces trois dernières années va lui servir au moment de prendre sa place sur la ligne de départ du 3.000 m steeple.
Certes, sa mission ne sera pas facile face à une meute de grands champions, notamment le Kenyan Benjamin Kigen et de l’Éthiopien Getnet Wale. Mais il n’ya pas qu’eux. Il y a aussi Conseslus Kipruto, médaillé d’or aux JO de Rio. Le Kenyan, tenant du titre, même diminué cette année par une série de blessures, reste redoutable. Sa cinquième place au meeting de la Ligue de Diamants de l’IAAF à Paris en 8:13.75 est un avertissement pour les prétendants. Il y a également l’Espagnol Fernando Carro ou encore les Éthiopiens Chala Beyo et Lamecha Girma. Autant dire que ce 3.000 m steeple reste ouvert. Il ne reste donc à El Bakkali qu’à répondre présent dès ce mardi en demi-finale.
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Questions à Ayoub Mendili, directeur technique national
«Soufiane El Bakkali est un champion immunisé contre les influences extérieures»
À part les blessures, que redoutez-vous lors de ces Mondiaux ?
Le pire ennemi des athlètes est le stress. C’est pour cela qu’un athlète doit savoir le gérer. L’athlète doit aussi éviter de commettre des erreurs pendant la course et suivre les consignes de son entraîneur, même s’il est difficile de donner une stratégie à un athlète, parce qu’on ne sait pas d’avance comment la course va se dérouler. On leur donne certaines consignes, mais c’est l’athlète qui fait sa course du début jusqu’à la fin. Il doit savoir réagir en fonction de la physionomie de la course. Si elle est rapide, il doit se placer devant et si elle est lente, il doit éviter de s’enfermer au milieu d’autres athlètes pour pouvoir accélérer lors de la dernière ligne droite.
Vous dites que le stress est le pire ennemi de l’athlète, qu’est-ce que la Fédération Royale marocaine d’athlétisme a fait pour préparer mentalement nos athlètes à ce genre de compétitions ?
Il est tout à fait vrai que la préparation psychique et la gestion du stress sont importantes dans la phase de préparation des athlètes de haut niveau. Mais ce qu’on doit savoir, c’est qu’il est difficile de faire accepter à un athlète marocain le recours à un coach mental. La Fédération avait pris l’initiative, il y a quelques années, et a fait appel au docteur Isaaf. Ce dernier a eu des difficultés, car les athlètes refusaient de communiquer et d’échanger avec lui. L’athlète marocain préfère lire le Coran et prier plutôt que d’aller s’adresser à un coach mental, à tel point que dans les années 1990, on distribuait des Corans aux athlètes. La Fédération a également travaillé avec Dr Dribi, mais c’est pareil. Cette réticence à s’adresser au coach mental est liée principalement à la culture du Marocain.
Nous avons vu Soufiane El Bakkali déjeuner et discuter avec tout le monde. Ne faut-il pas plutôt l’éloigner un peu du monde pour maintenir sa concentration jusqu’au jour de la course et pour lui éviter le stress ?
Il a été avec son coach, son manager et une spécialiste de l’alimentation. Mais je peux vous dire qu’El Bakkali est un champion immunisé contre les influences extérieures. Il est du genre à ne pas avoir besoin d’un accompagnement psychologique. C’est vrai qu’il a besoin des consignes de son entraîneur, mais c’est un champion qui sait ce qu’il fait. DNES à Doha, Aberrahman Ichi

