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«Il y a eu des dysfonctionnements au GP Hassan II l’année dernière et nous allons tout faire pour que ce grand tournoi garde son standing»

Il y a bien longtemps qu’Aziz Laaraf n’avait pas accordé d’entretien à la presse. Pour le «Matin», il sort du silence. Il parle de tout. De l’extension du Royal Tennis Club de Mohammedia qu’il préside, de la délocalisation du centre ITF, du niveau du tennis au Maroc, du plan d’action de la FRMT, de Younès El Aynaoui, du rapport du superviseur de l’ATP qui a relevé un certain nombre de dysfonctionnements au GP Hassan II, des clubs, de la guerre déclarée entre l’ITF et l’ATP Tour…

«Il y a eu des dysfonctionnements au GP Hassan II l’année dernière et nous allons tout faire pour que ce grand tournoi garde son standing»
Le Matin : Lundi (4 février), le Royal tennis Club de Mohammedia a procédé au lancement des travaux de son extension pour une enveloppe de 7,2 millions de DH. Sur quoi portent ces travaux ?

Aziz Laaraf : Cette extension relève d’un financement qui rentre dans le cadre du programme de développement du Grand Casablanca, chapitre sport. Notre région connaît un programme très ambitieux qui touche toutes les infrastructures et plus précisément les infrastructures sportives. Nous avons soumissionné notre demande il y a exactement quatre ans au niveau de notre préfecture. Et à ce titre, je tiens à remercier le gouverneur Ali Salem Chegaf qui a tout fait pour que ce projet voie le jour. D’ailleurs, il n’y a pas que ce projet à Mohammedia. Il y en a d’autres comme la salle couverte en cours de construction, la rénovation du stade El Bachir. L’extension du RTCMO (Royal Tennis Club de Mohammedia) entre dans ce cadre. L’enveloppe globale est en fait de 15 millions de DH. L’extension portera sur la création de huit cours en surface rapide afin de mettre à la disposition de nos joueurs un outil qui leur permettra de s’aguerrir et de comprendre les spécificités de ce jeu sur surface rapide qui est devenue quelque chose de déterminant si on veut réellement des résultats, quatre terrains de padels et une piste de préparation physique équipée entre autres.

 

Parmi les projets qui vous tiennent également à cœur, il y a celui de la délocalisation du centre ITF à Mohammedia. Est-ce que ce projet est toujours d’actualité ?

C’est en pourparlers. C’est quelque chose que nous souhaitons éventuellement réaliser, puisque la contrainte, comme je viens de vous le dire, est de mettre à la disposition de nos meilleurs jeunes une infrastructure où il y aurait de la terre battue et des surfaces rapides pour qu’on puisse vraiment les mettre dans les meilleures dispositions.

 

Combien va vous coûter au juste cette délocalisation ?

Le Centre ITF a été délocalisé de l’Afrique du Sud au Maroc, il y a cinq ans, suite à la demande de la Fédération Royale marocaine de tennis auprès de la Fédération internationale. Pour pouvoir réussir la délocalisation, il fallait que le Maroc puisse répondre à un cahier des charges. Parmi les éléments que comporte ce cahier des charges, l'obligation pour la FRMT de mettre à la disposition de ce centre d’élite des terrains en nombre suffisant, un hébergement qui est pris en charge par la Fédération et des moyens de transport. Et en plus, grâce à notre partenariat avec l’OCP, les jeunes sont pris en charge pour la restauration quand ils sont au sein du complexe. Cela dit, le nombre de courts disponibles au sein du complexe n’est pas suffisant, parce que nous avons 24 joueurs au sein du complexe parmi les meilleurs d’Afrique, dont huit Marocains. Grâce à ce programme, on est l’une des rares fédérations à avoir réussi à mettre en place un système de sport étude. Depuis quatre ou cinq ans, nous avons en effet mis en place le programme sport étude pour nos jeunes à partir de 12 ans. Et on est en train d'en récolter les fruits.

 

Je dirais plutôt que ce n'est pas encore le cas. À part les quelques médailles gagnées sur le plan africain et arabe, le tennis marocain est aux abonnés absents ?

Je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous. Nos résultats sur les catégories de jeunes sont excellents. On a réussi à former des juniors au top 100 grâce au Centre international des entraînements. L’année dernière, on a glané 27 titres arabes et africains. Je ne sais pas pourquoi on est le seul sport à qui on fixe des objectifs mondiaux.

 

Vous dites que nous avons des joueurs au top 100 juniors, pourquoi ces joueurs n’arrivent-ils pas à franchir le cap ?

C’est une problématique mondiale est non pas uniquement marocaine. Pourquoi nous n’avons que deux joueurs africains dans le top 100 mondial, alors qu’on est quand même un continent qui regorge de jeunes et de potentialités ? Pour répondre très franchement, c’est une question de moyens. Dans notre plan d’action, on accompagne trois jeunes en les mettant dans les meilleures conditions et en les envoyant en Espagne dans des académies très réputées. Dès qu’on parle de phase de transition, il faut mettre à la disposition d’un jeune un budget de presque un million de DH par an. Quand on sait que notre fédération reçoit une subvention qui ne dépasse pas 9 millions de DH par an – et on la reçoit en plus en retard –, comment peut-on faire face à nos dépenses de fonctionnement, comment peut-on faire face aux grandes échéances, les grands prix qui sont la fierté de notre pays ? Malgré tout ça, nous faisons tout ce qu’il faut au niveau de notre fédération, et notre président a réussi à nous avoir un budget de sponsoring très honorable pour qu’on puisse répondre à nos échéances en termes de calendrier et pour pouvoir mettre à la disposition et des clubs et des jeunes les moyens nécessaires pour réussir. Trouver 3 millions de DH pour accompagner trois jeunes, c’est déjà le tiers de la subvention que le ministère octroie à notre fédération. Nous, en tant que fédération, nous avons un budget qui ne dépasse pas les 25 millions de DH. N’importe quelle équipe de football a un budget qui dépasse de loin de notre budget. Nos clubs, dans leur majorité, on un budget qui oscille entre 1 et 3 millions de DH. Ce sont là des ressources très limitées. Malgré toutes ces contraintes, nous obtenons des résultats à l’échelle continentale et arabe.

 

Vous venez dire que la FRMT envoie des jeunes en Espagne pour être formés. Est-ce que le modèle de formation marocain a atteint ses limites ?

Non. On forme toujours, mais nos meilleurs joueurs, il faut les mettre dans les meilleures conditions. Et aujourd’hui, tous les meilleurs joueurs du monde s’entraînent en Espagne. C’est un pays qui a une culture tennistique. Nos meilleurs jeunes, on les met dans le centre ITF de 12 à 18 ans, mais une fois qu’ils arrivent à cet âge-là et quand ils ont un bon classement juniors. La solution qu’on a trouvée pour réussir cette transition est de les mettre dans les meilleures conditions et de leur offrir les moyens. Et pour cela, on a trouvé un partenariat avec une académie de renom qui a formé tous les grands champions d’Espagne.

 

Est-ce que vous ne pensez pas que si nos jeunes n’arrivent pas à franchir le cap, c’est en partie à cause des clubs qui ne s’acquittent pas convenablement de leur mission ?

Je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous. Moi, à travers cette antenne, je remercie tous les bénévoles qui font un travail extraordinaire pour maintenir ces infrastructures. Il faut savoir que ce sont là des coûts de fonctionnement.

 

J’ai l’impression que les clubs de tennis aujourd’hui au Maroc sont devenus des clubs pour le tennis de loisir ?

Encore une fois, je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous. Nous avons exactement au Maroc 76 clubs de tennis. Sur ces 76 clubs, 56 sont labellisés. La Direction technique nationale a créé un programme de labellisation. Nous avons quatre catégories de clubs : des clubs qu’on appelle éducatifs, et non de loisirs comme vous le dites. Et on a besoin de ces clubs pour vulgariser la pratique du tennis, parce qu’on souffre de l’image d’un sport élitiste. En second lieu, nous avons des clubs à vocation sportive et des clubs d’élite. Ces clubs, en fonction d’un cahier des charges précis, reçoivent des subventions à hauteur des moyens dont on dispose. On parle d’un budget de développement de 5 millions de DH réparti de manière très équitable. Les clubs reçoivent, en fonction de leur label, une subvention pour les accompagner dans la formation des entraîneurs. Vous avez dit tout à l’heure qu'il y avait une carence, oui, mais ce n’est pas de la faute des clubs. C’est une carence structurelle à laquelle nous avons répondu par un programme de formation très ambitieux, à travers un partenariat avec l’Institut Moulay Rachid, et depuis quatre ou cinq ans on a mis en place un programme de formation pour tous les entraîneurs, sanctionné par un diplôme. Nous avons plus de 300 entraîneurs formés. Les trois partenaires sont l’Institut Moulay Rachid pour ce qui est de tronc commun, la Fédération française qui a mis à notre disposition ses meilleurs entraîneurs et la Fédération internationale qui a apporté son expertise. Ces deux dernières années, nous avons aussi mis en place un programme de formation sur l’aspect dans lequel on était défaillant, à savoir la préparation physique et mentale. Nous avons fait appel à l’expert marocain résidant au Canada Mustapha Al Alaoui, docteur en préparation physique spécifique de tennis. Il est avec nous depuis deux ans et il a accompagné une trentaine de préparateurs physique pour mettre à niveau ce volet. Le troisième volet sur lequel la DTN travaille est la préparation mentale. Nous accompagnons les clubs dans le cadre de la labellisation en mettant en place tout un système de tennis progressif. Cette année, on a les accompagnés pour être en conformité avec la loi.

 

Quels sont les joueurs d'élite que vous avez envoyés en Espagne pour continuer leur progression ?

Ils s’appellent Yassir Kilani, Alami et Soufiane Mesbahi. Ces trois-là sont l'élite et nous leur avons alloué une bourse de 700.000 DH chacun.

 

Qu’est-ce que cela vous fait d’entendre que Younès El Aynaoui est embauché par la Fédération française et pas par celle du Maroc. Est-ce que personne n’est prophète chez lui ?

Non, je ne dirais pas ça. Younès est un grand champion que tout le monde respecte, mais chacun est libre de ses choix.

 

Est-ce que la FRMT lui a offert un poste au sein de la cellule de formation ?

À ma connaissance, il n’y a jamais eu de contact dans ce sens-là. Nous n’avons jamais reçu de demande émanant de Younès El Aynaoui. Mais par contre, nous avons Hicham Arazi qui est le directeur du GP Hassan II. Il avait aussi accompagné Réda El Amrani, Lamine Ouahab et Amine Ahouda. Les pistes sont ouvertes pour voir dans quelle mesure il y aurait une possibilité d’accompagner une ou deux autres personnes. Dans le cas de Hicham, nous avons reçu une demande et nous avons répondu favorablement. Pour ce qui est de Younès, nous n’avons jamais reçu de demande à laquelle nous aurions répondu négativement.

 

J’ai reçu le rapport du superviseur de l’ATP qui a relevé un certain nombre de dysfonctionnements. Il a surtout pointé du doigt la qualité des terrains qui ne répondent pas aux standards des tournois ATP, les balles Wilson largement mises en cause par les joueurs, le service de cordage des raquettes ne répondaient pas aux exigences des joueurs… Qu’allez-vous faire pour remédier à ces dysfonctionnements ?

Il y a une commission qui a été diligentée par la FRMT pour traiter ce volet. On revient de Marrakech où on a tenu une réunion avec le club pour éventuellement répondre à ces remarques. Je précise d'abord que les remarques étaient pires quand le GP était organisé au complexe Al Amal à Casablanca. C’est la raison pour laquelle le GP Hassan II a été délocalisé au club de Marrakech. J’aurais aimé qu’il reste à Casablanca. Je veux quand même remercier le club de Marrakech qui a fait des efforts extraordinaires. Je peux vous assurer d'une chose. Les conditions dans lesquelles se déroulait le GP Hassan II à Casablanca pouvaient aboutir à la fin de ce tournoi. Heureusement que le club de Marrakech s’est porté volontaire pour continuer à l’organiser dans des conditions qui sont bonnes, de l’avis des superviseurs. Il est clair que l’année dernière, il y a eu des dysfonctionnements et vous avez raison. Le partenaire n’a pas respecté le cahier des charges en termes de qualité de balles. Ce qui intéresse les joueurs, ce n’est ni le Central ni l’accueil. Trois choses seules les intéressent : la qualité des terrains, la qualité des balles et la qualité des cordages. Et sur ça, il faut dire que l’année dernière, il y a eu une défaillance. Cette année, Hicham Arazi, qui est directeur du tournoi, a fait ce qu’il fallait. Suite à cette réunion qu’on a eue à Marrakech, on a choisi les mêmes balles que pour Roland Garros, on a amené des cordeurs professionnels qui travaillent dans le circuit ATP. Sur la qualité des terrains, nous avons diligenté un professionnel qui est connu et qui a toute l’expérience qu’il faut pour refaire tous les courts et le Central. Je peux vous assurer que cette année, les conditions vont être toutes autres pour que ce grand tournoi garde son standing et son image.

 

Les remarques du superviseur de l’ATP ne concernent pas que ces trois points, mais un tas d’autres choses ?

Sincèrement, je peux vous assurer que les trois points les plus importants sont ceux que je viens de citer. J’ai ce rapport, on l'a lu en long et en large, mais les trois points les plus importants sont ceux que je viens de citer. Sur le plan sécuritaire, je pense que le club avait fait tout qu’il fallait. Quand il parle du volet sécurité, il ne s'agit pas de quelque chose qui touche l’intégrité ou la sécurité des joueurs. C’est surtout au niveau du Central où les gens doivent respecter les échanges. Comme vous le savez, Casablanca a une culture tennistique, les gens savent quand il faut bouger. Beaucoup de petits problèmes de ce genre ont été soulevés avec la direction du tournoi et nous allons faire ce qu’il faut pour qu'ils ne se reproduisent pas. Nous sommes fiers d’être le seul pays africain à abriter des tournois de cette envergure-là. C’est une fierté pour le Maroc et pour le sport qu’on réussisse à maintenir l’organisation de ces deux tournois qui sont très exigeants au niveau des cahiers des charges. Je ne vous parle même pas du volet purement financier. Sans la sollicitude de S.M. le Roi Mohammed VI, que Dieu l’assiste, on n’aurait pas pu les organiser.

 

Qu’est-ce que ça vous fait de voir le complexe Al Amal dans cet état de délabrement avancé ?

Comme tout Marocain, ça me fait mal au cœur. On n’arrive vraiment pas à comprendre. Le président et le comité directeur ont fait toutes les démarches nécessaires auprès des autorités pour pouvoir éventuellement trouver une solution, mais sans résultat. On n’arrive pas à comprendre comment aujourd'hui la communauté tennistique peut être exclue d'un complexe qui a été financé et construit pour le tennis. On n’est pas parti du complexe Al Amal de gaieté de cœur, mais parce qu’on est arrivé au point de non-retour. On a frappé à toutes les portes, mais on n’a pas voulu répondre favorablement à nos doléances.

 

Un mot sur la guéguerre qui oppose actuellement la Fédération internationale et l’ATP tour ?

Le terme que vous avez choisi est un euphémisme. C’est une véritable guerre. L’année dernière, l’ATP et la WTA ont décidé de ne plus s’occuper du classement de tous les joueurs professionnels. Après des discussions acharnées, la WTA et l’ATP vont s’occuper uniquement du classement du n° 1 jusqu’au n° 750. Après, c’est à l’ITF de prendre le relais et de créer son propre classement seniors. En d’autres termes, tous les joueurs qui veulent passer professionnels sont obligés de passer par un circuit de transition qu’on appelle aujourd’hui le World Tennis Tour ou sont obligés de passer par des tournois de 15.000 dollars, mais où ils n’auront plus aucun point ATP. Ils auront que des points ITF. On va avoir un classement seniors ITF où les tournois de 10.000 et 15.000 dollars vont leur donner des points et où le numéro 1 ITF est l’équivalent de 750e ATP. Cette année est une année de transition. Elle va être houleuse parce qu’il n’y a pas que ça comme problème. Le deuxième chantier sur lequel il y a une véritable guerre est le projet de réforme de la Coupe Davis avec le nouveau format et surtout le produit concurrent que l’ATP compte mettre en place un mois après la finale de la Coupe Davis. On se retrouve aujourd’hui avec deux Coupes du monde de tennis. Les grands joueurs ont pris position. Raphaël Nadal, qui est pour le projet de la société Cosmos que gère Gérard Pique en association avec d’Indiana Wells et avec Rakuten. Ils ont donné toutes les garanties financières à l’ITF puisqu’ils ont déjà payé trois années de droits. On parle quand même de 45 millions d’euros par an. D’autres grands joueurs comme Federer, Djokovic, Zverev se sont prononcés contre ce projet. Ils veulent promouvoir plus la Coupe du monde qui va être organisé par l’ATP en collaboration avec la Fédération australienne. Tout cela n’est pas bon pour la communauté tennistique mondiale. Nous sommes un sport qui ne fait vivre que 200 personnes à l’échelle internationale.

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