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Automédication : Gare aux risques !

L’automédication est une pratique répandue au Maroc. Ses raisons comme ses effets sont très variés. En effet, les médicaments sans ordonnance ne sont pas sans danger. Les pharmaciens et les professionnels de santé ne cessent d’ailleurs de mettre en garde contre les risques de cette pratique controversée.

Automédication : Gare aux risques !
La prise de médicaments, même anodins en apparence, présente toujours des risques d’effets secondaires. tttttt Ph. Shutterstock

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’automédication consiste dans le fait qu’un individu recoure à un médicament, de sa propre initiative ou de celle d’un proche, dans le but de soigner une affection ou un symptôme qu’il a lui-même identifié, sans avoir recours à un professionnel de santé. L’automédication peut concerner aussi bien la médecine moderne que la médecine traditionnelle.
Rhume, toux, mal de gorge, état grippal, mal de tête, diarrhées, maux d’estomac, nausées, vomissements, digestion difficile ou constipation. Autant de pathologies qui paraissent anodines et pour lesquelles certains ne prennent pas la peine de consulter un médecin, et vont préférer se procurer le remède «miracle» en en vente libre. Cependant, ce geste qui semble très spontané risque d’avoir des conséquences assez graves dans certains cas. La vigilance est donc de mise. 
Au Maroc, bien qu’il n’y ait pas d’études détaillées, l’automédication est une pratique qui semble assez répandue. Fortement liée à l’usage de la médecine traditionnelle, cette pratique est davantage observée chez les personnes âgées, ce qui la rend encore plus inquiétante. D’ailleurs, en avril 2020 et quelques temps après la déclaration de la pandémie de Covid-19, l’Association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS) avait alerté sur la nécessité d’observer, plus que jamais, les bonnes prescriptions chez les personnes âgées afin de les encourager à poursuivre correctement les traitements prescrits par leur médecin et à éviter toute automédication préjudiciable pour leur santé.
La prise de médicaments, même anodins en apparence, présente toujours des risques d’effets secondaires. Chez les personnes âgées, le vieillissement physiologique et la fréquence de maladies associées accroissent ce danger. 
Les médicaments restent en plus grande quantité et plus longtemps dans l’organisme et leur élimination rénale ralentie, leur accumulation dans les graisses et leur passage plus agressif dans le cerveau rendent de fait les personnes âgées beaucoup plus fragiles face aux médicaments. 
Ainsi, et selon l’AMMAIS, le paracétamol s’élimine deux fois plus lentement, le diazepam utilisé notamment dans l’anxiété (valium) quatre fois plus lentement : il faut 80 heures, soit plus de 3 jours pour éliminer la moitié de la dose donnée de ce dernier médicament qui, avec une prise quotidienne, peut s’accumuler jusqu’à l’intoxication. C’est ce qu’explique d’ailleurs Dr Moussayer Khadija, spécialiste en médecine interne et en gériatrie et présidente de l’AMMAIS qui rappelle que l’intoxication médicamenteuse est responsable d’un tiers des hospitalisations des personnes âgées dans les pays développés et certainement aussi au Maroc.
Un autre danger de l’automédication est l’usage abusif ou détourné des médicaments et une aggravation de l’état de santé de la personne malade. En effet, cet usage abusif, appelé aussi mésusage, peut prendre de multiples formes comme les erreurs de posologie et la prise simultanée de différents médicaments modifiant mutuellement leur efficacité. Le danger de l’automédication réside aussi dans le fait que le diagnostic médical est susceptible d’être retardé. 

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Questions à Dr Ilham Bouiry, pharmacienne

«Le pharmacien reste l’ultime rempart contre une mauvaise ou inappropriée 
utilisation des médicaments»

Qu’est-ce qu’on entend par médicaments d’automédication. Y a-t-il un cadre bien spécifique qui détermine cette catégorie de médicaments ?
Les médicaments d’automédication c’est des médicaments que le patient peut acheter sans une prescription médicale. Ce sont des médicaments qui disposent bien évidemment d’une AMM (Autorisation de mise sur le marché), mais qui n’ont pas été listés dans la catégorie des médicaments nécessitants une prescription médicale.

Quel est le rôle du pharmacien dans l’accompagnement et le conseil des clients ?
Le pharmacien (l’unique professionnel de santé spécialiste du médicament) de par sa formation, sa connaissance des médicaments de leurs effets thérapeutiques et indésirables, est et reste un réfèrent, un repère, primordial dans l’accompagnement du client-patient. Le pharmacien est disponible à tout moment pour conseiller la patientèle sur les modalités optimales d’utilisation des médicaments que ces derniers soient prescrits, d’automédication ou de conseil. Il accompagne souvent, pour ne pas dire toujours, la délivrance du médicament par des conseils hygiéno-diététiques afin d’optimiser l’efficacité du traitement. Enfin, le pharmacien reste l’ultime rempart contre une mauvaise ou inappropriée utilisation des médicaments.

La confiance envers le pharmacien est-elle un garant pour une automédication efficace ?
Le pharmacien est historiquement reconnu comme le premier professionnel de santé auquel s’adressent les citoyens vu son accessibilité, sa préparation, et surtout sa disponibilité 24 h/24, 7 j/7 et 365 jours l’année, et ce sans rendez-vous et gratuitement. Ces caractéristiques ont contribué à travers le temps à l’instauration d’un rapport de confiance citoyen-pharmacien, ce qui facilite le conseil sur l’opportunité ou pas d’une automédication et le cas échéant l’orientation vers les structures les plus adéquates pour une meilleure prise en charge. 

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L’avis du Dr Nadia Essaidi, pharmacienne 

 

«On commence d’abord par définir l’automédication : Selon l’OMS l’automédication consiste dans le fait qu’un individu recoure à un médicament de sa propre initiative ou de celle d’un proche sans avoir recours à un professionnel de santé. Un médicament d’automédication est un médicament à prescription médicale facultative (MPF). Ce sont des médicaments qui ne présentent pas de critères d’inscription sur la liste 1, 2 et stupéfiants. Les médicaments en automédication sont souvent banalisés, alors qu’ils comportent des risques s’ils sont mal utilisés, le pharmacien ne doit pas se contenter de délivrer, il a le rôle d’éducation sanitaire, d’alerte et d’orientation. Ce sont des médicaments dits sans ordonnance appelés «Médication officinale» qui luttent contre la douleur : des calmants, des antalgiques. Si on prend l’exemple des antalgiques qui font parler d’eux aujourd’hui, on voit bien que toute dispensation doit s’accompagner d’un questionnement et de conseils afin de sécuriser l’utilisation par les patients au maximum. Je vous cite quelques exemples comme pour soigner des troubles oto-rhino-laryngologiques, on donne pour : 
• Un rhume : des antalgiques avec vitamines.
• Les maux de gorge : des pastilles à base de plantes et vitamines.
• Une gingivite : un bain de bouche.
Si les symptômes persistent on oriente vers un spécialiste.
Les raisons de l’automédication sont multiples allant de la connaissance de ses maux aux besoins d’économie. 
Je note, par ailleurs, que le pharmacien professionnel de santé reste le premier recours. Cela tombe bien, car il est un expert du médicament. Bien plus que cela, le pharmacien intervient dans l’éducation thérapeutique du patient. Il a de nombreux atouts et notamment sa connaissance du contexte familial.» 

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Quelques conseils

Pour limiter les risques, les personnes souhaitant recourir à l’automédication, malgré ses potentiels dangers, devront veiller à : 

• Demander conseil à un pharmacien avant d’acheter un médicament ou d’utiliser un médicament de son armoire à pharmacie.

•  Respecter la posologie indiquée dans la notice.

•   Respecter les conditions de prise du médicament. Avant le repas ? Le matin ? Le soir ? En dehors des heures de repas ? Essayer de prendre le médicament dans les conditions préconisées par le fabricant.

•  Éviter de prendre plusieurs médicaments en même temps pour éviter les effets indésirables.

•  Prendre connaissance des effets secondaires du médicament ainsi que des contre-indications. Cela est d’autant plus important pour les enfants, les femmes enceintes et les personnes souffrant d’allergies ou d’affections particulières.

•  Vérifier la date limite d’utilisation indiquée sur l’emballage lorsqu’on utilise un médicament que l’on avait déjà chez soi.

•  Utiliser l’automédication sur une période courte. Si les symptômes persistent, il est obligatoire de consulter un médecin.

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