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«Casablanca est la ville afropolitaine dont j’ai tant rêvée, cela valait bien une chanson»

Le chanteur franco-congolais Bantunani vient de sortir son clip «Casablanca... Sunday can wait». Amoureux de la capitale économique, l’artiste a choisi d’y tourner son clip. Bantunani, alias Michel Nzau Vuanda, annonce aussi la sortie de son album «Perspectives» le 10 novembre.

«Casablanca est la ville afropolitaine dont j’ai tant rêvée, cela  valait bien une chanson»

Le Matin : Vous venez de sortir l’album «Perspectives», peut-on dire que c’est une note positive dans un contexte triste ?
Bantunani
: «Perspectives» est effectivement un album d’espoir et d’espérance dans ce monde de doute et d’intolérance. L’artiste sort du confinement qui finalement fut bénéfique  pour la créativité et l’introspection face à un monde sans cesse plus capitaliste, plus rapide. «Perpectives» c’est l’expression de l’art, l’occupation de l’espace par la matière. Une matière épaisse qui invite à la réflexion et au voyage. Je dis surtout que rien n’arrête la musique, la musique passe les frontières, les portes. N’est-ce pas le devoir des artistes que de tenter, même  tristes, l’aventure de la vie.

L’album compte un titre sur Casablanca. Pourquoi ce choix ? Qu’est-ce que vous aimez à  Casablanca ?
Ah «Casablanca, sunday can wait» est la grande surprise car son succès et l’accueil du grand public nous surprend, parce qu’il est triste et mélancolique. Je parle de cette ville Anfa que j’aime énormément au point d’y marcher seul durant des heures à la découverte de chaque coin de rue, vivre l’histoire, contempler l’architecture. Je décris juste ma tristesse, celle d’un promeneur confiné qui ne pouvait plus savourer la folie de Casablanca le samedi. Oui, j’y ai vu la mort parfois, donc j’invitais le dimanche à attendre encore un peu. Au-delà de l’aspect romantique, je veux surtout porter l’attention sur cette capitale extraordinaire qui se trouve en Afrique, car je la vois comme un Hub central, un carrefour pour toute l’Afrique. Casablanca est la ville afropolitaine dont j’ai tant rêvé. Cela valait bien une chanson.

Quelles étaient vos influences pour cet album ?
Plus que jamais, je recherche le groove ultime, faire danser, faire chanter des peuples, à partir de cette profonde réflexion humaniste : je danse donc je suis. Parcourant le Maroc, cet album contient beaucoup de clins d’œil au monde arabo-berbère, mais je puise toujours dans mon Congo natal, dans les musiques noires américaines de mon enfance (Sam Cook, B.B. King, James Brown, Jimi Hendrix). Mais la plus grande inspiration reste l’observation du monde, la rencontre des êtres.

Vous nous avez déjà confié que vous vouliez collaborer avec des artistes marocains, notamment des Maâlems gnaouis. Vous avez pu réaliser ce projet ?
Oui, je voulais que cet album porte une teinte marocaine, qu’il soit le fruit d’une rencontre entre un homme et un pays. C’est la raison pour laquelle j’ai envoyé un signal fort avec le premier single Casablanca. La pandémie a quelque peu réduit mes ambitions, mais oui, on retrouve une collaboration avec le Maleem Abdenbi el Meknessi et aussi des musiciens de l’école de musique et conservatoire de Casablanca El Fida. Dans la spontanéité, j’ai composé deux titres, «Rising song» (al massir, qui est une adaptation du film «le Destin» de Youssef Chahin) et puis il y a le morceau sur la légende de Aicha Kandisha que je veux glorifier en Jeanne d’Arc marocaine. Il est important de valoriser la femme musulmane et le monde islamique qui est sujet à tant de controverses en Occident. C’est donc une chanson de tolérance, de culture, car combattre l’obscurantisme, c’est d’abord informer et instruire. La façon de montrer que le monde n’est pas uniforme.

Que vous inspire le Maroc ?
Comme je vous le disais, le Maroc est un pays modèle en Afrique, il me rend fier parce que je vois que des choses se font, des infrastructures, une architecture identitaire, la vie culturelle y est très riche. Tout n’est pas parfait, mais j’encourage la dynamique marocaine qui conduira forcément à l’émergence d’une Afrique indépendante et unie. Très peu de pays conjuguent à merveille cette particularité d’avoir une modernité occidentale et la douceur de vie africaine. 

Quels sont vos projets après «Perspectives» ?
Le musicien que je suis espère retrouver la scène pour vibrer et chanter la vie. J’aimerais lancer la tournée «Perspectives» ici au Maroc, puis après dans le monde. Continuer à découvrir la richesse de sa culture et combattre les haines par la beauté de l’art et du savoir. Vive le Maroc et vive l’Afrique. 


Un album aux sons de l’espoir

«Perspectives» a de nombreuses significations. Au sens littéral d’abord, l’artiste a voulu «regarder à travers», pour ne pas dire «voir plus loin» après avoir dépassé certaines étapes décisives. D’un point de vue esthétique, l’album se veut une représentation de la profondeur, un paysage vu à distance, la sentation de notre espace et du son. Enfin, en même temps qu’il scrute le passé, l’album envisage l’avenir et ouvre de nouvelles perspectives.
Chaque titre parle avec sa propre identité, sa propre thématique qu’il puise dans l’observation du monde ou des mondes sous le prisme du groove trotteur. Le romantisme n’est plus, le monde se décompose et devient terne dans ses excès de violence et d’injustice. L’artiste s’interroge sur notre capacité à l’émerveillement, comme dans le titre «Another Place» qui est un hymne à l’enfance et à l’affection maternelle. Toute la tristesse de l’exilé ressort dans ce titre à travers la trompette malicieuse d’un musicien kinois. Dans «Casablanca, sunday can wait» , Bantunani, sur les traces d’Humphrey Bogart, esquisse un étrange swing macabre dans une solitude nocturne où la mort se cache. Il faut donc entendre par «sunday can wait» que non seulement le dimanche mais la mort aussi peuvent attendre.
Le son «Bantunani» c’est aussi des collaborations prestigieuses avec les meilleurs ingénieurs de son, on retrouve James Auwarter, célèbre pour sa collaboration avec Kanye West et ses 3 Grammy Awards. Il y a aussi son fidèle mixer Sefi Carmen à qui l’on doit de nombreux hits de Bruno Mars. Le dernier venu et non des moindres, le légendaire Philipe Larsen, connu pour sa touche disco et ses mixes de Madonna et de Michael Jackson. Orphelin des studios Davout, Bantunani est un home studio nomade qui parcourt les cités en quête de nouveaux musiciens. Entre Kinshasa, Paris, Londres et Casablanca, Bantunani brasse les sonorités autour de ses racines congolaises, mais c’est avant tout avec ses enfants qu’il travaille le plus. Ces Mininanis comme on les surnomme sont issus du conservatoire et ont parcouru les scènes avec leur père.

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