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«Celui qui se connaît lui-même, celui-là connaît son Seigneur»1re partie

«Celui qui se connaît  lui-même, celui-là connaît son Seigneur»1re partie

Quelques siècles avant Ibn Arabî, un autre penseur et soufi, al Hakîm at Tarmidhî (m. 910), va aborder la question des différents degrés d’approfondissement de soi en se basant sur une interprétation en ce sens, à partir du Coran. At Tirmidhî considère qu’il y a quatre degrés de plus en plus profonds de la réalité de l’âme humaine, qui vont de la conscience la plus extérieure à la plus intérieure et qui sont, selon les termes coraniques : es-sadr (la poitrine), al qalb (le cœur), al fuad (le fond du cœur) et al lubb (la quintessence).

Il s’agit là d’une parole de sagesse souvent citée et commentée par les soufis et en l’occurrence le grand maître du soufisme, né au 12e siècle à Murcia, Ibn Arabî. Il s’agit en somme d’une connaissance méditative, je dirais même «illuminative» dans le sens où elle procède d’une prise de conscience de soi, une clarification intérieure, qui mène à un perception de plus en plus approfondie de notre être, de notre identité véritable. 
Quelques siècles avant Ibn Arabî, un autre penseur et soufi, al Hakîm at Tarmidhî (m. 910), va aborder cette question des différents degrés d’approfondissement de soi en se basant sur une interprétation en ce sens, à partir du Coran. At Tirmidhî  considère qu’il y a quatre degrés de plus en plus profonds de la réalité de l’âme humaine, qui vont de la conscience la plus extérieure à la plus intérieure et qui sont, selon les termes coraniques : es-sadr (la poitrine), al qalb (le cœur) , al fuad (le fond du cœur) et al lubb (la quintessence). Le terme «qalb» peut regrouper tous ces degrés en tant qu’il désigne le «dedans», la vie intérieure en général. Nous ne citerons ici que les passages qui contiennent les termes en question en donnant cependant la référence des versets où ils se situent.

Sur la poitrine : as sadr
La «poitrine» représente l’image physique de la partie la plus extérieure de l’être. Dans le langage coranique, il est fait une distinction entre poitrine et fond des poitrines (dhât as sudûr), lequel en représente d’une certaine façon l’antichambre, celle où les pensées restent cachées : «Allah ne connaît-Il pas ce qu’Ils cachent ? Il connaît le contenu du fond des poitrines (Cor. 11/5)». C’est dans la poitrine que surgissent (du verbe sadara) les pensées dans la conscience immédiate. En l’absence d’une démarche spirituelle le «sadr» demeure le siège de l’âme despotique (an nafs al ammâra) dont l’une des caractéristiques est l’orgueil : «Ils n’ont que de l’orgueil dans leurs poitrines (Cor. 11/56)».
À l’origine le «sadr» est le «lieu» (niveau de conscience) où se situe l’Islâm dans le sens d’une remise de son âme entre les mains de Dieu : «Allah ouvre à l’Islâm la poitrine de celui qu’il veut diriger (Cor. 6/125)». Puis s’établit tout le processus d’éclaircissement ou de purification : 
«... afin qu’Allah éprouve ce qui se trouve dans vos poitrines et qu’Il en purifie le contenu (Cor. 3/154)». Ce processus est en même temps une thérapie divine : «Nous avons arraché de leur poitrine la haine qui s’y trouvait encore (Cor. 7/43)».

Sur le cœur : al qalb
Le cœur représente le centre subtil de l’être que la vie spirituelle a justement pour but d’éveiller. Dans son acception générale, il est le lieu de l’intuition, de la vision et des états de conscience intérieurs. Et bien évidemment le premier de ces états qui est celui de la foi : «Mais Allah vous a fait aimer la foi, Il l’a fait paraître belle à vos cœurs (49/7)». Avant de signifier «jurisprudence» le mot «fiqh» est d’abord dans le Coran une intellection, une intelligence, du cœur. C’est ce que montre a contrario le verset suivant : «Ils ont des cœurs avec lesquels ils ne comprennent pas (Cor. 7/179)». Ou encore : «Ce ne sont pas leurs yeux qui sont aveugles, mais ce sont les cœurs dans leurs poitrines qui sont aveugles (Cor. 22/46)».
Le Coran mentionne également les états de conscience du cœur que l’expérience spirituelle permet de goûter dans leur plénitude : la paix (as sakîna), la piété (at taqwâ), la crainte (al wajal), la dévotion (al khushû’), la tendresse (al layn), l’apaisement (at tama’nîna), la purification (at tamhîs) et la pureté (at tahâra). Si le niveau de conscience du «sadr» (poitrine) est le lieu où prennent forme les pensées et se déterminent les actions, le cœur est celui de l’intention (niyya) sous-jacente. Une action qui n’est pas accompagnée d’une intention droite n’a du point de vue spirituel aucune valeur. Un hadith dit que Dieu ne regarde pas les actions des hommes, ni leurs formes (suwar), mais regarde leurs cœurs.
Les Soufis tirent en général une autre conséquence du sens étymologique du verbe «qalaba» qui veut dire «retourner» : «Les cœurs, dit un hadith, sont entre deux doigts du Miséricordieux (ar-Rahmân). Il les retourne comme Il veut». Dans ce sens le cœur devient le lieu d’une âme, une conscience, inspirée : «Par une âme ! comme Il l’a modelée en lui inspirant (ce qu’est) son libertinage et sa piété (Cor. 91/7)».
La connaissance que reçoit ainsi le cœur ne relève plus de la science ordinaire extérieure, comme dans le cas du «sadr». Elle relève de l’inspiration divine (Ilham). C’est à partir du cœur ainsi entendu que commence réellement ce chemin de connaissance de soi. Il se situe, selon les soufis, au troisième degré de la foi qui est celui de l’ihsân (la voie du perfectionnement spirituel). 

Par Faouzi Skali

 

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