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«Développer le «Made in Morocco» devient une exigence qui doit s’exprimer à travers des mesures de soutien et d’accompagnement pour faire valoir nos compétences locales et accroître la confiance dans nos propres produits»

«Développer et encourager le brand ‹›Made in Morocco›› au niveau des entreprises devient une exigence qui doit s’exprimer à travers des mesures de soutien et d’accompagnement pour faire valoir nos compétences locales et accroître la confiance dans nos propres produits», souligne dans cet entretien Nawal Chraibi, directrice générale de la Fondation MAScIR qui assure que «Pour le déploiement du «Made in Morocco», il faudrait déjà instaurer la confiance entre toutes les parties prenantes».

«Développer le «Made in Morocco» devient une exigence qui doit s’exprimer à travers des mesures de soutien et d’accompagnement pour faire valoir nos compétences locales et accroître la confiance dans nos propres produits»
Nawal Chraibi.

Le Matin : Le «Made in Morocco» a pris de la vitesse avec la pandémie. À quel point partagez-vous ce constat ?  
Nawal Chraibi
: La crise sanitaire mondiale actuelle a mis à nu, dans tous les pays, les risques et les conséquences d’une dépendance trop forte à des produits étrangers. Elle a également montré comment les pays n’ayant ni maîtrise technologique ni recherche scientifique avancée se retrouvent totalement désarmés. Le «Made in Morocco» est donc un impératif et un levier indispensable pour le renforcement de la souveraineté nationale.
Développer et encourager le brand «Made in Morocco» au niveau des entreprises devient une exigence qui doit s’exprimer à travers des mesures de soutien et d’accompagnement pour faire valoir nos compétences locales et accroître la confiance dans nos propres produits. Des campagnes de sensibilisation des consommateurs finaux pourraient expliquer les enjeux et l’importance de consommer «Made in Morocco». Nous importons en effet, au Maroc, de nombreux produits à faible valeur ajoutée, que nous sommes capables de produire. La préférence nationale doit passer du stade du discours à celui de l’exercice quotidien par les grands donneurs d’ordre et par les citoyens marocains.

MAScIR fait de l’innovation «made in Morocco» l’un de ses axes de travail depuis sa création. Quel bilan faites-vous de cette dynamique ?  
La Fondation MAScIR fait partie de l’écosystème développé par le Groupe OCP. Elle constitue une branche des activités de recherche de l’Université Mohammed VI Polytechnique. Dans ce cadre, elle vise la promotion et le développement de pôles de recherche technologique dans les domaines des matériaux et nanomatériaux, de la biotechnologie, de la microélectronique et des sciences de la vie. Ses travaux sont orientés vers la recherche appliquée et l’innovation pour répondre aux besoins du marché. Nombre de ses projets sont menés en consortium avec les universités et écoles d’ingénieurs au Maroc et principalement avec l’Université Mohamed VI Polytechnique (UM6P). Nos partenariats avec les entreprises se sont renforcés au fil des années. Nous ne comptons aujourd’hui pas moins d’une centaine de contrats R&D avec les entreprises nationales et étrangères, le groupe OCP étant, de loin, le premier partenaire de MAScIR en plus d’être son principal bailleur de fonds.

Cosumar, les Domaines Agricoles, Masen, ONCF, ONEE, ADM, Lesieur Cristal, Africâble, Éléphant vert, Jet Contractors, Lear, Zodiac, Effacec, Thalès, CEA, Si Ware… Ce sont là quelques-uns des organismes et industries qui ont fait confiance à MAScIR et pour lesquels cette dernière a répondu à leur besoin en R&D et Innovation.
Dans le domaine de l’agriculture, MAScIR a développé de nouveaux bio-fertilisants, à base des microalgues marocaines, un analyseur de sols, un analyseur portable d’huile d’olive... Dans le domaine de la santé, MAScIR a mis au point des kits à bas coût pour la détection de maladies prévalentes au Maroc, kits qui ont été validés à l’échelle internationale. L’équipe de biologie médicale travaille également sur le développement de médicaments bio-similaires 100% locaux.
Dans le domaine du transport et de l’agro-industrie, MAScIR a réalisé des dispositifs et conçu des logiciels pour le traitement d’images, entrant dans le cadre de la promotion de l’industrie 4.0 au sein de l’industrie marocaine.
Dans le domaine de l’énergie, 
MAScIR a développé une expertise reconnue à l’échelle internationale dans la thématique de la durabilité des matériaux. Cette expertise concerne entre autres les miroirs solaires et les panneaux photovoltaïques. La fondation accompagne l’agence marocaine pour l’énergie solaire (Masen) dans cette thématique.
Enfin, MAScIR s’est également investi dans les technologies du futur. Elle dispose d’un laboratoire unique au Maroc dans le domaine de l’optique photonique. Ce dernier mène des recherches de haut niveau dans le cadre d’un réseau international (Pays européens, Japon, Afrique du Sud). Les nanomatériaux constituent également un domaine dans lequel plusieurs projets de recherche sont actuellement menés par les chercheurs de MAScIR et qui visent la valorisation des minerais marocains.
Quelques-uns de ces projets ont fait l’objet de création de startups telles que Moldiag (diagnostic moléculaire) ou Agriscan (agriculture de précision). D’autres startups sont dans le pipeline et seront créées d’ici la fin de l’année. 

Quelles sont, à votre avis, les contraintes que le Maroc devra dépasser pour accélérer le Made in Morocco et gagner en compétitivité ? 
Pour le déploiement du «Made in Morocco», il faudrait déjà instaurer la confiance entre nous en tant que Marocains. Il faudrait que le Marocain croisse en son concitoyen. Il faut arrêter de dénigrer, de sous-estimer tout ce qui est local et se rabattre naturellement et précipitamment vers les produits importés.
Cette crise sanitaire a démontré que nos chercheurs, ingénieurs marocains sont dotés de compétences techniques et scientifiques de haut niveau qui leur ont permis de mettre au point des solutions innovantes, à haute performance, de grande qualité aux standards internationaux et à un coût maîtrisé. En témoignent les différentes réalisations nationales de ces derniers mois, masques, respirateurs artificiels ou encore les kits de diagnostic Covid 19 développés par MAScIR.
L’autre obstacle réside dans l’absence de cadres réglementaires dans plusieurs secteurs d’activités de grande importance et qui constituent des priorités nationales. En période exceptionnelle de pandémie comme celle que nous traversons, il faudrait faire un effort en matière d’allégement des procédures administratives et de temps de traitement (Fast Track) des dossiers. La notion d’urgence devrait limiter la bureaucratie au profit de la célérité.

Quels partenariats mettre en place pour favoriser le développement du Made in Morocco ? Quels sont les acteurs de ce changement ? 
Quand je dis que la préférence nationale doit passer du stade du discours à celui de l’exercice quotidien par les grands donneurs d’ordre et par les citoyens marocains, je désigne clairement la commande publique. Elle doit montrer l’exemple en privilégiant les produits fabriqués au Maroc et offrir un terrain d’expérimentation et de valorisation des résultats de la R&D des universités et des centres de recherche. 
La création d’une banque de projets par le ministère de l’Industrie, du commerce, de l’économie verte et numérique dans le cadre du nouveau Plan de relance industrielle 2021-2020 est dans ce sens une excellente initiative. L’objectif est de stimuler la production industrielle locale afin de substituer les produits fabriqués sur place à ceux importés.
La R&D et l’innovation ont un rôle primordial à jouer pour construire et alimenter le «Made in Morocco». La commande publique doit encourager la R&D et les entreprises qui s’inscrivent dans la valorisation des résultats de la R&D marocaines. 

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