C’est un Ramadan pas comme les autres que nous vivons cette année. À cause de la propagation du coronavirus et des mesures prises pour lutter contre cette maladie, les habitudes des Marocains pendant le mois sacré ont presque radicalement changé. En effet, dans le cadre du renforcement des mesures de l’état d’urgence sanitaire, le ministère de l’Intérieur a annoncé, il y a une semaine, l’interdiction de déplacement nocturne entre 19 h et 5 h pendant tout le mois du Ramadan. Il est ainsi formellement interdit aux citoyens de se déplacer en dehors de leurs domiciles ou de se trouver sur la voie publique pendant cette tranche horaire, que ce soit à pied ou à bord des différents véhicules de transport, à l’exception des personnes travaillant ou exerçant dans les secteurs et activités vitaux et essentiels.
Certes, le confinement représente l’unique solution pour éviter la propagation du virus et rester en sécurité, mais cela gâche les joies habituelles du mois du Ramadan, à commencer par les visites familiales et les sorties nocturnes. Habituellement, ce mois sacré est le mois des visites et sorties par excellence, les cafés et restaurants sont bondés à partir du ftour et jusqu’à des heures très tardives, les centres commerciaux ne désemplissent pas toute la nuit, les programmations artistiques se multiplient... Mais cette année, les rues sont complètement désertées.
Un triste paysage auquel les Marocains ont toujours du mal à s’habituer. «Chaque année, nous attendons le mois du Ramadan avec impatience parce que c’est un mois très spécial. Au-delà de son côté religieux et spirituel, durant ce mois, les journées de travail sont plus courtes. Nous sortons par la suite pour faire des courses pour ensuite rentrer préparer le ftour ou pour aller rendre visite aux membres de la famille ou des amis. Le soir, nous aimions beaucoup sortir faire du shopping et assister aux concerts gratuits organisés par les centres commerciaux. Mais cette année, nous ne pouvons rien faire de tout cela, malheureusement, à cause de cette maudite maladie. Nous avions espoir qu’elle disparaisse avant le Ramadan, mais cela n’a pas été le cas. Nous nous retrouvons donc privés de notre liberté et coincés à la maison à longueur de journée», témoigne Rachida, 32 ans, mère de deux enfants.
«Comme je vis seul à Casablanca, pendant tout le mois du Ramadan, j’avais l’habitude de prendre le repas du ftour avec mes amis dans des cafés-restaurants et partager ainsi de bons moments ensemble. L’année dernière, nous rompions notre jeûne chaque jour dans un endroit différent. C’était vraiment une expérience géniale. Cette année, je travaille à distance à cause des mesures prises pour éviter la propagation du coronavirus et je prends mon ftour seul à la maison. Je ne sais pas bien cuisiner, donc ce n’est pas vraiment top comme situation, mais on n’y peut rien. C’est toujours mieux que de tomber malade…», confie Hamza, 28 ans.
Cette situation inédite est également très mal vécue par les commerçants et surtout les propriétaires de restaurants. Ces derniers, contraints de fermer leurs locaux depuis plus d’un mois, ont toujours du mal à voir le bout de la crise à cause du prolongement du confinement durant ce mois sacré. Même si pendant le Ramadan, ils ne pouvaient pas ouvrir durant la journée, à partir du moment du ftour leurs commerces étaient bondés et le restaient jusqu’à une heure tardive le soir. «Pendant le mois du Ramadan, nous comptions énormément sur les formules du ftour et buffet ftour pour compenser les heures de fermeture durant la journée. Et nous nous sommes toujours bien sortis. Mais cette année, les choses sont très différentes. La fermeture du restaurant durant un mois était déjà très difficile, mais que cela se poursuive durant le mois du Ramadan, c’est tout simplement catastrophique pour nous», déplore Aziz, 40 ans, propriétaire d’un café-restaurant à Casablanca.