L’état d’urgence sanitaire chamboule les modes de travail de nombreux secteurs, notamment celui de la justice et des différentes institutions judiciaires. En effet, la question se pose plus particulièrement pour les procès revêtant un caractère urgent et qui doivent être traités malgré l’état d’urgence et les exigences du confinement. C’est dans ce sens des audiences à distance ont démarré, il y a quatre jours, dans le tribunal d’Oued-Zem et celui de Fès. Selon un communiqué du ministère de la Justice, cette expérience va être généralisée à partir du début de cette semaine. Mais le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire a déjà démarré cette expérience en partenariat avec tous les acteurs concernés, notamment le ministère de la Justice, le ministère public, les différents barreaux du Royaume ainsi que la Délégation générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR).
Lancement à Salé du dispositif du procès à distance
Le coup d’envoi du dispositif des procès à distance été donné, lundi, au Tribunal de première instance à Salé, et ce dans le cadre des mesures nationales visant à endiguer la propagation du coronavirus (Covid-19). Ce dispositif, qui repose sur l’utilisation des technologies de communication entre les établissements pénitentiaires d’un côté et les juges et les avocats dans les tribunaux de l’autre, s’inscrit dans le cadre des mesures de renforcement de la sécurité sanitaire des détenus et de la famille de la justice, imposées par l’état d’urgence sanitaire dans le but de lutter contre la propagation du nouveau coronavirus au Maroc. Il intervient, également, dans le cadre de la mise en place des composantes du tribunal numérique, dans le but de renforcer la structure technologique de l’administration judiciaire et fournir des systèmes d’information sécurisés et des programmes liés à la gestion des affaires et des procédures.
«Le procès à distance, qui vise à garder les détenus dans leurs établissements pénitentiaires et les interroger et assurer leur défense à distance, dispose de toutes les conditions nécessaires pour un procès équitable», a assuré le président de la Cour de cassation, président-délégué du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, Mostafa Farès, dans une déclaration à la presse. Après avoir souligné qu’il n’existe aucune différence entre la comparution à distance et le procès normal, M. Farès a affirmé que cette opération s’inscrit dans le cadre de la lutte contre la propagation du coronavirus, notant que «ces procès sont très équitables et respectent toutes les conditions requises».De son côté, le ministre de la Justice, Mohamed Ben Abdelkader, a indiqué que la visite au Tribunal de première instance à Salé vise à prendre connaissance des équipements et du matériel numériques mis en place par le ministère à la disposition des tribunaux du Royaume et des établissements pénitentiaires, en vue de lancer le dispositif du procès à distance via la technique de communication numérique. Nous notons avec satisfaction l’adhésion des composantes de la justice à ce processus, dont les juges, les procureurs généraux et la défense, qui ont organisé des réunions consacrées aux moyens à même de mettre en œuvre ce dispositif et au choix des dossiers, a-t-il relevé.Les équipes du ministère de la Justice ont dernièrement procédé à la distribution de 91 ordinateurs pour accéder au système des tribunaux du Royaume et 71 autres au profit des établissements pénitentiaires, a fait savoir M. Ben Abdelkader, notant que le procès à distance est lancé dans le respect total des normes de sécurité des systèmes d’information adoptées et convenues avec la Direction générale de la sécurité des systèmes d’information (DGSSI) relevant de l’Administration de la Défense nationale. Il a, par ailleurs, souligné que le Royaume a franchi une étape décisive en matière de modernisation et de développement de l’administration judiciaire, en vue d’assurer le droit à la vie et la sécurité sanitaire, entre autres. Le lancement officiel de ce dispositif a été marqué par la présence du procureur général du Roi près la Cour de cassation, président du ministère public, Mohamed Abdennabaoui.Un projet de loi dans le pipe
Selon le ministère de la Justice, il est vrai il y a eu un débat au sujet de la légalité du recours aux audiences à distance, mais il été admis qu’un tel procès était légal en raison de la force majeure qui s’explique par l’état d’urgence sanitaire. De même, il affirme que le tribunal numérique est l’un des chantiers stratégiques sur lesquels travaille le ministère. Toutefois, si le recours aujourd’hui aux audiences à distance est dicté par la situation exceptionnelle de l’état d’urgence, il importe de mettre en place, dans l’avenir, un cadre légal qui concerne le volet procédural (dans le cadre du Code de procédure pénale) pour instituer les règles propres à de telles audiences. Il estime ainsi qu’il nécessaire d’accélérer la mise sur pied de ce chantier stratégique. «C’est ce sur quoi a travaillé le ministère qui a finalisé, cette semaine, un projet de loi dans ce sens, projet qui sera soumis au gouvernement. Ce texte instaure les bases légales du procès à distance. Ce qui va permettre de respecter toutes les garanties exigées dans un procès équitable», nous a dévoilé le ministre de la Justice, Mohamed Ben Abdelkader.
