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Manager à distance : une légende devenue réalité urgente

Bien que contraints de gérer les urgences imposées par la pandémie et l’adaptation hâtive du télétravail pour permettre une continuité de l’activité des entreprises, le management à distance devrait être analysé dans sa globalité et avec une projection vers l’avenir. En effet, si pour certains, le télétravail est une pratique bien installée, pour d’autres, il s’agit plutôt d’un style de travail nouveau et donc peu ou pas préparé au préalable.

Manager à distance : une légende devenue réalité urgente
Ph. Shutterstock

La pandémie du Covid-19 a été l’accélérateur d’une pratique qui faisait timidement son chemin dans les visions stratégiques des entreprises. Le télétravail n’est, en effet, pas un mode de travail tout nouveau, certaines structures l’avaient déjà implanté partiellement ou selon certains profils et fonctions. Mais cette situation brusque interpelle les professionnels du management sur la nécessité de réfléchir et de développer une culture managériale agile et également une culture digitale. Cette pratique impose aussi de la part des responsables RH une organisation et une stratégie bien définie pour arriver à la pérenniser du moins dans certains cas. 
C’est pour traiter de ces différents aspects que l’Association des femmes-chefs d’entreprises du Maroc (AFEM) a organisé, la semaine dernière, son premier webinar sur le thème «Manager à distance : menaces ou opportunités ?» Partant du constat que le Covid-19 est un accélérateur de transition, Nawal Jai, fondatrice d’EcloRH, experte RH et marque employeur, considère que cette pratique de télétravail a toujours existé et était même amenée à se développer très fortement. Cette tendance elle l’explique par deux facteurs essentiels : une tendance de fond du marché du travail et une adaptabilité de certains nouveaux métiers notamment liés au numérique. 
«Aujourd’hui, on constate qu’il y a beaucoup de collaborateurs qui émettent le souhait de passer au télétravail et notamment de manière partielle. D’ailleurs, dans nos enquêtes marque employeur, cette pratique est l’un des facteurs principaux que les collaborateurs aimeraient avoir dans l’entreprise en matière de qualité de vie au travail», explique Mme Jai. Elle note également que les nouvelles générations sont plus demandeuses de cette possibilité de travailler à distance, qui «renforce leur sentiment de confiance, de liberté et d’indépendance». Donc, le management à distance était bel et bien en train de se mettre en place et de se normaliser, mais à un rythme plus lent. 
Autre facteur de taille avancé par Salim Guerraoui, directeur associé M&P, architecte d’entreprise chez Cap One, c’est celui du digital. «Certes, tout le monde parlait du digital, mais peu ont fait le pas sérieusement vers une stratégie bien définie, et ce, que ce soit en termes d’excellence opérationnelle, d’expérience client ou d’innovation. Aujourd’hui, nous sommes tous en train d’embarquer dans un toboggan du digital qui avance à grande vitesse», note M. Guerraoui. Il se pose, par ailleurs, la question de savoir si nos entreprises sont prêtes à greffer la digitalisation dans leur quotidien.
Pour l’avoir pratiqué depuis des années, Saloua Karkri Belkziz appelle même à pérenniser le télétravail après la crise sanitaire, mais, nuance-t-elle, il va falloir s’adapter mieux, et notamment au niveau des infrastructures. 
En somme, le télétravail et la digitalisation sont désormais un fait dans la quasi-majorité des organisations, publiques comme privées. Passé ce temps de crise et d’embrouille générale, il va falloir penser à développer le management à distance pour mieux gérer les équipes, mieux interagir avec les clients et aussi mieux s’autogérer en tant que managers. Bien entamé, préparé, structuré et cadré, le management à distance est une opportunité pour l’entreprise. Selon Mme Jai, ce style de management offre d’importantes perspectives pour les entreprises en termes d’ouverture sur d’autres marchés mondiaux et d’accès à des bassins d’emplois beaucoup plus vastes, entre autres. Autres avantages : capacité à se concentrer, une meilleure qualité de vie, prendre du recul et libérer un peu d’espace mental pour le manager et le collaborateur et à réaliser des baisses au niveau des coûts de bureau. Le management à distance est également un critère de base pour la marque employeur. «C’est un argument d’attractivité solide et dans l’air du temps qui permet de coopter et de recruter des ressources particulières comme les experts nomades et les profils nouvelle génération», insiste Mme Jai.

Quel profil pour un manager à distance ?
Maintenir l’engagement des équipes, un sentiment d’appartenance et même une culture d’entreprise en pleine transition sont autant de défis que les managers ont à relever et en un temps record. Dès l’adoption du télétravail, les collaborateurs et les managers se sont retrouvés devant une multitude de situations inédites à gérer : pas de proximité, manque de communication, gestion de temps, organisation du travail…
En effet, si les missions du manager étaient déjà complexes et variées, avec cette transition rapide et brusque, la notion de distance et d’éloignement vient ajouter une complexité supplémentaire. Mais la littérature a déjà commencé à fuser et les experts du management tentent, ici et ailleurs, de synthétiser et d’analyser les profils et les pratiques managériales qui devront permettre de relever les défis du management liés. On cite la nécessité de hiérarchiser les activités à forte valeur ajoutée, l’urgence de clarifier les responsabilités et de développer l’interdépendance, l’optimisation de l’utilisation des outils de communication et la diffusion de l’information, la capacité à répondre aux attentes et surtout à identifier les signaux faibles, la non-négligence de l’importance de maintenir une proximité relationnelle et de confiance, le maintien d’un climat de concertation, de coopération et un sentiment d’appartenance et la mise en place de dispositif de reporting efficace. 
Si ces pratiques sont nécessaires pour réussir le challenge du management à distance, M. Guerraoui a, pour sa part, identifié certains profils que les managers ne devraient pas être : 
• Le manager virtuel : qui va prendre de la distance physiquement et basculer vers le tout digital. Il risque donc de perdre la confiance de ses équipes et d’occulter la valeur ajoutée qu’il devrait apporter à sa team.
• Le micro manager compulsif : à vouloir trop structurer la remontée d’informations ou organiser les travaux à exécuter, on risque d’être «castrateur» en cassant les initiatives des collaborateurs et en les responsabilisant moins.
• Le manager Headless Chicken : avec une énergie débordante (multiplication des canaux de communication, des conf-calls…), il risque de désorienter l’équipe ou de perdre le cap.
• Le manager robot : qui est très orienté procédures au détriment du relationnel. 
• Le manager «Meet-Napper» : qui est trop présent, limite envahissant, qui risque même d’impacter la productivité et la motivation chez ses collaborateurs.

Quels sont les préalables pour mieux gérer à distance
Le défi est donc grand et important : réussir à manager son équipe à distance pour ne pas subir les répercussions négatives sur le rythme de travail et donc sur la productivité de l’entreprise. Pour cela, il faut des préalables que Nawal Jai a résumés comme suit : Agir sur la culture qui prend en compte le travail à distance, la digitalisation, la coordination, l’esprit de responsabilité et de responsabilisation et l’engagement. Deuxième point important est en lien avec la posture managériale. Il s’agit donc d’identifier les pratiques efficaces pour voir émerger le manager hybride et agile qui saura gérer la situation. Ce dernier devra cultiver un climat de confiance réciproque avec ses collaborateurs, savoir motiver, être reconnaissant et repérer les signaux de détresse à distance. L’autre élément important pour réussir le management à distance est la planification et le monitoring des activités. Ce point est d’autant plus important que la distance exige un niveau précis de planification en termes d’objectifs, de responsabilités que d’exécution, note M. Guerraoui. 
À noter finalement que ce webinar initié par Leila Doukali, présidente de l’AFEM, et Souad Maadir Tarmidi, première vice-présidente Transformation digitale, est le premier d’une série que l’association compte organiser prochainement pour faire le focus sur les nouveaux défis managériaux des entreprises.

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