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«Les États-Unis apprécient grandement le leadership de Sa Majesté le Roi Mohammed VI»

Dans un entretien exclusif accordé au «Matin», Son Excellence David T. Fischer, ambassadeur des États-Unis au Maroc, passe en revue les différentes dimensions du partenariat stratégique entre Rabat et Washington. Le diplomate américain, qui estime que la relation entre les États-Unis et le Maroc «est à l’apogée de sa force», souligne que son pays soutient pleinement les aspirations de S.M. le Roi et du peuple marocain dans leurs efforts pour consolider davantage l’état de droit, améliorer la gouvernance et œuvrer en faveur du développement socio-économique. «Les États-Unis saluent la décision du Roi Mohammed VI d’accélérer le développement démocratique du Maroc grâce à des réformes constitutionnelles, judiciaires et politiques consacrées par l’adoption de la Constitution de 2011». Au plan international, M. David T. Fischer affirme que Washington considère le Royaume comme un partenaire stratégique clé : «Le Maroc, souligne-t-il, est un partenaire essentiel dans les efforts de lutte contre le terrorisme, un allié majeur non-OTAN et un acteur central dans les problèmes auxquels est confrontée aujourd’hui la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord au sens large». S’agissant de la coopération pour le développement de l’Afrique, le diplomate américain déclare : «Nous voyons le leadership marocain ainsi que notre partenariat comme des moyens naturels d’accroître le partenariat triangulaire entre les États-Unis et le continent africain».

Le Matin : S.M. le Roi Mohammed VI a salué, dans le récent message adressé au Président Trump à l’occasion du 4 juillet, «la dynamique particulière qui caractérise les relations entre les États-Unis et le Maroc». Qu’est-ce qui confère ce caractère spécial à la relation entre les deux pays ?
David T. Fischer : La longue histoire particulière que les États-Unis partagent avec le Maroc remonte à la naissance même des États-Unis, lorsque nos deux pays ont signé un traité de paix et d’amitié qui est le plus long traité ininterrompu de l’histoire des États-Unis. Nos deux pays ont une longue histoire de collaboration bilatérale et régionale. Aujourd’hui, la relation entre les États-Unis et le Maroc est à l’apogée de sa force et nous la renforçons chaque jour. Notre ambassade consulte étroitement le gouvernement du Maroc sur un éventail de questions d’intérêt commun, notamment la sécurité régionale, la politique étrangère, l’économie et le développement durable. Le Maroc est un partenaire essentiel dans les efforts de lutte contre le terrorisme, un allié majeur non-OTAN et un acteur central dans les problèmes auxquels est confrontée aujourd’hui la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord au sens large. Le Maroc est le seul pays d’Afrique avec lequel nous avons un accord de libre-échange, l’année 2021 marque le 15e anniversaire de l’entrée en vigueur de cet accord. L’année prochaine marquera également le 200e anniversaire de la fondation de la légation américaine à Tanger, la plus ancienne propriété diplomatique américaine au monde et le seul monument historique national américain en dehors des États-Unis.

Washington a salué, à plusieurs reprises, le rôle du Maroc dans la lutte mondiale contre le terrorisme. Selon vous, qu’est-ce qui explique le succès de l’approche marocaine dans ce domaine ?
Les États-Unis et le Maroc ont bénéficié d’une coopération solide et de longue date dans la lutte contre le terrorisme, travaillant en étroite collaboration pour sauvegarder les intérêts de sécurité nationale des deux pays. Le gouvernement marocain a mis en œuvre une stratégie globale de lutte contre le terrorisme qui comprend des mesures de sécurité vigilantes, une coopération régionale et internationale et des politiques de lutte contre la radicalisation. Le succès des efforts antiterroristes du Maroc a permis d’atténuer le risque de terrorisme. Même si le Maroc a continué à faire face à des menaces, en grande partie de petites cellules terroristes indépendantes, il a réussi à bloquer avec succès leurs activités. Le Maroc est un membre actif de la Coalition mondiale pour vaincre ISIS (ndlr :  Daech). Il est également membre fondateur du Forum mondial de lutte contre le terrorisme (GCTF) qu’il copréside actuellement avec le Canada.

M. Pompeo a souligné «le leadership» de S.M. le Roi Mohammed VI dans la «promotion d’un programme de réforme audacieux et ambitieux au cours des deux dernières décennies». Comment voyez-vous ces avancées ?
Comme vous l’avez dit, les États-Unis apprécient grandement le leadership de Sa Majesté le Roi Mohammed VI dans la promotion d’un programme de réforme audacieux et ambitieux au cours des deux dernières décennies. L’appui continu et précieux de S.M. le Roi sur des questions d’intérêt commun telles que la paix au Moyen-Orient, le renforcement de la stabilité et du développement de l’Afrique, ainsi que la sécurité régionale ne sont que quelques exemples d’efforts de réforme positifs. Par ailleurs, les États-Unis ont salué la décision du Roi Mohammed VI d’accélérer le développement démocratique du Maroc grâce à des réformes constitutionnelles, judiciaires et politiques consacrées par l’adoption de la Constitution de 2011. Ce fut un moment qui reflétait de profonds changements dans la région et sous la direction du Roi Mohammed VI. Depuis lors, le Maroc a réalisé des progrès significatifs dans les domaines économiques, sociaux et politiques. Nous soutenons pleinement les aspirations de Sa Majesté et du peuple marocain dans leurs efforts pour consolider davantage l’état de droit, promouvoir les droits de l’Homme, améliorer la gouvernance et œuvrer en faveur du développement socio-économique à long terme. Le Maroc a également progressé dans un certain nombre de réformes économiques, notamment l’élargissement de l’assurance maladie pour les plus vulnérables, l’amélioration de la transparence et de la bonne gouvernance dans le secteur privé, et l’adoption d’une approche économique stratégique sectorielle. Les États-Unis considèrent le Maroc comme un partenaire stratégique clé et nous sommes prêts à travailler avec le gouvernement et le peuple marocains pour réaliser leurs aspirations économiques et politiques.

Depuis de nombreuses années, le Maroc a adopté une politique africaine basée sur le co-développement. Comment cette politique est-elle perçue depuis Washington ? Pensez-vous qu’il existe des opportunités pour un partenariat triangulaire ?
La politique étrangère des États-Unis repose sur une stratégie économique solide qui souligne notre engagement de longue date à accroître le commerce et la croissance en Afrique et à éloigner les pays africains de l’aide étrangère, vers l’autosuffisance et une indépendance financière durable. Reconnaissant l’énorme potentiel économique du continent, les États-Unis ont fait de l’expansion du commerce et des investissements en Afrique une priorité essentielle. Le gouvernement américain a également créé «Prosper Africa», une initiative visant à accroître considérablement le commerce bilatéral et l’investissement entre les États-Unis et l’Afrique.  Nous apprécions l’approche marocaine du co-développement de l’Afrique et son rôle de chef de file dans la région. Nous partageons donc les priorités et l’espoir de concrétiser de plus grandes opportunités économiques pour le continent africain. L’accord de libre-échange entre les États-Unis et le Maroc soutient d’ailleurs l’objectif du Maroc de se positionner en tant que centre financier et commercial régional, offrant des possibilités de localisation de services et de et de réexportation de marchandises vers les marchés d’Afrique, d’Europe et du Moyen-Orient. Nous voyons donc le leadership marocain ainsi que notre partenariat comme des moyens naturels d’accroître le partenariat triangulaire entre les États-Unis et le continent africain.

Sur le plan économique, selon les dernières statistiques disponibles, le volume des échanges a atteint 51 milliards de dirhams en 2018, soit une augmentation de 28% par rapport à 2017. De même, les investissements américains sont classés septièmes en termes d’IDE (investissements directs étrangers), avec plus de 160 entreprises américaines implantées aujourd’hui au Maroc. Qu’est-ce qui attirerait les hommes d’affaires américains ? Et quels secteurs pensez-vous qu’il faudrait explorer pour renforcer le partenariat économique et commercial entre nos deux pays ?
Le Maroc a continué à chercher des moyens d’attirer les entreprises américaines pour explorer des partenariats et accroître la croissance économique des deux pays. Nous apprécions les actions entreprises par le Maroc pour rendre son environnement des affaires plus transparent et plus ouvert aux entreprises internationales en offrant à ces entreprises un cadre juridique efficace et un environnement de travail sécurisé. Les gouvernements américain et marocain ont accepté de publier leurs lois en vigueur sur le commerce et l’investissement, ainsi que toute proposition de loi à l’avance. Contrairement à certains pays, la corruption sous toutes ses formes est interdite au Maroc, les lanceurs d’alerte sont protégés et les entreprises américaines bénéficient des mêmes droits que les entreprises marocaines lorsqu’elles investissent dans le pays. Ces actions contribuent à faire du Maroc un environnement accueillant et riche d’opportunités. Les États-Unis ont identifié divers secteurs variés qui pourraient être mûrs pour des opportunités d’investissement américaines au Maroc, tels que l’aérospatiale, l’automobile, l’énergie, l’eau, les transports, la santé, les télécommunications, les secteurs agricoles et la défense. Notre service commercial extérieur continue de rechercher des opportunités pour développer les investissements et des partenariats économiques américains ici au Maroc.

Parmi les projets de coopération entre les deux pays, on compte ceux réalisés dans le cadre du Compact II de la Millennium Challenge Corporation. Comment évaluez-vous l’état d’avancement de ces projets, en particulier celui de la fusion des terres collectives ?
La Millennium Challenge Corporation s’associe à des pays qui accordent la priorité à la bonne gouvernance, à la liberté économique et à l’investissement dans leurs citoyens. Le Maroc, en tant que principal bénéficiaire des fonds du MCC à ce jour, est un partenaire clé du MCC depuis 2006. À travers le pacte actuel du MCC, les États-Unis sont fiers de soutenir la mise en œuvre des priorités stratégiques de Sa Majesté le Roi Mohammed VI liées à l’amélioration de l’éducation et des systèmes de gouvernance foncière, tous deux essentiels à la croissance économique du Maroc. Le gouvernement marocain, avec le soutien du MCC, a développé un nouveau processus de melkisation plus inclusif, qui consiste à octroyer des titres aux petits agriculteurs pour les terres collectivement possédées dans les périmètres irrigués. Cela est actuellement mis en œuvre sur 67.000 hectares dans les régions du Gharb et du Haouz et nous sommes ravis que les premiers titres doivent être livrés au début de 2021. Plus récemment, conformément à l’objectif commun de croissance économique inclusive incarné dans le MCC Compact II, le Parlement marocain a adopté une législation majeure qui améliorera les droits des femmes sur les terres collectives et leur permettra de participer aux opportunités économiques générées par ces terres. Le gouvernement américain a salué l’adoption de ces lois et le pacte du MCC soutient leur mise en œuvre. Les nouvelles lois qui éliminent les obstacles juridiques et réglementaires sont une démonstration de l’engagement continu du gouvernement marocain à autonomiser les femmes marocaines en améliorant l’accès à des droits fonciers et à des programmes de main-d’œuvre garantis aux femmes qui offrent des possibilités de développement des compétences et de placement. Les États-Unis continueront d’appuyer l’engagement du Maroc en faveur d’une croissance économique inclusive qui autonomise et intègre les femmes dans l’économie locale et nationale.

En plus de l’USAID (Agence des États-Unis pour le développement international), qui apporte un soutien technique et financier important aux projets de développement humain au Maroc, il existe un autre programme peu connu du public, mais non moins important : le Peace Corps. Pouvez-vous nous en dire plus sur cet organisme, ses missions et son bilan au Maroc, sachant que sa création remonte à 1963 ?
Les 56 premiers volontaires du Peace Corps sont arrivés au Maroc en février 1963 à l’invitation du ministère des Affaires étrangères. Depuis lors, plus de 5.000 bénévoles ont consacré deux ans de leur vie au service des communautés à travers le Maroc dans une variété de domaines et de programmes, y compris promouvoir l’agriculture, l’éducation, la protection de l’environnement, la pêche, la santé, l’approvisionnement en eau en milieu rural et le développement des petites entreprises, en promouvant la mission de paix et d’amitié mondiales du Peace Corps. Et depuis sept ans, le Peace Corps a travaillé avec le ministère de la Jeunesse et des sports pour promouvoir le développement de la jeunesse au Maroc. Au cours de leur service au Maroc, les volontaires apprennent à parler l’arabe marocain (darija). Certains volontaires apprennent également à parler d’autres langues locales, notamment le tachelhit ou le tamzight. Les volontaires ont été invités à participer à des expériences culturelles et à des échanges alors que les Marocains les ont accueillis comme de nouveaux membres de la famille. Les histoires sont inépuisables, mais leur thématique est celle de l’amitié et du service entre les Marocains et les Américains et les ponts que les volontaires du Peace Corps et leurs communautés d’accueil construisent entre nos deux pays. Un grand nombre de nos volontaires ont tellement aimé leur expérience au Maroc qu’ils ont cherché d’autres moyens pour revenir dans ce merveilleux pays, d’ailleurs plusieurs employés de l’ambassade des États-Unis étaient d’anciens volontaires du Peace Corps au Maroc il y a de nombreuses années. Ils sont ravis de retourner dans leur pays d’accueil ! Peace Corps attend avec impatience le retour des volontaires au Maroc au début de 2021. 


Propos recueillis par Abdelwahed Rmiche

 

 

 

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