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«Tout projet culturel touche de très près le développement humain»

La tenue, récemment, de son premier Congrès en partenariat avec le Conseil national des droits de l’Homme, a été pour la Ligue des écrivaines du Maroc une opportunité pour la refonte et la restructuration de son organisation interne. Le parcours des huit années d’activités riches et diversifiées, que la Ligue a pu concrétiser depuis sa naissance, a été d’un grand apport pour jeter les bases d’une institution forte et dynamique. La présidente de la Ligue, Aziza Yahdih Omar, nous en parle dans cet entretien.

«Tout projet culturel touche de très près  le développement humain»

Le Matin : la Ligue des écrivaines du Maroc a été créée en 2011. Quel a été le contexte sa création ?
Aziza Yahdih Omar
: Il ne faut pas oublier qu’en 2011, le peuple marocain avait voté pour la nouvelle Constitution qui est très avancée par rapport à beaucoup de pays arabes et d’autres en voie développement. Cette Constitution donne beaucoup de privilèges à la femme, notamment dans l’article 19 où est stipulée l’égalité de la femme et de l’homme. D’où l’idée de constituer un cadre spécial pour l’écrivaine marocaine. D’autant plus que nous avons toujours milité pour que la femme puisse avoir le même quota que l’homme pour l’accès aux postes de décision, en lui donnant la possibilité de s’épanouir et de servir sa Nation. Et ce grâce à ses compétences et ses nombreuses qualités, qu’elle a toujours déployées, notamment dans l’éducation de ses enfants et la protection de son foyer.

Comment avez-vous fonctionné au début de cette création ?
De 2011 à 2012, notre Ligue était uniquement une page sur Facebook. C’était une manière de construire un pont entre les écrivaines et intellectuelles et leur permettre de se connaître. Mais ce qui m’a interpellé dans tout cela, c’est la recherche d’une valeur ajoutée qui puisse enrichir cet univers, à travers une prise de conscience de cette écrivaine. À la fin de l’année 2012, après l’adhésion d’un nombre important d’écrivaines qui nous ont fait confiance, nous avons décidé de constituer, officiellement, la Ligue des écrivaines du Maroc.

Comment se sont développées les choses ?
Au départ, nous avons rencontré beaucoup d’obstacles. Mais on s’est dit que tous les débuts se passent de cette manière. Il fallait encaisser pour atteindre nos premiers objectifs qui sont de rassembler les femmes instruites dans toutes les régions du Maroc et d’encourager l’écriture chez les jeunes. Donc, on n’avait pas besoin de gros financements, puisqu’on pouvait se réunir chez l’une des membres et même passer la nuit chez elle. Ce qui a permis de tisser des liens très forts d’amitié entre nous et d’instaurer des sections dans diverses régions du Royaume. Puis après, à l’extérieur du pays.

Y a-t-il une relation entre la Ligue des écrivaines du Maroc et l’Union des écrivains du Maroc ?
Aucune. Car notre idée a pris naissance suite à la Constitution de 2011, comme je vous l’ai expliqué. On s’est dit pourquoi, nous en tant que société civile, ne prendrait-on pas cette initiative ?

Vous dites que vous travaillez le volet de la politique culturelle. De quelle manière ?
Le fait de chercher la femme intellectuelle dans les milieux marginalisés et de lui donner la possibilité d’adhérer à la Ligue, c’est de la politique culturelle. On a travaillé pendant huit années sur ce volet. Et nous avons plusieurs exemples de femmes qui ont pu dépasser les aléas de la vie et réaliser de petits rêves du vécu quotidien, grâce à leur talent. Donner de l’intérêt à des femmes du milieu rural fait partie de nos objectifs. Car la citoyenneté c’est des droits et des devoirs.

Donc, la Ligue ne se focalise pas uniquement sur la culture, elle travaille aussi pour le développement humain...
Effectivement, parce qu’il y a la Ligue des écrivaines du Maroc, comme cadre qui s’occupe de l’écriture, de la critique et de la recherche, mais c’est également un projet qui publie le premier travail. Sans oublier que le projet culturel touche de très près le développement humain. Nous avons constaté que le Maroc regorge de talents pour l’écriture dans ses régions les plus reculées. Nous avons trouvé des jeunes filles qui écrivent en langue turque, indienne, chinoise…

Quels sont les projets que vous avez réalisés depuis votre création et dont vous êtes fière ?
Le plus important, ce sont les sections instaurées à l’étranger. Actuellement, cinq pays demandent de représenter la Ligue. Ce qui reflète le souhait d’appartenance à la Nation et le désir de la conservation de l’identité. Pour celles qui se trouvent au Maroc, le principe est de créer de nouvelles élites qui puissent donner une belle image de leur pays. On n’est pas là pour rester dans notre tour d’ivoire, mais pour rassembler tout le monde autour de cette Ligue qui n’est pas exclusivement réservée à l’élite intellectuelle. Nous aspirons à construire de nouvelles élites, encourager les jeunes et aller vers l’autre, qui ne peut pas venir vers nous.

Avez-vous une démarche pour encourager les jeunes à l’écriture ?
Effectivement, nous avons pensé aux jeunes, filles et garçons, en leur créant le Prix de l’espoir. Puis nous continuons notre projet de publications de 100 livres pour les jeunes, chaque année, après des formations et des ateliers sur l’écriture.

On voit que vous avez défini diverses fonctions au sein de la Ligue, comme le Comité des sages ?
Il faut savoir que la Ligue d’avant notre premier Congrès n’est pas celle d’après. Avant, nous n’avions pas de statut intérieur, puis le statut fondamental n’était pas lui aussi complet, c’est-à-dire qu’il ne précisait pas les spécialités de chacune. Le Congrès est venu pour structurer tout ce qui est interne. Car au début, nous avions seulement pensé à rassembler le maximum de femmes intellectuelles.

Quels sont vos projets après ce premier Congrès ?
Nous allons vers l’industrie culturelle, d’autant plus que nous sommes les premiers à constituer cette Ligue réservée aux femmes écrivaines. Il y aura des projets pouvant occasionner des rentrées d’argent pour les écrivaines. Chaque section va penser aux spécificités de chaque région pour aider les écrivaines à avoir des ressources. On peut aller jusqu’à la production cinématographique, au niveau de la télévision, du théâtre, faire des Salons du livre à l’intérieur et à l’extérieur du Maroc. Nous travaillons aussi sur le Prix de la Ligue. Nous comptons nous lancer dans des projets de traduction vers d’autres langues.

Quel est l’événement le plus proche que vous êtes en train de préparer ? 
C’est le Salon international de l’édition et du livre en février, avec les premières publications. Par exemple, quand nous avons organisé la Rencontre du conte à Safi, nous avons retenu le leader de ce patrimoine dans cette ville et nous lui avons imprimé tous ses travaux pour la conservation de ce legs culturel populaire. Comme nous avons produit des écrits de femmes amazighes dans les langues arabe, latine et tifinagh.

Quelle est la devise de la Ligue des écrivaines du Maroc ?
Inculquer la culture de l’amour, de la beauté et de la reconnaissance. 


Biographie succincte

Native de Tan-Tan, la poétesse et écrivaine Aziza Chakouari (Aziza Yahdih Omar de son nom d’écrivaine) est docteure en information et communication, avec un diplôme de journalisme de Friedrich-Naumann-Stiftung. En plus du journal «Rissalat Assahrae» qu’elle a créé, elle a pu participer avec ses écrits dans divers quotidiens, hebdomadaires et mensuels. Elle a même occupé le poste de rédactrice en chef dans certaines publications, en plus de fonctions dans certaines institutions sociales, culturelles et sportives. Aziza Yahdih a pris part, durant son parcours, à de nombreuses rencontres et semaines culturelles au Maroc et à l’étranger. Elle a, à son actif, plusieurs recueils et romans.

 

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