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«La rupture de la relation avec l’école et les éducateurs constitue pour les enfants un vide énorme et a des conséquences négatives sur leur psychologie et éducation»

L’éducation fait partie des secteurs les plus touchés par la crise sanitaire due au Covid-19, essentiellement le préscolaire où les enfants sont en phase de découverte de l’école. Une longue interruption des cours peut avoir de fâcheuses conséquences sur leur scolarité. Explications avec Aziz Kaichouh, directeur général de la Fondation marocaine pour la promotion de l’enseignement préscolaire.

«La rupture de la relation avec l’école et les éducateurs constitue pour les enfants  un vide énorme et a des conséquences négatives sur leur psychologie et éducation»

Le Matin : Le ministère de l’Éducation nationale vient d’annoncer que la date de la rentrée scolaire est maintenue au 7 septembre et que le modèle pédagogique qui sera adopté est celui de l’enseignement à distance, tout en laissant la possibilité aux parents désirant envoyer leurs enfants à l’école de le faire. Que pensez-vous de cette décision ?
Aziz Kaichouh
: Effectivement, le ministère de l’Éducation nationale a annoncé que trois modèles ont été préparés en prévision de la prochaine rentrée scolaire 2020-2021 et qui seront progressivement déclinés en fonction de l’évolution de la situation épidémiologique au Maroc. Le premier modèle prévoit l’adoption de l’enseignement en présentiel à 100% au cas où la situation liée au Covid-19 s’améliore, le deuxième modèle concerne l’alternance entre l’enseignement en présentiel et à distance avec le respect des mesures préventives au niveau des établissements scolaires contre la propagation du virus. Le troisième modèle prévoit l’enseignement à distance si la situation s’aggrave.
D’ailleurs, le ministère a décidé de combiner le deuxième et le troisième modèle en prenant en compte plusieurs variables, notamment la situation épidémiologique qui ne cesse de s’aggraver au Maroc, et en mettant le focus sur deux dimensions : «l’éducation» afin d’assurer la continuité pédagogique, et «la sécurité» afin de sauvegarder la santé des élèves et du staff éducatif. La décision du ministère semble être la meilleure option possible actuellement, et la FMPS y adhère. 

Beaucoup de parents d’enfants en âge d’aller à la maternelle ont décidé de ne pas envoyer leurs enfants à l’école cette année, certains ont même décidé de ne pas les inscrire du tout à cause de l’épidémie. Quelles seront, selon vous, les conséquences de cette situation sur l’enseignement préscolaire ?
Tout d’abord, nous précisions que la maternelle et le préscolaire sont deux cycles différents en fonction de deux tranches d’âge, l’éducation préscolaire offre un enseignement pour les enfants de 4 à 6 ans avant de commencer l’école primaire. Nous tenons à rappeler que l’enseignement préscolaire est une étape très importante de la vie de l’enfant. Sachant que les cinq premières années de la vie de l’enfant sont les plus importantes et représentent les années formatrices qui forment les structures essentielles de sa personnalité, sa construction cérébrale, son éveil, sa créativité, ainsi que son développement cognitif, psychomoteur, émotionnel et social.
Si les parents décident de ne pas envoyer leurs enfants à l’école, cela va impacter en premier lieu leur développement émotionnel et intellectuel, plusieurs recherches ayant démontré que l’enseignement préscolaire qu’un enfant reçoit aide à déterminer essentiellement son intelligence multidimensionnelle d’adulte. 
En ce qui concerne les parents des enfants de la FMPS, aujourd’hui, ils ont exprimé l’inverse et nous interpellent sur les mesures préventives contre la propagation du virus prises par la Fondation au niveau de l’ensemble des classes et unités de préscolaire afin de pouvoir accueillir leurs enfants et assurer leur éducation préscolaire dans les meilleures conditions possibles.

D’après l’Unicef, 40 millions d’enfants dans le monde sont privés d’éducation préscolaire au cours de l’année cruciale qui précède leur entrée à l’école à cause de la pandémie. Qu’en est-il au Maroc ?
Actuellement, les chiffres nationaux démontrent que la généralisation n’a pas été impactée. En effet, le ministère de l’Éducation nationale a communiqué le 18 juillet 2020 des chiffres très satisfaisants qui démontrent que le Maroc continue sa trajectoire de la généralisation (le nombre d’enfants inscrits en préscolaire s’est élevé à 910.428 au titre de l’année 2019-2020, soit un taux de scolarisation de 72,5%), et ceci grâce aux efforts fournis par le ministère et ses partenaires, notamment l’Initiative nationale pour le développement humain et plusieurs acteurs de l’enseignement préscolaire, parmi eux la FMPS (Fondation marocaine pour la promotion de l’enseignement préscolaire).

Quels conseils pouvez-vous donner aux parents d’enfants en âge d’aller à la crèche ou à la maternelle, suite aux dernières décisions du ministère ?
Les parents doivent privilégier à la fois la sécurité de leurs enfants et leur éducation. En outre, les parents doivent être exigeants vis-à-vis des écoles qui accueillent leurs enfants pour mettre en place toutes les mesures préventives nécessaires en respectant les orientations des autorités pour éviter tout risque de contamination des enfants et leur entourage.

Que faut-il faire pour assurer une bonne continuité pédagogique de l’enseignement préscolaire en cette période de Covid-19 ?
Le préscolaire consiste à préparer chaque enfant en tenant compte de ses capacités et pouvoir travailler ses compétences individuelles selon un choix pédagogique et scientifique. La rupture de la relation avec l’école et les éducateurs constitue pour les enfants un vide énorme et a des conséquences négatives sur leur psychologie et éducation. D’ailleurs, le rôle de l’éducateur reste primordial pour l’accompagnement des enfants, l’analyse de leur comportement, ainsi que leur développement psychologique, social, cognitif, psychomoteur et communicationnel, et cela ne peut se faire qu’à travers un contact physique avec des outils adéquats et dans un espace approprié. Le numérique, quant à lui, a des bénéfices, mais présente aussi des handicaps liés principalement au problème d’accessibilité en termes de matériels, de débit, de frais à payer… La situation actuelle est une opportunité offerte aux pédagogues et spécialistes de l’éducation pour pouvoir réadapter toutes les méthodes pédagogiques afin de profiter de l’ère du numérique et accompagner ces nouvelles générations. En résumé, la continuité pédagogique dans le domaine du préscolaire doit passer par une combinaison bien dosée entre le présentiel et le distanciel via le numérique.

Enfin, comment se prépare la FMPS à cette rentrée scolaire ?
À titre de précision, la FMPS gérera lors de cette rentrée plus de 5.000 classes préscolaires réparties sur tout le territoire national, dont 80% dans les zones rurales, avec une capacité d’accueil globale de plus de 125.000 enfants en âge préscolaire. À travers ce réseau, nous offrons une éducation préscolaire de qualité identique quel que soit l’emplacement géographique des unités : rural, périurbain, urbain défavorisé et urbain. Cette offre est gratuite dans le rural et le défavorisé, et subventionnée par l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH) et les partenaires de la FMPS.
Tout le staff éducatif a bénéficié d’une formation initiale à travers nos centres de formation FMPS Takwin et suit des sessions d’encadrement périodiques en présentiel et en e-learning, et est déclaré à la CNSS en conformité avec le droit de travail.
La FMPS a mis en place toutes les mesures préventives de sécurité établies par les autorités sanitaires pour accueillir les enfants, en particulier la réalisation du test de dépistage pour tout le staff éducatif, le respect de la distanciation physique, le lavage systématique des mains, la mesure de la température corporelle quotidiennement pour tous les enfants et le staff, la désinfection hebdomadaire des locaux, avec une réduction du nombre des enfants au sein des classes. À titre de rappel, la FMPS, avec l’appui de l’INDH et du ministère de l’Éducation nationale, a déjà œuvré pour assurer la continuité pédagogique aux enfants du préscolaire, par la diffusion quotidienne des séances contenant des activités éducatives et d’animation depuis le 20 avril 2020, sur la chaîne TV «Attaqafia» et puis «Alamazighia», et «Al Oula» pendant l’été, sous le nom de «Atfalouna». Et depuis mars 2020, la FMPS a mis en place une plateforme éducative sur YouTube sous le nom «FMPS-Channel » destinée à tous les enfants en âge préscolaire dans notre pays, à leurs parents, aux éducatrices et éducateurs, ainsi que toutes les personnes intéressées par le domaine de la petite enfance. Cette plateforme offre plusieurs ressources éducatives numériques adaptées aux enfants du préscolaire (activités, jeux, histoires, comptines…). D’autre part, nous tenons à signaler que toutes les éducateurs/rices de la fondation disposent d’un Smartphone qui leur permet de créer des groupes de suivi et d’encadrement des enfants de leur classe via l’application WhatsApp. 
De plus, les éducateurs/rices de la FMPS dans les zones rurales s’engagent à offrir l’accompagnement et l’assistance nécessaire aux enfants, en leur accordant des activités quotidiennement. 

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