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Une leçon de cinéma avec le compositeur français Bruno Coulais à Meknès

Bruno Coulais, l’alchimiste moderne, participe aux rencontres professionnelles du FICAM, organisées du 11 au 15 octobre à Meknès. Le mercredi, il a fait une leçon de maître devant plusieurs élèves et étudiants de plusieurs établissements marocains. Le compositeur a parlé de son parcours professionnel et des secrets de sa réussite.

Une leçon de cinéma avec le compositeur français Bruno Coulais à Meknès

C’est avec émotion que le directeur artistique du Festival international de cinéma d’animation de Meknès (FICAM), Mohamed Beyoud, a annoncé le 13 octobre la classe de maître de l’édition professionnelle 2021 : «Nous accueillons à l’aide du producteur Jean-Paul Commin une sommité du cinéma français : Bruno Coulais». À cause des restrictions liées à la pandémie Covid-19, l’évènement ne s’est pas déroulé dans l’une des salles bondées habituelles du FICAM, mais c’est une salle vivante pleine d’étudiants de tout le Maroc qui a accueilli le compositeur français de musique de film récompensé de 3 Césars. En revenant sur les étapes les plus importantes de son parcours professionnel, Bruno Coulais a expliqué comment la musique «fait vibrer une image.»
Pour lui, la musique est la lumière narrative du film, ses contours secrets, tout ce qui n’est pas dit. «La mission du compositeur est de révéler cette partie secrète qui n’est pas dans la narration. Je n’aime pas quand la musique répète ce que dit l’image. Et le plus beau compliment d’un metteur en scène est quand il dit “Tu m’as fait découvrir une partie du film qui m’échappait». Le génie de Bruno Coulais est confirmé par tous les professionnels qui ont collaboré avec lui. Selon le groupe de musique celtique irlandais Kíla, ce compositeur est “comme le vent, il peut souvent changer de direction”. Le producteur français, Didier Brunner affirme : “les deux films que j’ai faits avec Bruno sont les deux bandes originales les plus réussies des armateurs”.»

Pour le réalisateur américain Tomm Moore, «la musique de Bruno place tout à un autre niveau». Selon Coulais, cette réussite musicale est basée sur une relation de confiance entre le compositeur et le réalisateur. «Les meilleurs réalisateurs sont ceux qui vous laissent croire qu’ils ont une confiance absolue. Ceci nous donne des ailes et nous pousse à être libres», confie-t-il au public des rencontres professionnelles du FICAM. Néanmoins, Bruno n’hésite pas à «trahir» un réalisateur qui se perd musicalement. Et ce pour le bien du film qui est le réel «maître» dans chaque projet. «La musique est dangereuse. Elle a un pouvoir de manipulation», précise-t-il. Une fois ses mélodies livrées, le grand compositeur cède la place aux autres professionnels. «Il faut abandonner son ego et laisser le metteur en scène choisir la place de la musique. Parfois, on est trahi, mais c’est le jeu».

Bruno Coulais entre dans le monde des metteurs en scènes, essaie de comprendre ce qu’ils veulent, mais sans renoncer à ses idées et à son instinct musical. En tant que compositeur de musique de film, il aime se lancer dans des formules expérimentales, quitte parfois à se tromper. C’est ce qui fait de lui l’un des compositeurs les plus innovants du cinéma contemporain. En cherchant à construire des formules orchestrales inédites, il peut utiliser des jouets de ses enfants, des sons d’objets de la vie quotidienne ou mixer des mélodies d’univers très variés. En compositeur alchimiste, il n’hésite pas à utiliser des musiques de différentes zones géographiques. Dans «Himalaya – L’Enfance d’un chef», ce friand des détournements musicaux a fait passer les chanteurs polyphoniques du groupe corse A Filetta pour des chanteurs tibétains. «J’aime bien quand les mixages sont rugueux, quand la musique surgit ou disparaît subitement», explique-t-il.
Des pierres frappées les unes contre les autres, une guimbarde et une comptine chantée par une voix enfantine, c’est la recette de Bruno Coulais pour faire frissonner son public. «J’utilise de grands orchestres, mais je préfère aussi prendre des éléments de l’enfance dans la musique pour créer ou du fantastique ou de l’angoisse. Parfois, une petite comptine peut donner une musique à fleurs de peau et créer une angoisse plus profonde qu’une musique plus épaisse», précise le compositeur. En témoigne la scène du rapt dans «L’Enfant qui voulait être un ours». Pour lui, on se souvient des musiques quand elles sont originales et non pas quand elles appartiennent à une matrice précise. 


Un riche parcours 

Né en 1954, Bruno Coulais a d’abord été compositeur de musique contemporaine de concert avant d’être connu pour ses musiques de films. Sa carrière a évolué au fil de ses rencontres et notamment de celle du réalisateur François Reichenbach, qui lui a confié, en 1977, la musique du documentaire «Mexico Magico». Il composera alors sa première musique pour un long métrage en 1986, avec «Qui trop embrasse» de Jacques Davila.
En 1996, il rencontre Claude Nuridsany et Marie Pérennou, les deux réalisateurs du film «Microcosmos» pour lequel il obtient son premier César en 1997. En 1999, il fait la musique du film «Himalaya» qui lui vaut un deuxième César. Depuis, le nom de Bruno Coulais est associé à de grosses productions. Cependant, après «Le Peuple migrateur», en 2001, il a annoncé son désir de réduire ses contributions au cinéma et de se consacrer à d’autres projets comme la création d’un opéra pour enfants. Il repend en 2002 avec le film d’animation «L’Enfant qui voulait être un Ours» de Jannick Astrup. En 2004, il travaille sur «Agents secrets» de Frédéric Schoendoerffer et sur Les «Choristes» de Christophe Barratier qui lui vaudra son troisième César. En 2009, il obtient le Annie Award pour le film «Coraline» d’Henry Selick. Passionné par le film d’animation, il collabore avec Tomm Moore sur «Brendan et Le Secret de Kells» et sur «Le chant de la mer».
En 2015, il habille le film d’animation «Mune», réalisé par Benoît Philippon et Alexandre Heboyan. L’année suivante Bruno Coulais signe «À jamais» de Benoît Jacquot. Onze ans après «Coraline», Bruno collabore avec le réalisateur américain Henry Selick pour le nouveau long métrage en préparation «Wendell and Wild» (produit par Netflix). Cette comédie suit deux frères démons qui doivent faire face à leur ennemi juré, la religieuse Sœur Helly, à l’aide de leurs deux acolytes, les adolescents goths Kat et Raoul.

 

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