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Detroit Industries lance la fabrication du polypropylène cast «Made in Morocco»

À l’heure où le ministère de l’Industrie met en œuvre sa stratégie de substitution des produits importés par des fabrications locales, des industriels comme Détroit Industries, lancent déjà leur production. Fabriquant déjà des produits abrasifs et adhésifs, dont une part est exportée, la PME d’El Jadida a lancé la fabrication locale de polypropylène cast (CPP), destiné à l’emballage. Cet investissement, en partie soutenu par l’État, améliorera la disponibilité du produit au Maroc, mais aussi la balance des paiements d’environ 60 millions de DH par an.

Detroit Industries lance la fabrication du polypropylène cast «Made in Morocco»

Substituer des produits locaux aux importations est l’un des points essentiels de la stratégie industrielle du Royaume. De plus en plus d’entreprises tentent ce challenge avec des réussites avérées, le «Made in Morocco» est certainement l’avenir. Nous sommes alors «tombés» sur un cas parfait, où notre vedette, Détroit Industries, est désormais la seule entreprise au Maroc et dans toute l’Afrique à produire du Film polypropylène cast, «CPP film».

Primordial chez les imprimeurs, dans l’industrie agroalimentaire et dans beaucoup d’autres branches comme l’automobile et le textile, entre autres, ce produit est importé à hauteur de plus de 50.000 tonnes en 2020. L’Espagne et l’Arabie saoudite représentent près de la moitié en tonnage de nos importations. C’est ainsi que Detroit Industries décide, en 2018, de prendre le taureau par les cornes et de commander une éco-extrudeuse, elle sera finalement livrée de Chine début 2020. Cet investissement d’un montant de 22 millions de DH, hors foncier (la nouvelle unité étant basée dans la même usine), permettra à l’entreprise de produire plus de 3.000 tonnes, soit 300 à 350 kg par heure, en 24 h/24 de film CPP par an.

C’est une aubaine pour les industriels confrontés à la hausse des prix du transport maritime et aux restrictions sanitaires. «Nous sommes les premiers, nous sommes les seuls à pouvoir le faire. Cette nouvelle unité a vu le jour fin 2020, parallèlement, nous sommes en train d’installer une métalliseuse, également la première au Maroc et en Afrique, ce qui nous permettra de faire du film métallisé. Une autre machine accompagne cet investissement, elle servira à fabriquer du film complexé et laminé», nous explique Farid Tamsamani, président de l’entreprise. 

Des prix 5 à 10% moins chers…

Le regard résolument tourné vers l’avenir, la confiance chevillée à la volonté d’aller de l’avant, le patron de l’entreprise ne cache pas son ambition de changer la donne sur le marché marocain, avec un produit 100% local et des prix 5 à 10% de moins que ceux de l’import. Mais, il n’y a pas que le prix, car le fait d’importer est devenu plus compliqué. Comment l’entité s’en sort, alors qu’elle, aussi, est importatrice de matières premières ? «Nous imputons une partie sur nos prix et une autre sur nos bénéfices. Vivement la fin de la crise !» Un mal pour un bien finalement : La hausse des prix du transport maritime et la rareté des matières premières sont, de ce fait, des facteurs favorisant la croissance de Detroit Industries. Elle, qui a décidé de carburer en plein confinement, assumant pleinement son risque d’investisseurs. «Nous avons trouvé une belle opportunité en cette crise pandémique», nous confie le patron de l’entreprise.

Un combat à armes égales

Concrètement, en plus des produits abrasifs et adhésifs, Delta Industries se positionne sur un segment encore vierge et où la demande est importante du fait de l’évolution des besoins de l’économie marocaine. «On se bat donc à armes égales avec nos concurrents étrangers. Le coût de la main-d’œuvre n’est plus un critère de compétitivité, car les machines sont automatiques», développe notre interlocuteur.

7 millions de DH pour réduire  le coût énergétique

Les nouvelles machines entrainent un fort besoin de puissance électrique supplémentaire de 1.630 kVA. Pour fournir une partie de ce besoin supplémentaire, Detroit Industries a choisi l’énergie solaire. Plus de 3.000 m² de panneaux photovoltaïques vont être installés. Ces 7 millions de DH ainsi investis proviendront pour 40% de financement bancaire et pour 30% d’une subvention de Maroc Vert. À terme, l’entreprise va pouvoir réduire son coût énergétique de 50%, renforçant ainsi sa compétitivité face à ses concurrents. 

Déjà une première commande de CPP !

Pendant notre visite de l’usine en compagnie de Farid Tamsamani, les commandes des clients étrangers étaient déjà emballées pour partir vers l’Autriche et les États-Unis notamment. Même pour le film CPP, la première commande d’un imprimeur de la place était déjà prête. Detroit Industries écoule son papier abrasif à l’étranger, alors que le ruban adhésif est le produit le plus prisé sur le marché local. «Pour le CPP, on commence bien, mais ce que je veux dire c’est que nos 3.000 tonnes sont très loin de représenter ce que le Maroc importe», conclut le président de l’entreprise.

Plus de 90% de CA réalisés  à l’export

Dans cette usine de 120.000 m², 80 ouvriers sont au labeur, et leur nombre atteindra les 120 avec cette nouvelle unité de production. Celle-ci va également apporter à Detroit Industries 50% de chiffre d’affaires additionnel, soit environ 150 millions de DH. «Plus de 90% de chiffre d’affaires est réalisé à l’export. Nous sommes justement restés vivants pendant la pandémie grâce à l’export. Nous exportons depuis 30 ans vers l’Autriche où nous dépassons le million d’euros de chiffre d’affaires. Nous exportons également vers les États-Unis, la France et on vend pas mal au Portugal, en Espagne, en Angleterre, en Belgique, mais aussi en Afrique, principalement au Mali», décrypte le président de l’entreprise installée depuis 1994 dans la zone industrielle d’El Jadida. Dans celle-ci, 126 entreprises et près de 10.000 ouvriers s’activent dans des secteurs très différents. Notons que l’usine a démarré avec une douzaine de personnes et un chiffre d’affaires de 45 à 50 millions de DH.

 

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Questions à Farid Temsamani, président de Detroit Industries

«Il y a une problématique de l’offre sur l’Afrique !»

C’est un risque d’investir en pleine pandémie ?

Oui, mais nous étions inscrits dans une démarche d’innovation depuis plus d’une douzaine d’années lorsque nous avions commencé à acheter des machines en Chine. Je peux vous affirmer que dans ce pays, les technologies ont énormément évolué.

Mais quand la crise est arrivée, nous avons tenté de la convertir en opportunité. Sur le marché local, la consommation a connu une évolution notable chez les grandes enseignes de bricolage. Les clients se sont rendu compte qu’on pouvait trouver, ailleurs qu’à la droguerie du coin, des prix moins chers et des produits plus compétitifs. D’ailleurs, chez certains de nos clients, les ventes ont même explosé en 2020.

Quel montage financier pour ce nouvel investissement ?

L’investissement a été fait selon un schéma classique. Nous avons recouru à Imtiaz de Maroc PME, initié par le ministère du Commerce et de l’industrie, qui clame d’ailleurs haut et fort la nécessité de substituer des produits locaux aux importations.

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1,2 milliard de DH d’importations en produits en polypropylène

Selon les chiffres de l’Office des changes, le marché des abrasifs flexibles représente environ 65 millions de dirhams d’importations pour 880 tonnes importées, c’est un marché considéré comme plutôt stable en volume. Les sociétés marocaines importaient jusque-là principalement d’Italie, de France, d’Allemagne et d’Espagne. Ces 4 pays, même s’ils représentaient encore 55% des importations en tonnage en 2020, voient leurs parts de marché respectives s’effriter, alors qu’ils détenaient encore 67% du marché en 2018. Dans le même temps, les importations depuis la Chine passaient de 8% en 2018 à 18% en 2020.

Pour les «masking tape», ces rubans adhésifs utilisés dans l’industrie, les importations représentent, en 2020, 5.388 tonnes pour une valeur de 128,5 millions de dirhams, c’est un marché en croissance : +7,6% en 2019, +1,5% en 2020 malgré la pandémie. Les importations sont réalisées principalement d’Allemagne et d’Italie, ces 2 pays représentant 62% des importations en 2020. Plus généralement, il s’agit de pays européens exportant dans le cadre de l’Accord de libre-échange. Les produits en polypropylène (CPP, CPE) représentent des montants bien plus significatifs. En effet, près de 1,2 milliard de dirhams ont été importés en 2020, représentant 52.319 tonnes. L’Espagne et l’Arabie saoudite représentent 41,3% en tonnage de nos importations. Plus généralement, nos fournisseurs sont européens ou moyen-orientaux.

Vous êtes présents au Mali. Qu’en est-il pour le reste de l’Afrique ?

Nous avions fait une tournée au Sénégal, au Gabon et en Côte d’Ivoire. Partout, nos produits étaient vivement recherchés. Mais l’infrastructure nous fait défaut. Les clients européens peuvent prendre des palettes depuis le Maroc, alors que pour les clients de l’Afrique subsaharienne, il faut commander au moins un conteneur entier. Il y a, en fait, une problématique de l’offre sur l’Afrique qui n’est pas au point au Maroc.

Que suggérez-vous pour y remédier ?

La constitution de consortiums d’exportations qui rassembleraient des industriels qui sont plus ou moins dans le même domaine. Je sais que le ministère de l’Industrie a essayé, mais les industriels marocains ont du mal à y parvenir.

Réalisé par Ilham Lamrani Amine

 

 

 

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