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Des experts décortiquent les enjeux géostratégiques des conflits dans le monde

C’est autour d’une thématique d’actualité qu’un parterre d’experts, de militaires, d’ambassadeurs et de responsables politiques s’est donné rendez-vous vendredi dans le cadre de la onzième édition des «Dialogues stratégiques». Cette plateforme d’analyse et d’échange Nord-Sud, organisée depuis 2016 par le Policy Center for the New South, en partenariat avec le Centre HEC de Géopolitique, a été consacrée au thème «L’impuissance de la puissance et l’Indo-Pacifique : contours et enjeux».

Des experts décortiquent les enjeux géostratégiques des conflits dans le monde
La 11e édition des Dialogues stratégiques : «L’impuissance de la puissance, l’Indo-Pacifique : contours et enjeux».

Le Policy Center for the New South (PCNS), en partenariat avec le Centre HEC de Géopolitique, a organisé, vendredi, la onzième édition des «Dialogues stratégiques» sur le thème «L’impuissance de la puissance et l’Indo-Pacifique : contours et enjeux». Ainsi, des experts, des chercheurs et d’anciens diplomates présents (du Maroc et de l’Hexagone) ont passé au peigne fin les dimensions stratégiques, les enjeux des conflits actuels, les conflits récents et anciens dans plusieurs régions du monde (pacifique, Golfe, Afrique du Nord, l’Afrique subsaharienne...). À cet égard, le rôle joué par les grandes puissances, que ce soit les États-Unis, la Russie ou l’Europe, a été analysé, au même titre que les forces émergentes et d’autres acteurs moins puissants.

Ainsi, différentes zones de conflit (Afghanistan, Irak, Syrie, Libye, Soudan, Mali…) ont été explorées avec un focus particulier sur le rôle joué par les militaires et les décideurs politiques ainsi que les entités comme les talibans. À ce titre, Pascal Chaigneau, directeur du Centre HEC de Géopolitique, s’est interrogé, à travers une analyse consacrée à ce foyer de tension : «Comment 41 pays qui représentent 70% du PIB brut n’ont-ils pas pu, en 20 ans, stabiliser l’Afghanistan, conquérir les esprits, les cœurs, au lieu de proposer uniquement des solutions militaires ?» «Les services pakistanais, qui sont un État dans l’État, redeviennent omniprésents. Le régime pakistanais se durcit, car il sait que ce sont ces services qui vont tenir la sécurité du pays», a-t-il commenté. Tout en mettant en avant les enjeux de puissance, il a défendu l’idée selon laquelle «plus la puissance mise sur pied est grande, plus elle multiplie le chaos».
Pour sa part, l’expert militaire français Olivier Tramond, général de Corps d’armée, a tenu à préciser que les militaires agissent sous les ordres des décideurs politiques. Selon lui, le tout militaire n’est qu’un aspect et ce sont les leaders politiques qui demandent aux forces armées d’intervenir. «Les armées ne peuvent pas tout faire. Il y a d’autres volets comme le développement, l’éducation, la sécurité», a-t-il rappelé.

«La guerre c’est l’échec de la puissance», a soutenu pour sa part Abdelhak Bassou, Senior Fellow, Policy Center for the New South. À son tour, il s’est demandé : «Comment les talibans ont-ils pu venir à bout des Américains et de toute une coalition ? À quoi servent ces puissances si elles n’arrivent pas à atteindre leurs objectifs ?» Il a cité l’exemple de la vaine guerre menée par la puissance militaire de l’Union soviétique qui en dix ans n’a pas pu atteindre ses objectifs en Afghanistan, appelant ainsi à un changement de paradigmes. «Il faut trouver d’autres termes pour qualifier les choses», estime-t-il. Il a ajouté dans le même ordre d’idées qu’il ne faut pas imputer les échecs des puissances militaires aux militaires eux-mêmes, «parce qu’on sait que les militaires ne sont que les outils des politiques».
Évoquant les moyens de pression qui pourraient être utilisés contre le gouvernement taliban, l’ancien diplomate Mohammed Loulichki, Senior Fellow, PCNS, a lui considéré que les talibans cherchent à tisser des liens avec les voisins stratégiques, la Chine, la Russie, le Pakistan, l’Inde et l’Iran, pour préparer le terrain à une reconnaissance internationale. Dans ce sens, il estime que la stratégie des talibans est de donner la priorité au front intérieur pour démontrer leur capacité de maîtrise du territoire.

Par ailleurs, s’agissant de la crise libyenne, Thierry Garcin, le producteur de l’émission géopolitique de France Culture, à travers une analyse portant sur «la Libye 10 ans après», a parlé d’échec international. «À la fin de son second mandat, Obama a regretté de s’être laissé entraîner par la France et la Grande-Bretagne en Libye… L’échec international en Libye s’explique par la prolifération des milices qui s’appuient sur des tribus et des combattants étrangers, 20.000 hommes selon l’ONU», a-t-il soutenu.

Pour sa part, Khalid Chegraoui, Senior Fellow PCNS, a abordé la thématique intitulée «De l’Afghanistan et la révélation des émergents du Moyen-Orient, de la Méditerranée au Golfe». Dans ce cadre, il a considéré que la vision du Sud est différente de celle de Washington. «L’Inde et la Russie sont des acteurs majeurs à nos yeux», a-t-il expliqué. Poursuivant son analyse, il a insisté sur la situation au Soudan. «La Russie est presque favorable au coup d’État au Soudan, qu’elle refuse de condamner, alors que les pays du Golfe et l’Égypte semblent eux aussi en faveur du coup d’État», a-t-il précisé, en ajoutant que le blocage du Port-Soudan qui est lié à une entité tribale, les Bedjas, est un fait important qui fait perdre au Soudan 65 millions de dollars par jour. 

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Un Partenariat mature

«Dialogues stratégiques» sont le fruit d’un partenariat arrivé à maturité entre Policy Center for the New South et le Centre HEC de Géopolitique. «Le partenariat avec le Centre HEC de Géopolitique a le souffle long. Il a survécu à l’épreuve du temps puisque nous nous retrouvons et publions conjointement pour la 11e fois depuis 2016. Le regard croisé de deux équipes, franco-européenne et maroco-africaine, apporte beaucoup de richesse aux débats. C’est un partenariat indispensable à la compréhension d’un monde complexe, mouvant, dont beaucoup de dynamiques nous échappent», a souligné Karim El Aynaoui, président exécutif de Policy Center for the New South, lors de la séance d’ouverture de la session de vendredi.

 

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