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«Haut et Fort» de Nabil Ayouch, en pleine compétition officielle du Festival de Cannes

Après une année blanche, à cause de la pandémie, le Festival de Cannes est de retour jusqu’au 17 juillet. La cérémonie d’ouverture, le 6 juillet, a connu la participation d’une pléiade de stars internationales qui ont foulé le tapis rouge, à leur tête le président du jury, le cinéaste américain Spike Lee. Cette édition se distingue par la présence marocaine dans la compétition officielle du festival à travers le film «Haut et fort» de Nabil Ayouch.

«Haut et Fort» de Nabil Ayouch, en pleine compétition officielle  du Festival de Cannes
Une scène du film «Haut et fort» avec les jeunes du Centre.

C’est une première pour le cinéma marocain que d’être en lice pour la Palme d’or du Festival de Cannes. Ainsi, «Haut et fort» de Nabil Ayoub se trouve parmi les 24 longs métrages qui sont en course pour le palmarès de cette manifestation cinématographique très distinguée dans le monde. Selon le réalisateur Nabil Ayouch, ce choix représente une grande fierté autant pour lui que pour l’équipe du film, ainsi que pour le cinéma marocain. «C’était une vraie et belle surprise pour nous tous».
Rappelons que le cinéma marocain avait déjà participé à des compétitions parallèles au Festival de Cannes, telles que «La Semaine de la critique», «Un certain regard» ou «La Quinzaine des réalisateurs». Cependant, cette présence en compétition officielle pour l’année 2021 témoigne de la notoriété du cinéma marocain et son rayonnement sur le plan international.
Par ailleurs, la compétition officielle connaît aussi la participation d’un film africain. Il s’agit de «Lingui, les liens sacrés» du Tchadien Mahamat Saleh Haroun racontant l’histoire d’une adolescente de quinze ans qui doit résoudre le problème d’une grossesse non désirée dans un pays où la religion et la loi s’opposent à l’avortement.
En revanche, en marge de la compétition officielle, deux autres films africains sont en course pour «La Semaine internationale des critiques», notamment «Une histoire d’amour et de désirs» de la jeune réalisatrice franco-tunisienne Leila Bouzid, et «Rich», le premier long métrage réalisé par Omar Zouhairi, ancien assistant-réalisateur de Yousri Nasrallah. 

 


Questions au réalisateur Nabil Ayouch

«Être dans la compétition officielle de Cannes est un vrai coup de pousse dans le parcours d’un réalisateur»â€‹

Quelle est votre impression en étant parmi les réalisateurs de la compétition officielle de Cannes ?
Je suis très heureux. Cela fait une trentaine d’années que je fais du cinéma et je suis allé à Cannes à différentes reprises, avec «Chevaux de Dieu» dans (Un Certain regard-2012) et «Much Love» (dans La Quinzaine des réalisateurs-2015). C’est vrai que pour tout jeune réalisateur, arriver en compétition officielle de Cannes, le plus beau et grand festival du monde, c’est quelque chose d’énorme. C’est un rêve. Mais en même temps, je n’avais pas envie d’en faire une obsession. Donc, quand j’ai appris que «Haut et fort» allait être en compétition cette année, beaucoup d’images et de souvenirs de cinéma se sont bousculés depuis le début de ma carrière et un immense bonheur m’a envahi.

Avez-vous une idée sur les films sélectionnés dans votre catégorie ?
Je ne peux pas vous dire grand-chose sur les autres films qui sont sélectionnés, parce que je ne les ai pas encore vus. Et je ne pense pas que je les verrai à Cannes, parce que le programme est assez chargé pour moi. Mais je peux dire tout simplement qu’il y a des réalisatrices et réalisateurs qui sont de grands noms du cinéma, dont je respecte le travail et dont certains ont déjà eu des Palmes d’or. Il y a des noms très connus des cinq continents. Je suis fier que le Maroc soit parmi cette sélection et que «Haut et fort» soit le seul film arabe qui représente toute la région du monde arabe.

Est-ce qu’il y a déjà des retombées concernant la sélection de votre film ?
Oui, les retombées sont là à partir du moment où la sélection est dévoilée. Parce qu’évidemment cela met la lumière très fortement sur tout film qui est en compétition officielle. Ensuite, il y a la vie du film qui se poursuit dans la foulée à travers les propositions d’autres festivals, l’aspect commercial, c’est-à-dire la vente du film… tout ceci vient grâce au choix du film dans cette compétition. C’est le cas pour «Haut et fort» et ceci va continuer au fur et à mesure que la date approche. De manière générale, être dans la compétition officielle de Cannes est un vrai coup de pousse dans le parcours d’un réalisateur.

Quelle est l’histoire de ce film qui a attiré l’attention de la commission de sélection ?
Le film raconte une histoire de transmission. Celle d’Anas, un ancien rappeur qui arrive un jour dans un Centre culturel de la banlieue de Casablanca de Sidi Moumen. Il trouve des jeunes filles et garçons qui ont plein de choses à raconter, mais n’ont pas forcément les outils pour le faire. Anas va leur apprendre à écrire le récit de leur propre vie, grâce au hip-hop, grâce au mot, à la parole, à la danse… Ce qui est très beau également dans le film est le fait que ces jeunes sont issus du Centre culturel Les Étoiles de Sidi Moumen de la Fondation Ali Zaoua. C’est-à-dire que c’est un casting non professionnel, y compris Anas, et je suis très satisfait et fier d’eux.

Comment vous est venue l’idée d’écrire cette histoire sur la jeunesse des quartiers périphériques de Casablanca, et du hip-hop comme voie d’expression ?
J’ai grandi à Sarcelles, en banlieue parisienne, à la fin des années 1970 et au début des années 1980. Cette période a correspondu à l’émergence du mouvement hip-hop en France. À Sarcelles, j’ai appris les arts dans un centre culturel, une Maison de la jeunesse et de la culture (MJC), «Le Forum des Cholettes».
Quand je suis venu à Sidi Moumen la première fois, au milieu des années 1990, je me suis aperçu que ce quartier de Casablanca souffrait des mêmes maux que le Sarcelles de mon enfance : absence de lien social, sentiment d’abandon de la part de ses habitants. J’y suis retourné ensuite pour tourner des scènes de mes films. Le quartier avait beaucoup changé. Les bidonvilles avaient presque entièrement été remplacés par les barres HLM. Seulement, en cours de route, les pouvoirs publics avaient «oublié» quelque chose d’essentiel : les arts et la culture. C’est alors que j’ai décidé d’y créer un centre culturel, en tout point similaire à la MJC de mon enfance. Un lieu de vie, mais aussi et surtout un lieu de liberté et de mixité. Cela fait des années que je fréquente ce centre régulièrement, que j’assiste aux cours, que je parle avec les jeunes, que j’arpente leur quartier, que j’essaye d’en savoir plus sur leur vie. Donc ce film est le témoignage de toutes ces années d’observation, d’inspiration sur le terrain, avec une démarche proche du réel que j’affectionne particulièrement dans la préparation de mes films. 

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