Babouches, tapis, caftans, poterie, selles de cheval, boîtes à bijoux… puis des foulards. Un beau voyage à travers ces splendides pièces et autres, dont chacune met en relief le talent et l’ingéniosité du peintre Boukhari. Ce dernier, avec une perfection inégale, y met tous ses sentiments et toute sa sensibilité qui diffèrent d’un tableau à l’autre. Car comme il l’explique, chaque pièce a été réalisée à un moment donné avec l’énergie de l’instant et l’âme des lieux. Ce qui donne l’impression d’une véritable pièce qu’on peut toucher et en sentir l’odeur. L’odeur d’un passé glorieux où nos femmes et maîtres-artisans avaient des mains d’orfèvre et travaillaient avec passion et conscience. Cette exposition montre la grandeur de cet héritage civilisationnel que l’artiste-peintre Hassan Boukari, en maître hyperréaliste, célèbre à jamais dans ses toiles avec énormément de précision et de délicatesse. Sa collection constitue, ainsi, une belle plongée dans notre artisanat, ses couleurs et ses parfums. Selon l’écrivain Abdelhak Najib, l’artiste transcende ces objets traditionnels marocains, «leur octroie cette lumière si ciblée qui fait ressortir à la fois le détail le plus infime, mais surtout la finesse de ce travail de précision digne de la haute joaillerie». Ce qui a valu au peintre Boukhari des expositions, aussi bien au Maroc qu’en Europe, puis de voir ses œuvres acquises par des institutions publiques et privées. Une preuve irrévocable de sa notoriété et de son dévouement à sa passion, car comme il le précise lui-même, «Il ne s’agit pas pour moi de reproduire ce qui est déjà beau. Mais j’essaie d’interpréter cette beauté pour donner à ces magnifiques symboles de l’art marocain traditionnel une autre visibilité. Il s’agit pour moi de rendre hommage aux artisans, aux mâalems et à cet héritage marocain si précieux». C’est pour cela que Abdelhak Najib l’a surnommé «L’orfèvre de la nature morte», car il voit en lui la perfection d’un artiste sincère et pointilleux dans son œuvre qui parle au visiteur et évoque une émotion dans son intérieur.
Entretien avec le peintre Hassan Boukhari
«Mes peintures sont le reflet d’une vérité, d’une sincérité et d’un dévouement continu»
Le Matin : Dans cette exposition, on remarque le sujet du foulard qui se répète. Pourquoi ?
Hassan Boukhari : J’ai insisté sur le foulard, car mon style est basé sur la répétition. Puis, le foulard pour moi représente un mystère, il représente la femme qui se cache derrière… C’est ce côté mystérieux et magique qui m’attire dans ce foulard et me donne envie de travailler dessus, de chercher ses mystères, puis d’aller toujours plus loin dans cette quête. On est là à la recherche d’une vérité qu’il faut lire dans le sens philosophique. Parce qu’un peintre est en même temps un poète et un philosophe, il est toujours en train de chercher quelque chose pour la raconter dans ses œuvres. Cette démarche donne envie d’aller le plus loin possible et de chercher une réalité. Si on n’a pas cet objectif, on va tomber dans la routine et la répétition. On va arrêter de créer et d’apporter la nouveauté. Donc, cette envie de creuser dans ce mystère à l’intérieur de nous-mêmes, plus qu’à l’extérieur, est très importante pour la vie d’un artiste.
C’est pour cette raison que vos peintures sont vivantes et respirent la vie ?
Mes peintures représentent une vérité, une sincérité et un dévouement continu. C’est ce qui fait la joie et le bonheur d’aller plus loin, de retrouver un lendemain meilleur et nouveau. Si on n’instaure pas ce mode de vie dans le travail, on va tomber dans l’ennui. C’est mon message à tout le monde. Si on veut renouveler sa vie, il faut toujours améliorer sa façon de voir et de traiter les choses. C’est pour cela que chacune de mes toiles ne ressemble pas à l’autre. Car chaque toile a sa vie, son âme, sa sensibilité… et le moment où elle a été réalisée.
Croyez-vous que l’environnement où travaille l’artiste est pour quelque chose dans l’aspect de l’œuvre ?
En effet, l’environnement et le cadre dans lequel travaille l’artiste jouent un rôle important dans le résultat final de la toile.
Changer le lieu est aussi important et donne une âme avec une autre énergie nouvelle et positive.
Il faut donc enrichir cette énergie avec les déplacements, les voyages, la façon de voir et d’apprécier les choses, de côtoyer les gens, puis chercher de nouvelles relations qui donnent d’autres énergies.
Est-ce que la pandémie a changé votre rythme de travail ?
Absolument pas, puisque la majorité de ces tableaux sont réalisés pendant le corona. Je n’ai pas arrêté de peindre même en pleine pandémie. Au contraire, l’artiste préfère l’isolement pour travailler.