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L’innovation, un enjeu majeur pour répondre aux besoins socio-économiques pressants

«Il s’agit avant tout d’une crise humaine qui appelle à la solidarité». Ces paroles sont celles du secrétaire général des Nations unies, António Guterres, qui incite le monde à faire preuve d’un esprit de solidarité sociale pour espérer sortir de cette crise d’abord sanitaire, puis économique et sociale, avec le minimum de dégâts.

Si les gouvernements et les acteurs économiques sont en pleine quête de pistes de relance post-Covid, l’économie sociale et solidaire (ESS) doit compter dans leurs calculs, car c’est une des réponses à la crise. En effet, au-delà de sa vocation de lutter contre la pauvreté et l’exclusion des populations vulnérables, l’ESS doit être pensée, aujourd’hui plus que jamais, comme un pilier de relance et une alternative garantissant une croissance durable et une résilience face aux crises. «L’ESS n’est pas une économie subsidiaire, c’est l’économie de demain, et la crise vient justement nous rappeler qu’il fait positionner l’ESS au cœur des politiques publiques», indique Ghizlane Maghnouj El Manjra, présidente de l’association Maroc Impact, invitée de «L’Info en Face» avec Rachid Hallaouy.
Ce même constat a été mis en avant par l’organisation internationale de travail qui avait travaillé sur le sujet et qui a publié un certain nombre de recommandations faisant de l’ESS un acteur clé pour façonner une reprise «centrée sur l’être humain et attentive à la planète». «Dans l’après-Covid-19, il sera nécessaire de promouvoir la coopération, en offrant les services de base d’une manière différente, en rétablissant et en créant des emplois décents grâce à des modèles d’organisation de la production divers et complémentaires. Les entreprises et les organisations de l’économie sociale et solidaire (EOESS), de par leur nature même, sont particulièrement adaptées pour contribuer à produire des biens et des services là où le travail est le facteur stratégique clé de la production», lit-on dans le rapport de l’OIT.

La solidarité, le mot d’ordre face à la crise
Dans cette guerre contre la Covid-19 et ses multiples répercussions, la solidarité a été la meilleure réponse et la plus noble des leçons que l’humanité puisse avoir. La pandémie a certes impacté toutes les composantes de l’ESS, plus particulièrement les coopératives et les associations, mais ces dernières se sont activées pour apporter des solutions pratiques aux citoyens. Les coopératives, quant à elles, se sont trouvées sclérosées économiquement, ce qui a induit de fortes difficultés de continuité. Pour les coopératives, il a fallu trouver une solution innovante, actionnable dans un temps très court et capable de massifier l’impact. L’idée était de savoir comment faire à la fois une contribution sociétale qui soit économiquement bénéfique. «Tenant compte de tous ces éléments, Maroc Impact a réussi à monter, dans un temps record, une opération de 5.000 paniers sourcée auprès de coopératives rurales avec le soutien du ministère de l’ESS et certains acteurs privés. Nous avons réussi à mobiliser près de 80 tonnes de produits de terroir achetés auprès du tissu coopératif avec des fois, la possibilité pour ces derniers de dégager des revenus pour toute une année», explique Mme Maghnouj El Manjra.

L’innovation, le point fort de l’ESS
L’expérience l’a bien montré ! Face à la pandémie et l’urgence sanitaire, beaucoup de solutions innovantes ont été l’œuvre des acteurs de l’écosystème associatif, des coopératives et des entreprises sociales, très généralement à un niveau local. Ainsi, il est clair que l’ESS peut favoriser non seulement la création d’emplois décents, mais aussi un développement plus centré sur les personnes au niveau local. En ce sens, les EOESS ont un grand potentiel d’innovation, car elles sont ancrées dans le territoire et voient le jour en réponse aux besoins ou aux opportunités des communautés. «Tout en étant ancrées au niveau local, les organisations de l’ESS jouent un rôle essentiel dans l’élaboration de solutions innovantes à des problèmes de nature mondiale, qui posent simultanément des défis à différentes communautés à travers le monde. Il est essentiel de promouvoir le partage des connaissances sur les solutions innovantes et les bonnes pratiques de l’ESS afin d’accroître la visibilité des initiatives et de promouvoir l’apprentissage mutuel et les échanges entre pairs», note l’organisation.

L’ESS, le cœur du made in Morocco
Consommer local et national pour encourager le made in Morocco, est l’un des défis des acteurs de l’ESS qui appelle même à réinventer ce concept. «Nous sommes aujourd’hui sur le concept de “remade morocco”. On s’interroge d’abord sur comment régénérer les territoires ? Comment on régénère l’humain ? L’ESS est une économise qui ruisselle sur les gens simples, qui sont les gardiens de notre patrimoine et de nos traditions et qui sont à la fois capables de produire de la richesse», note l’invitée de «L’Info en Face». L’ESS reste donc un des relais de croissance du made in Maroc. Reste à savoir comment les entreprises marocaines vont se saisir de cette opportunité pour élever les produits locaux à un niveau supérieur ! 


 Stratégie nationale de l’ESS 2018-2028

Le ministère de tutelle a revu sa stratégie ESS 2010-2020 et a lancé une étude pour l’élaboration d’une nouvelle stratégie et d’un plan d’action à l’horizon des dix ans à venir. Objectif : doter le Maroc d’un cadre stratégique d’affirmation et de développement de l’ESS qui répond aux enjeux suivants :

 •  Économiques : augmenter et rendre visible la participation de l’ESS au PIB et sa contribution en matière de création de richesse et d’emploi.

•  Sociaux : promouvoir la qualité de vie et améliorer la situation sociale de la population œuvrant dans ce secteur notamment par la couverture sociale.

• Juridico-institutionnels : assurer l’ancrage institutionnel et territorial du secteur de l’ESS et favoriser la convergence et la synergie des politiques publiques dédiées au développement de l’ESS.

• Environnementaux : participer à la bonne gestion et à la préservation des ressources naturelles.

•  Culturels : raviver, consolider et institutionnaliser la culture et les valeurs de la solidarité sociale.


Maroc Impact, un modèle de l’innovation sociale

L’Association Maroc Impact est une organisation ONG multi-acteurs dont l’objectif est de soutenir, structurer et développer l’écosystème de l’innovation sociale. Durant la pandémie, Maroc Impact a lancé, en partenariat avec la Fondation SMarT, l’initiative SAC (Solidaires avec les Coopératives). Il s’agit d’une initiative portant sur la distribution de paniers solidaires, 100% sourcés auprès du tissu coopératif rural de par leurs contenants et leur contenu. «Le principal but de cette initiative est de contribuer à construire une société dynamique, vivante, circulaire, régénératrice et une économie plus humaine. Maroc Impact se réjouit de la confiance et l’appui de nos partenaires de référence. Cela nous conforte dans la pertinence de notre démarche et nous challenge en même temps pour pérenniser ces initiatives et toucher le plus grand public et particulièrement les coopératives qui sont très vulnérables en temps de crise», a souligné Ghizlaine El Manjra, présidente de Maroc Impact. Il est à noter que cette opération s’inscrit dans le cadre de la volonté des parties prenantes d’apporter une contribution sociétale significative à des territoires et des populations défavorisées, et simultanément une réponse économique à des territoires impactés.


Qu’est-ce que l’ESS ?

L’ESS est un concept qui désigne les entreprises et les organisations (coopératives, GIE, associations, mutuelles ou fondations) qui produisent des biens, des services et des connaissances tout en poursuivant des objectifs à la fois économiques et sociaux, en favorisant la solidarité et l’innovation. Vecteur des valeurs de solidarité et de cohésion sociale, levier de développement durable territorial et vivier important d’innovations sociales et d’intelligence collective, l’ESS présente des atouts incontournables en tant que mode d’entrepreneuriat inclusif des jeunes et des femmes surtout en milieu rural. Cependant, et dans l’objectif de pérenniser et renforcer les différentes structures de l’ESS pour lui permettre de jouer pleinement leur rôle dans le développement économique et social du pays, il est nécessaire d’institutionnaliser cette approche et d’instaurer une bonne gouvernance à commencer par l’adoption de la loi cadre de l’ESS.


100 entrepreneurs sociaux en 2 ans, pari gagné

En 2019, Maroc Impact s’est fixé comme objectif de faire émerger 100 entrepreneurs sociaux, c’est aujourd’hui un défi relevé et l’association lance un nouveau challenge pour accompagner d’autres talents à travers différentes régions du Royaume. «On l’a dit et on l’a fait», commente fièrement la présidente de l’association. «Nous travaillons actuellement sur une cartographie de ces talents acteur de l’innovation sociale. La prochaine étape sera de mettre à leur disposition des dispositifs intelligents à travers notamment la création de plateformes phygitales maintenant à la fois un ancrage physique dans les territoires aux nouvelles technologies et à la connectivité», note Mme Ghizlaine El Manjra. Et d’annoncer que dans un an, l’association compte créer des hubs pionniers des talents singuliers du Maroc. L’objectif est d’accompagner des entrepreneurs sociaux, femmes rurales, startuppers, des jeunes en réinsertion, qui sont sur des modèles différents. Ces hubs serviront à faire de l’incubation et de l’accélération de ces projets. Ils serviront à créer des liens sociaux, du networking et surtout du «go to Market», explique l’invitée de Rachid Hallaouy. Rendez-vous donc pris pour mars 2022 !


Les paroles de Ghizlane Maghnouj El Manjra, présidente de l’association Maroc Impact, invitée de L'Info en Face

«Il est important de créer des indicateurs de prospérité qui sont plus dans le qualitatif et qui apportent davantage de bien-être aux citoyens»

«Nous sommes une ONG locale, nous sommes des patriotes et nous tenons à la souveraineté de nos dispositifs. Nous voulons créer notre propre modèle au lieu de les importer de l’étranger. Nous avons nos propres défis et devons travailler selon nos propres agendas, tout en restant ouvert sur la co-construction»

«Je souhaite rendre hommage à tous les entrepreneurs sociaux, les femmes rurales, les coopératives que nous accompagnons et avec lesquels nous travaillons en communauté avec un esprit collaboratif. Ma mission est de m’interdire de les décevoir !»

«Les acteurs de la société civile sont fiers de contribuer à faire avancer les choses avec nos petits moyens, mais de grandes ambitions»

«Pourquoi la loi sur l’ESS est toujours bloquée au secrétariat général du gouvernement depuis près de 5 ans ? Pourquoi aucun parti politique ne se saisit de ce dossier ? Pourtant, l’ESS est l’une des réponses au nouveau modèle de développement»

«Les entrepreneurs sociaux croient en un Maroc de résilience, de la coopération et de l’innovation sociale et surtout frugale»

«Maroc Impact fonctionne avec des fonds propres, de donation et de soutien d’acteurs privés déterminés. Nous n’avons reçu aucun financement d’aucune organisation internationale ni d’institutions publiques marocaines»

«L’ESS est une économie réelle ! Nous avons fait émerger 100 start-up avec quasiment 0 charge financière, mais beaucoup d’énergie, de mobilité, de l’intelligence collective et de l’identification des talents»


L’appel de l’OIT

«Les gouvernements devraient inclure les EOESS dans la conception et la mise en œuvre des mesures d’intervention et de reconstruction. Dans le contexte de l’après-crise, alors que les gouvernements approuvent des plans de relance pour soutenir la création d’emplois, la réduction de la pauvreté, le développement et la croissance économique, il est nécessaire de saisir les opportunités de passer à des économies plurielles, qui incluent et promeuvent des modèles d’entreprises alternatifs orientés vers les personnes et la planète. La promotion d’une vision transformatrice, telle que suggérée par l’Agenda 2030, et le fait de ne pas continuer le “business-as-usual” nécessitent l’adoption d’un nouveau paradigme de production et de consommation durables. Ce paradigme doit valoriser des aspects tels que l’économie circulaire, l’agro-écologie, l’innovation sociale, les circuits courts, la sécurité alimentaire, et les mécanismes financiers innovants comme les monnaies locales et la prise en charge des biens communs.»

 

 

 

 

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