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Marché à terme : La Chambre de compensation pour début 2022

La Chambre de compensation sera dotée d’une application développée en interne. L’information a été dévoilée, non sans fierté, par Mohamed Saad, directeur général adjoint en charge du pôle Ressources à la Bourse de Casablanca, lors de sa participation en juillet dernier, à la Matinale du Groupe «Le Matin» sur le thème «Souveraineté numérique et cybersécurité : enjeux de la transformation digitale». Parmi les missions de cette application, assurer une gestion efficace du risque à travers la surveillance des positions des intervenants sur le marché à terme. Aujourd’hui, trois responsables de ce chantier colossal dévoilent, en exclusivité pour «Le Matin», les détails de ce projet, qui permettra, à la fois, de maintenir la souveraineté numérique du Maroc dans le domaine et d’exporter, plus tard, un savoir-faire marocain digital conforme aux dernières avancées technologiques et réglementaires mondiales.

Marché à terme :  La Chambre de compensation  pour début 2022
Mohamed Saad, directeur général adjoint en charge du pôle Ressources à la Bourse de Casablanca. Mounia Mahli, responsable département Compensation. Younes Hmamouchi, IT Development Leader.

Le Matin : Pouvez-vous nous dresser un panorama des Systèmes d’information et du digital au sein de la Bourse de Casablanca ?
Mohamed Saad
: Le secteur du marché des capitaux et plus particulièrement la Bourse de Casablanca a toujours été très sensible au digital et aux technologies de l’information. D’ailleurs, l’outil de production au sein de la Bourse est incontestablement la Technologie qui doit être fiable, sécurisée et résiliente.
La Bourse de Casablanca est dotée pour sa plateforme de cotation électronique de l’une des solutions les plus performantes au monde. En réalité, il s’agit de la même solution qui est utilisée par la Bourse de Londres et celle de Johannesburg. Le management et les actionnaires de la Bourse de Casablanca ont toujours veillé à ce que les bonnes pratiques en matière d’IT soient implémentées. Aussi, depuis 2010, la triple certification ISO (9001, 27001 et 22301) a constitué un gage d’assurance aux investisseurs, émetteurs, sociétés de Bourse et autres Data vendors comme Refinitiv, Bloomberg, Interactive data et bien d’autres.
En matière de continuité d’activité, la rigueur instaurée par la certification ISO 22301 a permis à la Bourse de Casablanca d’assurer une résilience et une disponibilité de ses systèmes de 100% depuis cinq ans ! D’ailleurs, la simulation des comités de crise et exercices de continuité d’activité ont permis de basculer dans le télétravail au mois de mars 2020 (lors du déclenchement de la pandémie Covid-19) de manière fluide et sans aucun impact sur les activités de marché.
Ainsi, la Bourse de Casablanca entend étendre cette maturité à toutes les filiales, notamment la Chambre de compensation et la Société Gestionnaire du Marché à terme.
La souveraineté numérique est un sujet qui nous interpelle fortement, car nous y voyons aussi un sujet de développement d’une marque «Morocco Digital Nation». La Bourse de Casablanca investit dans les solutions dites «Open Source» pour la sécurisation des plateformes, mais aussi des applications de gestion comme celle qui équipera la Chambre de compensation que nous avons baptisée «FastClear».

Et en ce qui concerne justement le Système d’information de Gestion de la Chambre de compensation, quel est le champ fonctionnel de cette application et quel est son rôle ?
Mounia Mahli : L’existence d’une Chambre de compensation (CCP) permet de réduire le risque de contrepartie que supporteraient en son absence les intervenants sur le marché à terme. Pour cela, la CCP met en place un certain nombre de mécanismes notamment en termes de contrôle des risques. Elle exige généralement des participants qu’ils fournissent des dépôts de garantie pour couvrir leurs expositions actuelles et potentielles.
Fastclear permettra à la CCP d’assurer une gestion efficace du risque à travers la surveillance des positions de chaque intervenant sur le marché par type de produits, de contrôler quotidiennement son risque et de calculer les appels de marge pour couvrir son exposition. Cette solution sera interfacée avec la plateforme de trading afin d’intégrer toutes les transactions enregistrées sur le marché. Elle permettra également d’échanger avec les membres compensateurs sur leur position, sur leur niveau de risque et aussi exécuter les règlements des appels de marge sur le système des règlements géré par la Banque centrale.

Où en êtes-vous aujourd’hui dans la réalisation de cette solution ?
Mounia Mahli : Le projet d’implémentation d’une CCP fait partie des missions confiées à la Bourse de Casablanca. C’est un projet complexe, qui est géré dans le cadre strict d’une discipline de gestion de projet, se déroulant en plusieurs phases et qui aborde plusieurs axes : clients, fonctionnel, IT et réglementaire. D’une part, les développements en interne sont bien avancés. D’autre part, la Bourse de Casablanca a entamé une tournée auprès de futurs clients compensateurs afin de leur présenter les modalités du projet. Un processus d’accompagnement et de communication a été établi afin de mener à bien la préparation des clients sur l’ensemble des volets : technique, fonctionnel et règlementaire. Les prochaines étapes mettront l’accent sur le volet de validation du Règlement général avec les régulateurs.

À partir de quand cette application sera-t-elle entièrement opérationnelle ?
Mounia Mahli : La Bourse de Casablanca a opté pour une approche progressive en termes d’implémentation des produits dérivés. Dans un premier temps, elle lancera la négociation sur les Futures sur Indice. D’autres produits seront lancés en concertation avec les clients et les régulateurs. Parallèlement au projet de la CCP, la Bourse de Casablanca a initié la mise en place de l’infrastructure qui sera en charge de la gestion du marché à terme.
Il est à noter que la mise en place de la CCP ainsi que de la société gestionnaire du marché à terme sont des projets de place qui impliquent les régulateurs, Maroclear et plusieurs intervenants de marché. La Bourse de Casablanca a comme objectif de date de démarrage début 2022.

En tout, combien coûtera FastClear et quel aurait été son coût si elle avait été acquise auprès des  éditeurs internationaux ?
Mounia Mahli : Le coût total de FastClear sur 10 ans est de 8 millions de DH. Avant de prendre la décision d’un développement en interne, la Bourse de Casablanca a étudié plusieurs scénarii notamment l’acquisition d’une solution auprès d’un éditeur international. Sur 10 ans, cette option aurait eu un coût total de 88 millions de DH !

Une fois opérationnelle, cette application pourrait-elle être louée/vendue à son tour à des opérateurs, notamment africains ?
Younes Hmamouchi : Oui. Ceci est tout à fait envisageable. D’ailleurs c’est l’une des raisons principales qui a motivé le choix d’un développement en interne de la solution. Nous y avons tout de suite vu un avantage concurrentiel indéniable et une opportunité à saisir pour la Bourse de Casablanca et pour le Maroc. Nos choix technologiques ont naturellement été portés sur des technologies de pointe, matures et reconnues, comme le Framework. À la base, NetCore a été conçu par Microsoft pour être une multiplateforme et assurer ainsi une portabilité maximale aux applications développées. Nous avons aussi doté FastClear d’une interface utilisateur (UI) moderne, ergonomique et responsive. Nous l’avons également dotée d’une architecture qui respecte les bonnes pratiques et les principes SOLID du développement logiciel ainsi que de la capacité à tourner en mode multi-tenant (favorisant ainsi sa readiness pour tourner en mode Cloud/SaaS) ou multi-instance. Pour couronner le tout, FastClear est multilingue. En effet, elle interagit en plusieurs langues, dont l’arabe. L’utilisateur ou le client a même la main pour ajouter de nouvelles langues ou personnaliser ses traductions en run-time (à chaud) en cas de besoin. Comme tout logiciel évolutif, il est à noter que FastClear n’en est qu’à sa première mouture. De nouvelles versions sont prévues dans la road-map et qui vont élargir davantage le spectre des fonctionnalités offertes et donc augmenter ses chances à «l’export» – telles que l’ajout d’une couche d’API sécurisée, pour un interfaçage optimal et une intégration simple dans n’importe quel SI.

Parlez-nous de l’équipe qui travaille sur cet applicatif ?
Younes Hmamouchi : L’équipe qui travaille sur ce projet est multidisciplinaire. En effet, elle est composée de compétences IT et fonctionnelles principalement des profils seniors avec plus de 12 ans d’expérience dans le domaine de la Bourse et de la gestion du risque. La Bourse de Casablanca a également sollicité l’accompagnement d’une Chambre de compensation européenne, conforme à European Market Infrastructure Regulation (EMIR), dans le renforcement des capacités de ses équipes sur les aspects réglementaires, opérations, gestion des risques, architecture et intégration SI. De plus, la Bourse de Casablanca a signé un contrat avec Chicago Mercantile Exchange (CME) afin d’acquérir leur moteur de calcul des risques SPAN qui est utilisé dans la majorité des Chambres de compensation internationales. L’objectif de cette démarche est de répondre aux exigences des régulateurs et de respecter les standards internationaux applicables aux CCP, édictés par la Banque des règlements internationaux. Ceci étant dit, la Bourse de Casablanca a énormément capitalisé sur l’expertise développée par ses équipes dans la gestion d’un marché organisé cash ainsi que de son système de compensation. 


  Marchés à terme : quel rôle ? 

Les marchés à terme permettent de négocier principalement des contrats à termes fermes ou des contrats d’options. Les premiers, appelés également future, sont des engagements fermes d’acheter ou de vendre une quantité convenue d’un actif à un prix convenu et à une date future convenue. Les deuxièmes permettent d’avoir le droit et non l’obligation d’acheter ou de vendre un actif donné moyennant le versement d’une prime. «L’achat ou la vente de cet actif se fera à un prix déterminé, durant une période (options américaines) ou à une date précise (options européennes)», nous fait savoir Mounia Mhali. Ces contrats peuvent porter sur différents types de sous-jacents : devises, taux d’intérêt, actions, matières premières... Ces marchés comportent des risques. En effet, plus la durée de dénouement de l’opération est longue et plus les actifs échangés sont volatils, plus le risque de contrepartie est important. D’où le rôle d’une Chambre de compensation. Elle a pour mission de diminuer le risque de contrepartie lors d’une transaction financière en s’interposant entre les contreparties de cette transaction. Par conséquent, elle joue un rôle vital dans le renforcement de la stabilité financière d’une place et la réduction du risque systémique surtout en période de tension.

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