Ces articles* ont pour ambition de présenter le Maroc dans la grande aventure de l’évolution et mettre en perspective le rôle qu’a joué ce pays depuis 3 milliards d’années comme carrefour de cette chronologie. En remontant le fil conducteur de sa trajectoire, on découvre de belles histoires, de l’Univers, de la Terre, de la Vie et de l’Homme qui s’enchaînent et se déroulent dans le sens de l’expansion, de l’organisation la plus élaborée et de la complexité la plus grande. Des molécules s’empilent, s’entourent, se divisent et s’animent pour répandre la vie sur notre planète. L’histoire de l’Homme fait donc partie de cette immense chaîne évolutive déployée dans le temps et dans l’espace. L’Homme est la seule espèce réfléchie sur la planète Terre, capable de dévoiler les secrets de cette grande aventure de l’évolution et de son exploration qui se poursuit toujours.
Et voilà qu’à notre époque, après 3 millions d’années de son histoire, l’Homme moderne tente de conquérir l’espace lointain pour découvrir d’autres planètes, pour tenter peut-être de trouver une extension d’un habitat ailleurs que sur Terre et pour éventuellement rencontrer d’autres mondes et pourquoi pas d’autres vies, comme le suggèrent beaucoup d’astrophysiciens contemporains, qui prédisent que nous ne serions certainement pas la seule espèce intelligente dans cet immense Univers. Dans ce sens, plusieurs puissances de notre planète font la course contre la montre pour y arriver. Malgré l’avancée actuelle de la science et le progrès des hautes technologies, d’après ce que m’a confié un haut responsable de la Nasa, l’Univers n’est découvert qu’à peine à 3 pour cent. Il faudra encore beaucoup de temps dans l’avenir pour percer davantage son mystère.
Le point zéro de l’expansion de l’Univers observable se situe à partir d’une singularité du temps et de l’espace appelée par les physiciens «Big Bang». Durant une fraction de seconde, notre Univers va connaître une formidable expansion, où il passera de la taille de dix mille milliards de fois plus petit qu’un atome à celle de 200 milliards de galaxies, dont le diamètre de chacune est de plusieurs milliers ou millions d’années lumières. Sans le Big Bang, il n’y aurait pas eu d’atomes, sans atomes, il n’y aurait pas eu d’étoiles, sans étoiles, il n’y aurait pas eu de galaxies, sans galaxies, il n’y aurait pas eu de système solaire, sans système solaire, il n’y aurait pas eu la Terre, par conséquent la vie et l’Homme. Ce dernier est relié à l’Univers par une origine atomique et à la Terre par une origine chimique, l’Homme fait donc partie de cet immense environnement qui est l’Univers, la Terre comprise.
Entre le Big Bang et la formation de la Terre, 9 milliards d’années se sont passées dans un silence absolu de l’Univers. Puis, après la formation de notre système solaire il y a 5 milliards d’années, notre planète s’est formée il y a 4,6 milliards d’années, la seule où la vie se soit manifestée. Cette vie naquit d’acides aminés d’origine chimique terrestre ou extraterrestre, et se développa à partir de molécules, réunies en cellules, et dans le milieu aquatique il y a 3.8 milliards d’années (apparition de la toute première bactérie, support de tout organisme vivant). Et puis la matière devient de plus en plus organisée et compliquée et aussi diversifiée, avec le système de l’hérédité, d’abord l’ARN, puis l’ADN. La moitié du temps qui s’écoule ensuite est représentée par des êtres aquatiques unicellulaires sans noyau. Cette forme de vie a considérablement progressé, ensuite, en donnant d’autres êtres toujours aquatiques et toujours unicellulaires, mais cette fois-ci porteuses d’un noyau, lui-même renfermant un code de transmission d’informations.
Grâce à sa situation géographique, le Maroc est une terre privilégiée, pour l’étude de l’évolution de cet Univers, depuis les premiers instants de la formation de notre système solaire. Le site d’Oukaïmeden a été sélectionné par des chercheurs marocains pour l’observation de l’environnement du ciel lointain. Grâce à sa position géographique, à la qualité exceptionnelle de son ciel très dégagé et à, statistiquement, une très bonne proportion de nuits claires. Cet observatoire a vite suscité l’intérêt de la communauté internationale pour l’astronomie et les sciences de l’espace. Plusieurs découvertes y ont été ainsi réalisées, apportant des informations précieuses sur les comètes et les astéroïdes et sur les propriétés physiques d’un objet céleste, en provenance d’un autre système planétaire, le deuxième objet interstellaire découvert à nos jours et dénommé Comète Boriso. Grâce à son directeur, Zouhair Benkhaldoun, plusieurs conventions cadres ont été signées entre l’OUCA (Observatoire universitaire Cadi Ayyad) et des organisations internationales, y compris la Nasa, pour favoriser les échanges entre les chercheurs des deux signataires. Ces partenariats scientifiques ont permis par exemple de découvrir le plus célèbre des systèmes d’exoplanètes connus à nos jours, dénommé système Trappist, du nom du Télescope installé au Maroc jumeau d’un deuxième télescope installé lui au Chili. Plus récemment, ce même observatoire de l’Oukaïmeden a fait la découverte d’une autre exoplanète avec son étoile hôte dans la constellation de la Poupe, nommée en hommage à deux amoureux légendaires amazighs, Isli et Tislit, même l’astronomie n’échappe pas au romantisme, elle s’y identifie.
Le Maroc, lieu privilégié de collecte des météorites
Dans un autre volet de découvertes entre le ciel et la Terre, toujours relativement à sa position géographique, le Maroc est un lieu privilégié de collecte de météorites. Plusieurs tonnes de matières extraterrestres arrivent sur Terre chaque année, elles s’accumulent surtout dans des déserts chauds ou des zones froides comme l’Antarctique. Grâce à la chercheuse marocaine, spécialiste de renommée internationale, Hasnaa Chennaoui Aoudjehane, ont été trouvées au Maroc (dans le Sahara) de très nombreuses météorites qui constituent une richesse scientifique de par leur origine et leur rareté. Une de ces météorites, par exemple, trouvée à Tissint au Sud du Maroc, représente la cinquième chute observée au monde de météorites d’origine martienne.L’étude des météorites permet ainsi d’avoir accès directement à des roches de planètes figées à l’état initial de leur formation. D’après la revue Nature, une autre météorite d’origine martienne trouvée en 2011 à Bir Anzarane au Sud du Maroc, appelée Beauté Noire, contient ainsi des cristaux de Zircon, témoins de la formation initiale de la croûte martienne, (4,4 milliards d’années). Cette découverte est une vraie fenêtre temporelle sur l’héritage géologique de Mars, la Planète rouge. Ces sources extraterrestres que sont les météorites nous renseignent aussi, dit Hasnaa Chennaoui Aoudjehane, sur la provenance de notre eau terrestre d’origine cométaire, sur la formation de l’Univers, sur celle de notre système solaire et même sur les extinctions massives d’espèces, dont la disparition des dinosaures, il y a 70 millions d’années.* Il s’agit d’une série de 5 articles dont deux sont déjà publiés (www.lematin.ma).
Par Abdessamad Senhaji RhaziArchitecte de formation et paléontologue de passion. Membre de l’association ATTARIK Foundation for Meteoritics and Planetary Science
