Bien savoir ce qu’on mange durant le Ramadan
À la rupture du jeûne, les familles marocaines ont l’habitude de se réunir autour d’un repas riche et festif, durant lequel on sert les meilleurs mets. Certains plats et aliments sont omniprésents sur toutes les tables du Ftour. Le ministère de la Santé, à travers son portail Sehati, nous propose de mieux connaître les plats et aliments phare du mois sacré.
• La Harira : Cette soupe a comme base des sucres lents (vermicelles, farine et légumes secs : pois chiche, lentilles). De plus, la coriandre et le citron pressé sont une source de vitamine C (anti-fatigue) : à ne pas négliger en cette période ! Les soupes habituellement préparées correspondent à une part de féculent : un bol de Chorba, de Harira ou
de Tchicha apporte en moyenne 20 à 30 g de glucides.• Les dattes : habituellement consommées au Ftour, elles peuvent être mangées en équivalence avec les fruits frais. De plus, les dattes constituent une source intéressante de minéraux (magnésium, potassium, calcium) et de fibres (2 dattes peuvent remplacer un fruit frais).
• Les féculents : Habituellement (pâtes, riz…), ils peuvent être remplacés pendant le Ramadan par de la semoule, de l’orge, des vermicelles, du Boulghour (suivant les préparations privilégiées par la famille), certains de ces féculents ayant des index glycémiques bas.
• Le pain : Il garde toute sa place pendant ce mois. On peut aussi le choisir complet pour limiter les problèmes de constipation. En revanche, il faut limiter la consommation des viennoiseries (croissants, pains au chocolat…) car elles sont riches en sucres et en graisses.• Les boissons : On ne le dira jamais assez, seule l’eau est indispensable. On va également s’hydrater avec la soupe, le thé, le café, la tisane. Les sodas sont à éviter à cause du sucre et des bulles qu’ils contiennent. Ils s’ajoutent aux désordres intestinaux (ballonnements, gaz…) fréquents sur cette période et apportent inutilement du sucre.
N’oubliez pas de bien vous hydrater !
De l’eau, de l’eau et encore de l’eau. Pendant le mois du Ramadan, nous avons plus tendance à penser à manger plutôt qu’à boire, alors que l’hydratation doit être le mot d’ordre de cette période. Dès la rupture du jeûne, il faut penser à boire en grande quantité, sans oublier de s’hydrater juste avant la reprise du jeûne.
Aussi, il faut privilégier certains aliments ou préparations qui contiennent de l’eau tels que les soupes, les légumes, les fruits, mais aussi les laitages.On peut également consommer des boissons chaudes comme le café et le thé, mais mieux vaut ne pas trop en consommer le soir, cela pourrait perturber le sommeil.Enfin, les boissons de type sodas ou jus de fruits sont à consommer avec modération, étant trop sucrées.Pour éviter la soif et la fatigue, il ne faut pas prendre de grandes quantités d’aliments gras, sucrés et salés qui donnent soif parce que leur digestion est plus longue. Cela contribue donc à accroître la fatigue.Il faut également savoir qu’il ne sert à rien de boire tout un litre d’eau d’un coup. Il vaut mieux y aller par petites gorgées. Il est préférable de boire un verre d’eau toutes les 10 minutes, par exemple la première demi-heure, puis de boire de l’eau régulièrement pendant les heures autorisées.Femmes enceintes et allaitantes, mangez deux fois mieux !
Chaque année au début du mois du Ramadan, les femmes enceintes ou allaitantes se demandent toujours s’il n’est pas dangereux pour elles de jeûner. Elles sont souvent tiraillées entre leur envie d’accomplir leur devoir en tant que musulmanes et leur crainte pour leur santé et celle de leur enfant. En effet, le fait de s’abstenir de manger et de boire durant 16 longues heures pendant 30 jours pourrait provoquer une baisse de lactation chez la femme allaitante et pourrait avoir des conséquences sur le développement du fœtus chez la femme enceinte. Comme chaque femme est différente, il vaut mieux prendre l’avis d’un médecin généraliste ou d’une spécialiste d’allaitement pour les femmes allaitantes et du gynécologue qui suit la grossesse pour les femmes enceintes. C’est le seul moyen pour s’assurer que la femme ne souffre d’aucune maladie qui l’empêcherait de jeûner.
Lorsqu’elles ont l’autorisation de jeûner, les femmes enceintes ou allaitantes doivent avoir une alimentation diversifiée et saine et boire suffisamment d’eau pour se réhydrater. Garder une bonne ration de légumes et de fruits frais et secs comme les dattes. Les légumes doivent être bien lavés s’ils sont crus. Répartis sur le «Ftour» et le dîner, ils assurent un bon apport en eau, en fibres et en vitamines. Prendre de bonnes rations de féculents (riz, pâtes, pain complet, soupe «Harira» ou soupe blanche «Belboua»…) à chaque repas et surtout au moment du «Shour» pour assurer une bonne glycémie et de l’énergie toute la journée. Il faut aussi privilégier le poisson à la viande, car il est plus digeste, et prendre plus de viande blanche que de viande rouge. Toujours bien les faire cuire pendant la grossesse.Ce qu’il faut surtout éviter, essentiellement chez la femme enceinte, ce sont les fritures qui sont irritantes et indigestes et les sucres rapides (sucre, gâteaux, glaces, jus…), car ils font monter la glycémie, entrainent la soif et les coups de pompe dans les heures qui suivent la prise. En cas d’envie de sucre, il faut privilégier les sucres lents et opter pour des fruits secs qui sont énergétiques et nutritifs. Enfin, un conseil primordial est le repos. La future maman ou la jeune maman qui jeûne doit conserver suffisamment d’heures de sommeil.Conseils pratiques du ministère de la Santé
• Structurer les prises alimentaires autour de 3 repas, ce qui correspond à un petit déjeuner pris très tôt « Shour», un déjeuner (à la rupture du jeûne) et un dîner (dans la nuit) (3 h après Ftour).
• Éviter de grignoter continuellement tout au long de la soirée.• L’hydratation doit être suffisante et régulière sur cette période (eau, thé, café…).• Équilibrer les différents repas en veillant à apporter des aliments des principaux groupes (féculents, fruits et légumes, viande, poisson ou œufs, produits laitiers).• Penser aux plats qui vous permettent de manger un peu plus de légumes. Ne pas négliger les sucres lents (semoule, orge, vermicelles) qui sont trop souvent remplacés par des sucres rapides (gâteaux, pâtisseries, sodas…). Certains aliments seront à consommer avec plus de modération : comme les pâtisseries orientales, Msemen, les biscuits, les fruits oléagineux, les viennoiseries...• Éviter les aliments gras et les fritures qui causent des indigestions et des problèmes de poids. Préférez les cuissons au four, à la poêle et les grillades.• Éviter les aliments riches en sucre. Il est préférable d’éviter d’associer 2 sources de sucre (Chebbakia et crêpes au miel, par exemple) pour éviter les excès. De plus, le goût sucré dans la bouche entraîne une sécrétion d’insuline qui redonne de l’appétit même quand on a plus faim.•La consommation du thé pendant le Shour est déconseillée, car il stimule les urines et donc favorise la perte des sels minéraux précieux dont l’organisme a besoin au cours de la journée, et peut induire un état de déshydratation, surtout en période de chaleur.• Éviter les boissons comme les sodas, car ils sont souvent riches en sucre, et donnent des gaz. Il est préférable de boire des jus de fruits naturels et surtout de l’eau plate.Entretien avec Valérie Aliguieri, diabétologue, médecin généraliste, nutritionniste
«Le réel problème n’est pas de consommer des mets sucrés et salés, mais plutôt le fait d’en consommer trop et chaque jour sur une longue période»
Le Matin : Durant les semaines qui précèdent le mois du Ramadan, de nombreuses personnes commencent la préparation d’un «stock» de mets sucrés et salés pour passer ce mois. Que pensez-vous de cette habitude ?Valérie Aliguieri : La période du jeûne du Ramadan pourrait être l’occasion d’améliorer les habitudes alimentaires et de se concentrer sur des aliments de bonne qualité nutritionnelle. Durant le Ramadan, il faudrait privilégier des aliments sains et suffisamment énergétiques pour permettre à notre organisme de supporter l’abstinence de la journée.
Malheureusement, on assiste bien souvent à la situation inverse, et une fois le jeûne rompu la consommation de mets sucrés et salés peu diététiques va bon train.Le fait de préparer et de stocker à l’avance toutes sortes de spécialités telles que «Briwates» salées ou sucrées, «Chabakia», «Sellou», «Msemen» ou «Baghrir» facilite et pousse à leur consommation quotidienne et en trop grande quantité. La privation de la journée fait qu’à la rupture du jeûne, il est difficile de se limiter et d’éviter de consommer ces mets de façon excessive.Ces spécialités certes délicieuses, sont malheureusement très grasses, car cuisinées traditionnellement en friture. Même si par souci de réduire la matière grasse de nombreuses personnes tentent de les cuire au four, la garniture et les feuilles de pastilla n’en restent pas moins très grasses.Quant aux gâteaux tels que la «Chabakia» ou les «Briwates» sucrées, difficile de les cuisiner sans friture et qui plus est, le miel utilisé pour les confectionner est souvent plus proche d’un caramel fait à base de sucre raffiné que d’un bon miel.Quelles sont les conséquences de mauvaises habitudes alimentaires durant le mois du Ramadan sur la santé ?
La consommation excessive de spécialités très grasses et sucrées aussi bien traditionnelles que celles vendues en pâtisseries telles que viennoiseries, chaussons, tartes salées se solde classiquement par une prise de masse grasse et donc de poids parfois conséquente à la fin du mois. Ceci d’autant plus si l’on réduit l’activité physique, voire la stoppe complètementLes excès en aliments gras et sucrés peuvent se traduire au niveau biologique par une élévation des lipides sanguins : LDL cholestérol, triglycérides ou encore de la glycémie ou des transaminases hépatiques (enzymes du foie).Les chiffres tensionnels aussi peuvent se trouver impactés et modifiés à la hausse.Le réel problème n’est pas de consommer ces mets, mais plutôt le fait d’en consommer trop et chaque jour sur une longue période.Quelle est la composition idéale des différents menus qui peut satisfaire le jeûneur, sans nuire à sa santé ?
Finalement pendant la période du jeûne ce sont essentiellement les horaires des repas qui sont différents. La composition des menus ne devrait pas se trouver modifiée.Chaque repas devrait apporter des aliments essentiels tels que fruits et légumes variés et de saison, des féculents autres que pain, «Batbot» ou crêpes. Je conseillerais plutôt la «Harira», les légumes secs, le riz, les pâtes, le «Boulghour». Enfin, il est essentiel de ne pas négliger les aliments protéiques de bonne valeur nutritionnelle tels que les œufs, les viandes ou poissons, le lait et les fromages.Ainsi, on peut faire un Ftour léger sur le modèle du petit déjeuner habituel : boisson chaude sans sucre ou peu sucrée, pain, beurre ou huile d’olive, œuf ou fromage et fruit frais. Inutile de prendre de grandes quantités puisqu’un dîner sera servi dans les deux heures suivantes. Celui-ci se présentera comme votre déjeuner habituel c’est-à-dire un plat complet comprenant viande ou poisson, légumes, et féculents puis un laitage (fromage ou yaourt) et un fruit frais.Quant au Shour du petit matin, il pourrait être une mixe entre votre dîner et petit déjeuner habituels. L’essentiel sera qu’il apporte des sucres lents et des protéines : on pourrait imaginer un bol de «Hassoua» et un mélange fruits frais, fruits secs ou encore des œufs brouillés, ou un jambon de dinde, du pain et un fruit, d’autres pourraient opter pour un bol de lait, céréales et fruits secs… Les formules sont variées.Il n’y a pas de règle unique et chacun doit adapter son repas à ses besoins et à ses goûts.Quels conseils pouvez-vous donner aux jeûneurs pour passer un Ramadan en bonne santé ?
Manger sainement et juste à hauteur de ses besoins, très bien s’hydrater en dehors des repas avec de l’eau, des tisanes ou des bouillons et non avec des jus à profusion qui sont trop glucidiques et favorisent aussi la prise de poids. Il faut boire régulièrement verre par verre entre le Ftour et le Shour.Et surtout bien dormir. Parfois privilégier le sommeil à la nourriture peut s’avérer plus efficace pour être en forme le lendemain. Inutile de chercher à faire des «réserves» pour la journée à venir, manger juste à hauteur des besoins suffit.Manger peu, mais des aliments énergétiques et de bonne valeur nutritionnelle comme nous l’avons déjà vu : légumes, fruits frais, fruits secs, fruits à coque (amandes, noix,) légumes secs (lentilles, Harira) et aliments céréaliers (riz, pâtes, semoules), œufs, viandes maigres, poissons…Et pour les personnes âgées, diabétiques, ou les femmes enceintes qui peuvent jeûner, que pouvez-vous leur conseiller ?
Les mêmes consignes que pour les autres personnes en ce qui concerne les repas. Rester sur une alimentation équilibrée et saine. Elles doivent bien s’hydrater, car le risque de déshydratation est très grand pour les personnes âgées et les diabétiques. Les hypoglycémies également sont délétères pour ces personnes plus fragiles, il est donc essentiel de les repérer. Tremblements, sueurs, fringales, flou visuel, troubles de l’attention ou perte de connaissance doivent être signalés au médecin traitant. Il faudrait garder en tête que préserver la santé reste une priorité.Enfin, que pouvez-vous dire aux jeunes adolescents qui feront le Ramadan pour la première fois cette année ?
Les adolescents sont en pleine croissance, leurs besoins journaliers sont très élevés. Je conseillerais trois repas si possible avec un Shour bien énergétique, mais pas de gâteau (cake, biscuits) ou de boisson sucrée qui risqueraient de provoquer un coup de pompe en fin de matinée. Les adolescents sont scolarisés, ils doivent maintenir leurs capacités intellectuelles la journée. Pour pouvoir garder un bon niveau de concentration, le sommeil est essentiel donc il faut éviter de veiller et faire une sieste chaque fois que possible. Je leur rappellerais de bien boire de l’eau et non des jus ni des sodas.Chacun à ses propres capacités à endurer le jeûne pour une première fois. Peut-être certains seront plus en difficulté et il pourrait être nécessaire de prendre l’avis d’un médecin en cas de malaise ou autre trouble. Par exemple, certains enfants ont un poids bien en dessous des courbes de référence, il faut en tenir compte et surveiller qu’il n’y ait pas de perte de poids supplémentaire…