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Les prérequis pour un écosystème digital au service de l’économie

Cadre juridique adapté, engagement des acteurs, fort leadership, formation des compétences et financement des startups. Ce sont là les principaux prérequis qui ont émergé, vendredi dernier, lors de la deuxième conférence du Cycle de Matinales du Groupe Le Matin autour des «Nouveaux enjeux de la digitalisation» et consacrée au thème «Digital : quel écosystème pour dynamiser l’économie ?» Si ces prérequis ont fait l’unanimité, il en est de même pour l’urgence et la nécessité d’agir vite, très vite !

Le Cycle de Matinales du Groupe Le Matin autour des «Nouveaux enjeux de la digitalisation» se poursuit. La deuxième conférence a été organisée, vendredi 2 juillet, sur le thème «Digital : quel écosystème pour dynamiser l’économie ?» La rencontre avait pour objectif de dresser un bilan sur l’état de la digitalisation au Maroc et d’identifier les prérequis nécessaires à un écosystème digital capable de participer à la relance économique (www.lematin.ma).
«Pour une économie comme la nôtre, il est important de faire un examen de conscience et d’analyser les effets de la disruption digitale sur ses composantes, d’évaluer les éléments de notre résilience et de décider comment nous allons appréhender ce digital disruptif, mais aussi et surtout intrusif. Nous pouvons penser notre digital, travailler sur les prérequis, les étapes préalables et questionner le digital que nous voulons, pour savoir quoi faire afin qu’il soit inclusif», a déclaré Mohammed Haitami, PDG du Goupe Le Matin, lors de son discours donnant le coup d’envoi de cette deuxième Matinale.
À n’en point douter, le premier prérequis est celui de la rapidité. En effet, les participants à ce rendez-vous se sont accordés à dire que le facteur temps est important dans cette démarche. Il en va de la compétitivité du pays et de sa souveraineté en matière de Big Data et de cybersécurité.
«Il faut faire vite pour éviter de prendre du retard et de se retrouver, dans 5 ans, au même niveau qu’aujourd’hui, avec les mêmes problématiques et questionnements entre les mains», prévient Meriem Zaïri, présidente de la commission Startups et Transformation digitale à la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM).

Le deuxième prérequis est celui d’une «infrastructure réglementaire adaptée», recommande Sarina Amani, Operations Manager Smart Cities chez Plug and Play Tech Center. L’État doit accompagner ce mouvement à travers «des lois qui favorisent la croissance, pas la freiner», lance Zouheir Lakhdissi, CEO de Dial Technologies et membre de l’APEBI. Or, fait remarquer ce serial entrepreneur, «la pratique veut que tout soit interdit au Maroc, sauf autorisation. Nous avons vu cela lors de l’arrivée des cryptomonnaies ou encore la reconnaissance faciale comme preuve de vie pour la gestion des retraites». Pour les quatre intervenants à cette Matinale, cet état d’esprit doit changer et la confiance être de mise afin de réussir une digitalisation en mesure de favoriser la relance économique du pays. Et l’État a prouvé qu’il était en mesure d’instaurer ce climat de confiance lorsque, pour la gestion des aides Covid-19 accordées aux citoyens, il a préféré la méthode déclarative. «Adopter une stratégie basée sur la confiance n’exclut pas le contrôle a posteriori», nuance Lakhdissi.
Le troisième prérequis est celui de la mobilisation, en même temps, de tous les acteurs concernés. Car si l’État doit jouer son rôle de facilitateur, les grandes entreprises et entrepreneurs doivent tous s’engager en même temps, sous la houlette d’un fort leadership. Car si la digitalisation est inclusive par sa finalité, elle doit l’être aussi dans sa démarche. Tous les acteurs doivent donc y prendre part, admettent les intervenants.

Les compétences, à dénicher et à former, ressortent comme le quatrième prérequis pour un écosystème digital efficace. Car avec la digitalisation, de nouvelles compétences doivent être acquises. «L’intelligence artificielle, par exemple, aide aujourd’hui plusieurs médecins à identifier et traiter certaines pathologies. Ces médecins ont été formés aux nouvelles technologies», déclare avec conviction Chakib Achour, directeur marketing et stratégies de Huawei Technologies au Maroc.

Pour lui, un écosystème digital commence également par une bonne connectivité, et c’est le cinquième prérequis. «Il y a encore des problèmes de connectivités au Maroc. Cela dit, l’Agence nationale de réglementation des télécommunications a réalisé plusieurs progrès», reconnait Achour. En effet, l’infrastructure est importante, car elle permet le développement de la Big Data, de l’intelligence artificielle et du Cloud.
Sixième prérequis, et non des moindres, le soutien des startups. Sur ce registre, le financement et l’accompagnement ne sont pas encore assez développés au Maroc, affirme Sarina Amani. Pour autant, les startups ne doivent pas baisser les bras. Bien au contraire, elles doivent voir grand dès leur création : en plus de s’adresser au Maroc, ces startups, les solutions qu’elles proposent et les expertises dont elles recèlent doivent être en mesure de s’exporter, recommandent les participants à la Matinale. 

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Discours de Mohammed Haitami, président-directeur général du Groupe Le Matin

«Nous pouvons penser notre digital, travailler sur les prérequis, les étapes préalables et questionner le digital que nous voulons»

Pour une économie comme la nôtre, il est important de faire un examen de conscience et d’analyser les effets de la disruption digitale sur ses composantes, d’évaluer les éléments de notre résilience et de décider comment nous allons appréhender ce digital disruptif mais aussi et surtout intrusif.

Bienvenue à cette deuxième matinale d’une série de 4, autour des enjeux de la digitalisation. Le sujet d’aujourd’hui qui est : «Digital, quel écosystème pour dynamiser l’économie ?» comporte trois mots-clés : digital, écosystème et économie. Cette triptyque suscite en moi quelques interrogations que je voudrais partager en guise de plantation du décor.
D’abord «économie» : d’aucuns pourraient comprendre qu’il s’agit du seul tissu des entreprises. Économie veut dire pour moi toute la société, l’État, les ménages, les entreprises, etc. L’économie c’est aussi lié au revenu, donc à tous.
Le terme «écosystème» me pose problème quand je pense au digital. Pourquoi ? Le digital n’est-il pas le «disrupteur» en chef de nos économies ? Or si vous cherchez la définition du terme écosystème, vous aurez quelque chose comme ça : «C’est un ensemble d’être vivants qui vivent au sein d’un milieu ou d’un environnement spécifique et interagissent entre eux au sein de ce milieu et avec ce milieu.» «Écosystème» sous-entend donc harmonie, équilibre, alors que «Digital» sous-entend disruption.
Mon autre interrogation concernant l’écosystème est son caractère inclusif : tout baigne dans un même environnement et se complète et il y a une sorte de complémentarité, même dans les écosystèmes dits sauvages, puisqu’il y a une régulation par la prédation. Alors que dans la disruption, il y a un brin d’exclusion. La situation se complique pour moi lorsqu’on me parle d’écosystème digital pour «dynamiser» l’économie ! Voilà un disrupteur qui vient dynamiser l’économie !
Selon mon humble compréhension, toute disruption engendre des victimes, peut-être même plus nombreuses que les survivants. Il s’agit donc de voir jusqu’où cette disruption peut aller. Je crois que pour une économie comme la nôtre, il est important de faire un examen de conscience et d’analyser les effets de la disruption digitale sur ses composantes, d’évaluer les éléments de notre résilience et de décider comment nous allons appréhender ce digital disruptif mais aussi et surtout intrusif.
Les conditions sont-elles réunies aujourd’hui pour s’y lancer corps et biens ? Je vous cite quelques réflexions de contexte : il semble que les jeux soient faits et que des suprématies soient irréversiblement installées et opèrent selon un cercle vertueux qui les accentue de jour en jour. Francis Fukuyama parlait il y a une trentaine d’années déjà de «la fin de l’histoire». Il suffit de voir les pays de l’OCDE essayer d’imposer une taxation, pas de 40%, pas de 30% ou 25%, mais seulement de 15% à ces géants GAFA et autres. Faut-il pour autant dire qu’il faut abandonner le digital ? Ce serait suicidaire, pas réaliste et d’ailleurs impossible.
En revanche, nous pouvons penser notre digital, travailler sur les prérequis, les étapes préalables et questionner le digital que nous voulons. Notre système d’éducation, notre R&D dans les universités et les grands groupes, nos infrastructures, notre connectivité et son coût, etc. Dans quelle logique de création de valeur s’inscrira-t-il ? En quoi accélèrera-t-il la réduction des inégalités ? Que faire pour qu’il soit inclusif ? Ne court-on pas le risque, si l’on n’y prête pas attention, de créer plutôt un microcosme digital au lieu d’un écosystème digital ? Comment le digital peut-il aider à éradiquer, ou du moins diminuer, les poches de rente ? On dit que digital et rente ne cohabitent pas ! Par quoi faut-il commencer ? Faut-il digitaliser le parcours pour obtenir un extrait d’acte de naissance ou faut-il s’interroger sur les raisons pour lesquelles ce fonctionnaire exige cet extrait d’acte de naissance et les voies et moyens pour supprimer à la base cette exigence ?
Ce sont autant de questions qui m’ont taraudé l’esprit en pensant à l’ouverture de cette matinale. Je suis conscient que je complique la tâche un peu à nos invités, mais je suis sûr qu’ils et elles sauront me convaincre que notre pays peut s’inscrire dans une digitalisation qui dynamisera son économie. 

https://www.youtube.com/watch?v=2O_z988hacE&ab_channel=MATINTV

L.M.

 

 

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