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Le sevrage tabagique, une mission difficile, mais pas impossible !

Le monde entier a célébré, hier, lundi 31 mai, la Journée mondiale sans tabac, sur le thème «Arrêtez de fumer, soyez parmi les gagnants». Il s’agit d’une occasion pour encourager les fumeurs à renoncer au tabac dans le but de préserver leur santé et améliorer leur vie en général. En effet, la dépendance à la cigarette fait partie des premières causes de mortalité à l’échelle mondiale avec environ 8 millions de morts par an, dont environ 1,2 million sont des individus exposés au tabagisme passif.

Le sevrage tabagique, une mission difficile, mais pas impossible !

Sevrage tabagique, des effets bénéfiques immédiats sur la santé

D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’arrêt du tabac entraîne des effets bénéfiques immédiats et à long terme. «Vingt minutes à peine après avoir arrêté de fumer, le rythme cardiaque baisse. Dans les 12 heures, le taux de monoxyde de carbone dans le sang revient à un niveau normal. En 2 à 12 semaines, la circulation sanguine s’améliore et la fonction pulmonaire augmente. En 1 à 9 mois, la toux et les difficultés respiratoires diminuent. En 5 à 15 ans, le risque d’accident vasculaire cérébral est réduit à celui d’un non-fumeur. En 10 ans au maximum, le taux de mortalité par cancer du poumon est ramené à la moitié de celui d’un fumeur. En 15 ans au maximum, le risque de maladie cardiovasculaire est réduit à celui d’un non-fumeur», explique l’OMS.
Afin d’aider les consommateurs de tabac à arrêter, l’Organisation a créé des solutions numériques telles que l’«Access Initiative for Quitting Tobacco», une initiative pour l’accès à des ressources en vue du sevrage tabagique, qui propose notamment un libre accès à des consultations en ligne. L’Organisation s’est associée à des entreprises de technologie telles que Facebook, WhatsApp et Soul Machines pour sensibiliser les consommateurs de tabac et les aider à arrêter grâce à des chatbots et à des agents de santé virtuels. 


Questions à Dr Latifa Belakhel, chef de la Division des maladies non transmissibles au sein de la Direction de l’épidémiologie et de lutte contre les maladies au ministère de la Santé

«Le tabac est responsable de 35,4% des cancers chez l’homme contre 4,8% chez la femme»

Tout d’abord, nous souhaiterions que vous nous rappeliez les derniers chiffres concernant le tabagisme au Maroc...
La surveillance épidémiologique est l’un des principaux axes de la lutte contre le tabagisme du programme du ministère de la Santé. À cet effet, le ministère de la Santé réalise des enquêtes de façon régulière.
Il est à noter ainsi que la prévalence du tabagisme au Maroc est de 13,4% chez les adultes âgés de plus de 18 ans, dont 26,9% des hommes et 0,4% des femmes d’après l’enquête STEPS sur les facteurs de risque des maladies non transmissibles 2018 du ministère de la Santé. La prévalence du tabagisme chez les jeunes en milieu scolaire âgés de 13 à 15 est de 6%. Enfin, environ 35,6% de la population est exposée au tabagisme passif dans les lieux publics et professionnels.

Quels sont les effets du tabac sur la santé et quelles sont les maladies provoquées par la cigarette ?
L’usage du tabac nuit à presque tous les organes du corps et provoque de nombreuses maladies, notamment les cancers, les maladies coronariennes, les broncho-pneumopathies chroniques obstructives, les accidents vasculaires cérébraux, les maladies respiratoires et les effets indésirables sur la reproduction. Le tabagisme de la femme enceinte augmente le taux de complications au cours de la grossesse. Les complications néonatales et pédiatriques de l’exposition à la fumée de cigarette incluent le syndrome de mort subite du nourrisson et l’asthme.
On sait que le tabagisme aggrave l’asthme chez l’adulte, limitant l’activité, contribuant à l’incapacité et aggravant le risque d’asthme grave qui requiert des soins d’urgence. Les enfants d’âge scolaire dont les parents sont fumeurs sont exposés aux effets nocifs du tabagisme passif et au risque de survenue ou d’aggravation d’un asthme du fait de l’inflammation des voies aériennes menant aux poumons.
Les fumeurs ont une probabilité 22 fois plus élevée de développer un cancer pulmonaire au cours de leur vie que les non fumeurs.
Au Maroc et selon le Registre des cancers du Grand Casablanca édition 2016, quelque 18,5% des cas de cancers enregistrés sont liés au tabac tous sexes confondus. Le tabac est responsable de 35,4% des cancers chez l’homme contre 4,8% chez la femme.

Comment peut-on expliquer la difficulté du sevrage tabagique ?
Il est difficile de renoncer au tabac, car la dépendance tabagique fait intervenir plusieurs phénomènes comportementaux, cognitifs et physiologiques. Nous avons donc une dépendance psychologique et comportementale, nous avons aussi l’anxiété et la dépression associée aux autres dépendances, etc.
Mais d’après l’OMS, il est amplement attesté que c’est possible. Il existe de nombreux moyens efficaces pour renoncer au tabac et grâce à un bon suivi par un spécialiste.

Quelles sont les mesures prises par le ministère pour lutter contre le tabagisme, notamment au niveau des établissements scolaires et lieux de travail ?
Le ministère de la Santé, à travers le Programme national de lutte contre le tabagisme, a pris énormément de mesures pour lutter contre ce fléau. Ce programme vise le renforcement de la communication à travers la réalisation de campagnes annuelles de sensibilisation aux méfaits du tabagisme ainsi que le renforcement du suivi évaluation à travers la réalisation de quatre enquêtes périodiques sur le tabagisme des jeunes de 13-15 ans en milieux scolaires (Global Youth Tobacco Survey GYTS) en 2001, 2006, 2010 et 2016.
Le programme prévoit également la formation des professionnels de santé en techniques d’aide au sevrage tabagique et la mise en place de la consultation d’aide au sevrage tabagique au niveau des établissements de soins de santé primaires et au niveau hospitalier.
Des interventions innovantes ont été entreprises dans ce domaine, notamment l’institutionnalisation du programme «Collèges et Lycées sans tabac» et l’initiative «Entreprises sans tabac» qui a connu l’adhésion de nombreuses entreprises qui ont participé activement à la sensibilisation aux méfaits du tabac et l’aide au sevrage tabagique de leurs employés.
En outre, le ministère de la Santé lance une nouvelle initiative, «Administration publique sans tabac», dont le but est de créer des institutions modèles constituant un espace de vie essentiel à l’épanouissement et au bien-être de leurs personnels et contribuant à la lutte contre ce fléau par la promotion d’un environnement sans tabac. Le ministère s’engage à accompagner toutes administrations publiques qui le désirent dans cette démarche afin de faire de leur lieu de travail un environnement sain et sans tabac. 


«S’engager à arrêter», la campagne mondiale de l’OMS

À l’occasion de la Journée mondiale sans tabac 2021, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a récemment lancé une campagne mondiale d’un an baptisée «S’engager à arrêter». Par diverses initiatives et solutions numériques, cette campagne vise à soutenir, dans le monde entier, 100 millions de personnes qui tentent de renoncer au tabac. Elle contribuera à l’instauration d’environnements plus sains, propices à un arrêt du tabagisme, et ce en plaidant pour des politiques strictes visant l’arrêt du tabac, en promouvant l’élargissement de l’accès à des services de sevrage et en faisant connaître les tactiques de l’industrie du tabac. La campagne va également permettre aux fumeurs de réussir à arrêter de fumer, grâce aux initiatives «Gagner à arrêter».
L’Organisation a, en outre, rappelé que la pandémie de la Covid-19 a poussé des millions de consommateurs de tabac à vouloir arrêter. «Mais dire adieu au tabac est difficile, surtout avec le stress social et économique supplémentaire causé par la pandémie. Dans le monde, quelque 780 millions de personnes disent vouloir arrêter de fumer, mais seulement 30% d’entre elles ont accès aux outils qui peuvent les aider à surmonter leur dépendance physique et mentale au tabac. En collaboration avec ses partenaires, l’OMS va fournir aux fumeurs les outils et les ressources dont ils ont besoin pour réussir à arrêter», a indiqué l’Organisation. 


Groupe «Le Matin» mobilisé pour la lutte contre le tabagisme

 

La mobilisation des entreprises reste un élément primordial dans la lutte contre le tabagisme. Conscient de ce constat, Groupe «Le Matin» a organisé, ce lundi 31 mai dans ses locaux et en format distanciel, une Journée de sensibilisation des collaborateurs en collaboration avec Dr Fouad Boujdi, médecin du travail. L’occasion pour ce dernier de rappeler que la Journée mondiale sans tabac est axée cette année sur le thème «Le tabac et la santé pulmonaire» pour mettre la lumière sur les effets négatifs que le tabac peut avoir sur la santé pulmonaire, allant du cancer aux maladies respiratoires chroniques et de rappeler le rôle fondamental des poumons dans la santé et le bien-être de tous. Les constats sont alarmants, alerte Dr Boujdi : le tabagisme est à l’origine de multiples maladies. En moyenne, un fumeur régulier sur deux meurt de son tabagisme, le seul moyen de se protéger est l’arrêt du tabac.
Après avoir donné un aperçu sur les principales maladies causées par le tabagisme, notamment le cancer, maladies cardio-vasculaires, broncho-pneumopathie chronique obstructive ou encore la diminution des capacités sexuelles et de la fertilité, Dr Boujdi a sensibilisé l’assistance au tabagisme passif qui est un acte subi, mais dangereux. 

S.Ba


Célébration de la Journée mondiale sans tabac 

À l’instar des autres pays, le Maroc a célébré la Journée mondiale sans tabac en lançant une campagne nationale du 31 mai au 30 juin 2021. «Le but de cette campagne est de renforcer le plaidoyer et la sensibilisation de la population à l’importance de la lutte contre le tabagisme. Cette année, le thème identifié est «S’engager à arrêter de fumer pendant la Covid-19», en totale synergie avec la large campagne mondiale lancée par l’Organisation mondiale de la santé depuis le 8 décembre 2020», a souligné Latifa Belakhel, la chef de la Division des maladies non transmissibles au sein de la Direction de l’épidémiologie et de lutte contre les maladies au ministère de la Santé.
De nombreuses activités sont prévues à cette occasion. Il s’agit, entre autres, de l’élaboration et la large diffusion d’affiches et de supports éducatifs et la diffusion de spots TV et Radio de sensibilisation, réalisés spécialement pour cette campagne, et qui vont être relayé par les responsables communications du ministère au niveau de toutes les régions du Maroc. Cette année sera également marquée par le lancement de l’initiative «Administration publique sans tabac» ainsi que le lancement d’une campagne digitale de grande envergure à travers la publication : de publipostages thématiques et de vidéos de professionnels enregistrées en collaboration avec des experts dans le domaine de la tabacologie et la cancérologie et d’une success-story d’une personne ayant bénéficié de la consultation d’aide au sevrage tabagique et réussi son sevrage, sur le site Sehati et sur la page Facebook du ministère de la Santé.
En outre, un affichage urbain des affiches travaillées spécialement pour la campagne nationale de lutte contre le tabagisme sera lancé le 1er juin et s’étalera sur un mois. Cet affichage concernera les grandes métropoles marocaines, à savoir Casablanca, Rabat, Salé, Fès, Marrakech, Tanger, Agadir et Oujda.
Enfin, le ministère organise un webinaire sur «L’importance du sevrage tabagique à l’ère de la Covid-19 et après» avec la participation des experts en tabacologie. 


La sensibilisation des jeunes dans les écoles est primordiale

L’usage du tabac et des drogues par les jeunes dans les établissements scolaires a malheureusement pris des proportions inquiétantes ces dernières années. Lycéens, collégiens et même élèves du primaire sont tous concernés par ce fléau qui se répercute négativement sur leur scolarité, leur santé et leur vie, en général. «Les mineurs sont les jeunes de demain et les ressources nécessaires pour la réalisation de tous les chantiers de construction d’un avenir propice pour la nation. De ce fait, toute la priorité doit être accordée aux mineurs par l’interdiction immédiate de la vente des cigarettes en détail aux mineurs et l’application des articles de la loi 91-15 avec une revue en hausse des amendes réservées à ceux qui enfreignent les prescriptions de ces articles. Il est également nécessaire de renforcer la surveillance par les autorités compétentes des opérations de ventes des cigarettes et des drogues surtout à côté des établissements scolaires», a souligné El Hassan El Baghdadi, président de l’Association nationale de lutte contre le tabagisme et les drogues. Et d’ajouter : «Étant donné la complexité et l’étendue du phénomène, tout le monde est convaincu du fait que la lutte contre les dangers du fléau ne revient pas seulement à l’État, mais c’est une affaire de tout un chacun qui interroge notre devoir en tant que citoyens et engage notre responsabilité quant à l’adhésion au projet associatif tout entier».
Il est à rappeler le programme «Collèges-lycées sans tabac» a été mis en place depuis 2007 au profit des jeunes en milieu scolaire. Il a pour objectif de lutter contre l’initiation au tabagisme en adoptant le slogan «Dites non à la première cigarette». 


Questions à El Hassan El Baghdadi, président de l’Association nationale de lutte contre le tabagisme et les drogues

«Le nombre de cigarettes fumées annuellement par les Marocains est très alarmant et effrayant»

Que pouvez-vous nous dire au sujet de la prévalence tabagique au Maroc ?
Le Maroc est considéré comme l’un des plus grands consommateurs de tabac dans la zone méditerranéenne. Le nombre des cigarettes fumées annuellement par les Marocains est très alarmant et effrayant, il est aux alentours de 15 milliards d’unités. Selon une enquête nationale sur les habitudes et les comportements des fumeurs publiée en 2008, le fumeur marocain dépense en moyenne 22 DH par jour pour l’achat de tabac (30% du SMIG). Le taux du tabagisme au Maroc représente le tiers de la population, ce qui a de graves répercussions sur la santé malheureusement.

Que faut-il faire pour mieux sensibiliser la population marocaine aux risques du tabac ?
Puisqu’il s’agit d’un phénomène complexe qui n’épargne aucune classe sociale, notre approche pour lutter contre le fléau du tabagisme passe par une approche globale basée sur quatre approches complémentaires, à savoir une approche préventive destinée à rehausser le niveau de la prise de conscience collective notamment chez les jeunes et leurs parents traduite à travers un ensemble d’activités de sensibilisation, une approche concernant le traitement médical du comportement tabagique et le sevrage tabagique, une approche juridique portant sur la création de lobbying afin d’exercer les pressions nécessaires à la prise en charge effective du dossier du tabagisme par les responsables et enfin une approche de partenariat permettant de multiplier le nombre d’acteurs devant participer au chantier de lutte anti-tabac.
Mis à part les efforts louables de la Fondation Lalla Salma de lutte contre le cancer, on note la démission scandaleuse de l’État dans la lutte contre le tabagisme. Aucune stratégie n’est réellement mise en route pour vaincre ce fléau tandis que les industriels du tabac et les lobbys continuent de tirer d’importantes ressources de cette «activité» !

Comment peut-on se protéger des risques du tabagisme passif et que pensez-vous de la loi 15-91 relative à l’interdiction de fumer dans certains lieux publics ?
Malheureusement, c’est une vérité douloureuse qui atteste une faible prise de conscience de la part des acteurs concernés et qui démontre l’absence d’une réelle volonté politique permettant de combattre ce fléau par le biais de la mise en œuvre d’une politique intégrant la stricte application des textes réglementaires de la loi 91-15 relative à l’interdiction de la vente de cigarettes aux mineurs, la publicité du tabac sous toutes ses formes explicites et implicites, de fumer dans les endroits publics…
Cette politique constitue pour l’association une préoccupation majeure. La mise en œuvre de cette approche juridique ajoutée aux approches associative, préventive et médicale présentera pour nous la meilleure piste pour contrecarrer ce phénomène.

Qu’a prévu l’Association nationale de lutte contre le tabagisme et les drogues à l’occasion de la Journée mondiale sans tabac ?
Notre actualité à l’occasion de la Journée mondiale s’articule autour de quatre axes principaux :
L’association a prévu en premier de renforcer ses campagnes de sensibilisation, notamment auprès de nos jeunes, et de les étendre au niveau des petits patelins pour que tout le monde puisse en bénéficier.
Nous avons également prévu de renforcer notre approche participative à travers la multiplication de nos partenariats et promouvoir une prise de conscience effective et en particulier chez nos enfants, leurs parents et les pouvoirs publics des méfaits et des conséquences néfastes causés par la consommation de tabac et des drogues.
Il est à préciser que cette vision n’est pas conditionnée par la seule journée du 31 mai, elle fait l’objet d’une dynamique instaurée par l’association à partir d’une stratégie globale visant un travail continu au fil des journées de l’année.
Il est à noter que nous avons organisé durant l’exercice en cours (2021-2022) plus de 17 campagnes animées par des médecins et des spécialistes, mais le nombre des activités est bien réduit comparativement aux exercices passés suite au confinement décrété par le gouvernement. 

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