Le Discours prononcé par S.M le Roi Mohammed VI à l’occasion du 22e anniversaire de la Fête du Trône a tendu la main, de nouveau, à l’Algérie pour une dynamisation des relations à travers l’ouverture des frontières entre les deux pays, qui sont fermées depuis 1994. Considéré comme une invitation franche et claire à la réconciliation entre Rabat et Alger, ce Discours ouvre la voie, selon plusieurs observateurs, à une prospérité partagée entre le Maroc et l’Algérie ainsi que tous les pays de la région.
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Driss Lagrini : «Le plus logique est que la réaction algérienne à la main tendue du Maroc soit positive»
Le Maroc a encore exprimé, à travers le Discours de S.M. le Roi
Mohammed VI à l’occasion du 22e anniversaire de la Fête du Trône, l’une des constantes de sa politique étrangère, à savoir le renforcement de la sécurité, la stabilité et la coopération au niveau de la région. Selon le directeur du Laboratoire d’études constitutionnelles et d’analyse des crises, Driss Lagrini, le Royaume croit en les principes du bon voisinage et reste ouvert sur la région maghrébine. Dans une déclaration accordée au «Matin», l’universitaire a rappelé que l’appel lancé par le Souverain pour l’ouverture des frontières avec l’Algérie n’est pas le premier en son genre. «S.M. le Roi a évoqué, dans plusieurs discours, la question de la poursuite de l’édification de l’unité maghrébine et le dépassement de cette situation de blocage», a affirmé M. Lagrini qui a souligné que le Souverain avait même appelé à la mise en place d’un mécanisme commun pour dépasser les différends entre les deux pays frères.Le spécialiste des relations internationales et professeur à l’Université Cadi Ayyad de Marrakech a tenu à souligner que l’appel lancé par le Maroc ne part ni d’une position de faiblesse ni d’une logique pragmatique étroite. «Il s’agit plutôt d’une logique qui se base sur une vision sur le long termes qui prend en considération les intérêts des deux pays, de toute la région et des générations futures», a-t-il affirmé. Le Maroc a toujours fait le choix de la clarté dans ses relations avec l’Algérie. Le Souverain a d’ailleurs rappelé que le Maroc n’a aucun problème avec le peuple algérien et avec l’Algérie en général, souligne M. Lagrini.
Revenant sur la réaction algérienne après cette main tendue, une nouvelle fois, de la part du Maroc, l’universitaire a souligné que la balle est désormais dans le camp algérien. Le plus logique est que la réaction soit favorable, vu l’impact positif d’un tel rapprochement sur les deux pays et la région, a affirmé le chercheur. Toutefois, si la réaction algérienne est en dessous des attentes, cela signifierait qu’on est face à une élite politique avec une vision étroite et qui a intérêt à ce que la crise s’éternise, explique M. Lagrini.Propos recueillis par Ayoub Lahrache
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Mustapha Sehimi : «Le message de paix et de fraternité adressé par Sa Majesté le Roi au voisin algérien ne peut passer inaperçu»
«Le discours de Sa Majesté le Roi Mohammed VI à l’occasion du 22e anniversaire de la Fête du Trône est plus qu’une main tendue Royale, c’est un acte diplomatique fort qui témoigne des bonnes intentions du Royaume de nouer des relations fraternelles avec le voisin algérien. Et ce message conciliant ne peut passer inaperçu du côté algérien», a indiqué le politologue Mustapha Sehimi. Dans une déclaration accordée au «Matin», l’analyste politique a salué l’initiative Royale qui représente une première en son genre dans le monde. «Jamais un Chef d’État dans le monde n’a parlé d’un pays et d’un peuple voisin avec autant d’intensité jusqu’à faire référence à des peuples jumeaux. Le Souverain a réaffirmé la totale disposition du Royaume à nouer des relations fraternelles avec l’Algérie et le peuple algérien. Autant de messages forts qui seront certainement analysés par les dirigeants algériens», ajoute l’universitaire.
D’après M. Sehimi, le Discours Royal nourrit «un état d’esprit des bonnes dispositions du Royaume à rétablir les relations de fraternité, mais cela pourra prendre du temps pour que cela donne ses effets du côté algérien, vu l’existence de contentieux en instance». Néanmoins, le politologue estime que les dirigeants algériens prendront le temps nécessaire pour évaluer la situation et examiner l’impact qu’une telle reprise des relations pourra avoir sur les deux pays, leurs intérêts communs et sur le projet d’une éventuelle intégration maghrébine.
Si l’analyste politique souligne l’importance de rester optimiste quant à une éventuelle reprise des relations fraternelles entre les deux pays, le même responsable appelle toutefois à rester réaliste et à ne pas céder à une sorte de naïveté et de croire que la situation pourra s’arranger incessamment. «Il est clair que l’Algérie finira par entendre la voix de la raison, mais ce n’est pas mécanique. Cela implique le développement d’une volonté politique partagée, d’une nouvelle approche des relations algéro-marocaines qui prend en compte la nécessité de développer une vision partagée de l’avenir du Maghreb», estime le même intervenant.Selon M. Sehimi, plusieurs indicateurs incitent à croire que l’esprit de responsabilité et la commune convergence des intérêts supérieurs des deux pays finira par primer, d’autant que les deux voisins disposent d’atouts communs mais aussi de nombreux défis communs qu’il reste à relever, notamment la lutte contre l’immigration clandestine, le trafic, le terrorisme et les grands chantiers de développement. «Il est évident que la construction de relations solides entre les deux pays reste le seul chemin évident pour relancer le processus d’intégration maghrébine et garantir la prospérité des deux peuples marocain et algérien», conclut-il.
Propos recueillis par Yousra Amrani