Dans les couloirs de la
Chambre des représentants, l’effervescence était très perceptible ce jeudi 11 juillet 2024. L’annonce tant attendue est tombée : le mardi 16 juillet 2024, à 10 h précises, les
députés se réuniront en séance plénière pour examiner et voter le nouveau
règlement intérieur de la Chambre, incluant le
code de déontologie qui fait l’objet depuis des mois d’âpres tractations et d’intenses conciliabules. Cette annonce, faite par le président de la Chambre des représentants,
Rachid Talbi Alami, marque l’aboutissement d’un processus laborieux ayant duré des mois. Elle intervient dans un contexte où les
parlementaires ont dû repenser leur approche s’agissant de la promotion de l’éthique
parlementaire, abandonnant l’idée initiale d’une commission d’éthique au profit d’un système plus souple et intégré.
Un revirement stratégique dicté par la prudence constitutionnelle
Le choix d’écarter la création d’une
commission d’éthique n’est pas anodin. Selon nos informations, cette décision résulte de consultations approfondies visant à éviter tout risque d’inconstitutionnalité. «Nous avons dû revoir notre copie pour nous assurer que le texte passe l’examen de la
Cour constitutionnelle», confie une source proche du dossier. Et ce choix prend aujourd’hui une dimension encore plus cruciale. «La commission composée des chefs des
groupes et groupements parlementaires pour préparer le projet de
code de déontologie a adopté à l’unanimité une nouvelle version. Elle a ainsi décidé d’abandonner la proposition antérieure de constituer une commission de déontologie qui se prononcerait sur les cas d’entorse à l’éthique», nous confie le chef du groupe parlementaire du progrès et du socialisme,
Rachid Hamouni. En effet, la proposition initiale consistant à mettre en place une commission pouvant prononcer des mesures disciplinaires à l’encontre des députés a été jugée potentiellement problématique sur le plan constitutionnel. «Il fallait trouver un équilibre entre la nécessité de moraliser la vie parlementaire et le respect des prérogatives constitutionnelles des élus», explique un expert en droit constitutionnel consulté sur le sujet.
Code de déontologie parlementaire : Une solution de compromis
Face à ce défi, la commission chargée de la révision du
règlement intérieur (composée des chefs des groupes et groupement parlementaires ainsi que les présidents des commissions permanentes), présidée par Rachid Talbi Alami, a opté pour une nouvelle approche. Lors de sa réunion du jeudi 11 juillet 2024, elle a décidé de confier la mission de surveillance éthique à quatre députés : deux issus de la
majorité et deux de l’
opposition. «C’est une solution de compromis qui permet de maintenir un contrôle tout en évitant la création d’une structure qui pourrait être perçue comme un ‘’tribunal interne’’», souligne un membre de la commission. Ces quatre «sentinelles éthiques» auront pour tâche de relever les éventuelles infractions au code de déontologie et de les transmettre au bureau de la Chambre des représentants, qui sera chargé de se prononcer sur les cas signalés.
Un code aux contours précis, fruit d’un consensus
Le projet de code de déontologie, tel qu’il sera soumis au vote, a été adopté à l’unanimité par la commission ad hoc chargée de sa préparation, nous confie
Rachid Hamouni. Il vise à «rehausser le travail parlementaire» en plaçant les intérêts de la nation au-dessus des considérations partisanes. Des députés membre de la commission chargée de la révision du règlement intérieur nous ont révélé certaines règles énoncées dans le
code d’éthique à respecter par les députés. On y trouve l’interdiction d’inciter ou d’encourager des manifestations illégales, l’obligation de s’exprimer avec courtoisie et respect, et d’éviter tout langage menaçant, intimidant ou insultant. Les députés devront également déclarer tout conflit d’intérêts potentiel et s’abstenir d’accepter des cadeaux ou des avantages liés à leur fonction parlementaire. «Chaque député devra se prononcer sur des règles qui l’engageront personnellement». «C’est un exercice de responsabilité individuelle et collective», explique notre source.
Code de déontologie parlementaire : Un test pour la démocratie et ses institutions
La séance du vote prévue le 16 juillet se tiendra dans un climat encore marqué par les récents scandales qui ont entaché la réputation du
Parlement. Plusieurs
parlementaires font l’objet de
poursuites judiciaires pour des affaires de
corruption et de
détournement de fonds publics. «Ce vote sera perçu comme un indicateur de leur volonté réelle de changement», note un observateur de la vie politique marocaine. Au-delà des enjeux immédiats, la séance du 16 juillet constituera un véritable test pour la maturité de la démocratie marocaine et le fonctionnement de ses institutions. D’autant que le processus ne s’arrêtera pas au vote du 16 juillet. Une fois adopté, le règlement intérieur, incluant le code de déontologie, devra être validé par la
Cour constitutionnelle.