Le discours prononcé par Sa Majesté le Roi Mohammed VI à l'occasion du 49e anniversaire de la Marche Verte a révélé un profond changement dans la dynamique caractérisant la gestion de la question du Sahara marocain et sa relation avec le voisinage du Royaume. Selon l’expert en relations internationales Mohammed Badine El Yattioui, ce discours marque une rupture significative avec le ton adopté habituellement par le Maroc dans le passé, signalant un véritable changement de paradigme dans la position du Royaume vis-à-vis de son voisin de l’Est, mais aussi de l'Organisation des Nations unies (ONU) s'agissant du Sahara marocain. L'expert souligne que ce discours incarne une approche concrète et pragmatique, ancrée dans le contexte actuel, et réaffirme l'intransigeance du Maroc qui refuse de faire la moindre concession sur son intégrité territoriale.
Évolution du discours envers l’Algérie
Bien que le Souverain n’ait pas mentionné l’Algérie nommément, les allusions étaient à la fois claires et percutantes. Il a dénoncé les pratiques de ceux qui exploitent le conflit saharien pour masquer des problèmes domestiques. Des propos qui cadrent avec la situation actuelle de l'Algérie, qui, tout en soutenant les séparatistes du polisario, continue de plaider en faveur d’un référendum d’autodétermination. Comme le souligne notre expert, «l’attitude de l’Algérie, qui soutient depuis des décennies les séparatistes du polisario tout en appelant à un référendum d'autodétermination pour le Sahara, est vivement critiquée pour sa vision “sclérosée” et “détachée de la réalité”».Pour M. El Yattioui, cette évolution dans le Discours Royal illustre la volonté de promouvoir une solution globale et inclusive, qui dépasse les simples considérations de souveraineté pour intégrer des perspectives de coopération régionale. Dans ce sens, il aborde les ambitions géopolitiques d'accès à l'océan Atlantique, lesquelles renforcent l'idée que les enjeux du Sahara dépassent le simple conflit de souveraineté, incluant des intérêts stratégiques plus larges dans la région. «En rappelant l’initiative marocaine en faveur de l’accès des États du Sahel à l’océan Atlantique, S.M. le Roi Mohammed VI envoie un message clair à l’Algérie et aux autres acteurs de la région : le Maroc est prêt à collaborer pour un avenir commun fondé sur le développement et la paix, tout en préservant ses droits et sa souveraineté. C'est une main tendue qui traduit l’ouverture du Maroc à des partenariats régionaux, tout en réaffirmant son intransigeance sur la question de l’intégrité territoriale», observe l’expert.
Appel urgent à la clarté et à l'action pour l'ONU
Le discours de Sa Majesté le Roi met en lumière l'importance cruciale d'une clarté accrue concernant un dossier qui s'éternise depuis des décennies. «L'appel de Sa Majesté aux Nations unies pour qu'elles assument «leurs responsabilités» se fait entendre comme une exigence pressante de clarté et de décision sur une question qui perdure depuis des décennies», souligne M. El Yattioui. «Ce discours met en évidence le contraste entre deux paradigmes : d'une part, celui du Maroc, ancré dans une approche réaliste soutenue par des actions concrètes en matière de développement et de sécurité, et, d'autre part, celui de ses opposants, qu'Il qualifie de nourri par des mythes du passé», ajoute-t-il.Dans cette optique, le Souverain incite la communauté internationale à ne plus soutenir des positions idéologiques déconnectées des réalités contemporaines, qui exacerbent une tension inutile dans une région déjà fragile. «À la place, S.M. le Roi Mohammed VI exhorte les Nations unies à reconnaître la justesse du modèle marocain d’intégration du Sahara dans le cadre d'une autonomie renforcée, un modèle qui, selon le Maroc, garantit la stabilité et le développement de cette région», note l’expert.
Le rôle des MRE dans la consolidation d'un front uni à l'international
En parallèle à cette prise de position plus franche, le discours marque une évolution significative dans la stratégie diplomatique du Royaume. «Ce discours incarne une nouvelle dimension de la stratégie diplomatique marocaine : le renforcement des liens avec les Marocains résidant à l'étranger (MRE), pour lesquels le Souverain annonce une restructuration des institutions dédiées à la diaspora», précise M. El Yattioui.D’après lui, à travers des institutions comme le Conseil de la communauté marocaine à l’étranger et la Fondation Mohammedia, le Maroc vise à augmenter la participation des ressortissants à l'étranger dans la défense de ses intérêts, notamment en ce qui concerne la question du Sahara marocain. «Cette mobilisation constitue un levier de puissance douce, permettant d'impliquer des milliers de Marocains dans un plaidoyer actif en faveur de la position nationale», affirme-t-il. Cette approche proactive s'inscrit dans la volonté de présenter un front uni à l'échelle internationale, illustrant ainsi l'attachement des Marocains du monde entier à l'intégrité territoriale de leur pays, conclut M. El Yattioui.