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Lundi 23 Juin 2025
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Faculté de médecine de Tanger : le cri de détresse des étudiants

Alors que la réforme du système de santé marocain affiche de grandes ambitions, les étudiants en médecine, eux, multiplient les alertes sur la dégradation de leurs conditions de formation. Dernier exemple en date : la colère exprimée par 40 étudiants en médecine générale de Tanger, victimes d’un retard prolongé dans le versement de leurs indemnités. Leur cri de détresse s’inscrit dans un large mouvement de contestation qui touche l’enseignement médical.

Une journée à peine après le sit-in organisé par les étudiants en médecine dentaire de Casablanca pour dénoncer la vétusté des infrastructures de leur centre de formation dentaire et l’absence de matériel médical adéquat, c’est au tour des étudiants en médecine générale de Tanger de tirer la sonnette d’alarme.

À Tanger, un ras-le-bol face à des indemnités impayées

Le Bureau des étudiants en médecine de Tanger est monté au créneau pour dénoncer un retard jugé «injustifiable et récurrent» dans le versement des indemnités dues à plus de 40 étudiants. Certaines de ces sommes, qui couvrent des frais essentiels comme le transport vers les hôpitaux, l’hébergement durant les stages ou encore l’achat de matériel médical, sont impayées depuis plusieurs semaines. Un retard qui engendre une précarité de plus en plus difficile à gérer. «Nous avons tout fait dans les règles : dossiers complets, relances multiples, rapport détaillé... Mais rien n’y fait. Certains camarades doivent choisir entre payer leur transport ou leurs repas», s’indigne un membre du bureau, sous couvert d’anonymat.

Un rapport complet, incluant une ventilation précise des sommes dues par étudiant, a été remis à la direction régionale de la santé relevant de la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceïma. Malgré cela, aucune réponse formelle, ni même un accusé de réception, n’a été transmis aux représentants des étudiants, alimentant un profond sentiment de mépris et d’abandon.

Une pression psychologique qui compromet la formation

Au-delà des considérations financières, c’est la qualité même de la formation médicale qui est en jeu. «Comment voulez-vous qu’on se concentre sur nos stages quand on doit gérer avec parcimonie chaque dirham ?», déplore une étudiante, soulignant l’impact direct de cette situation sur la performance académique et la sérénité psychologique des étudiants.

Le bureau étudiant va plus loin, affirmant que ce blocage administratif porte atteinte aux fondements mêmes de la formation médicale, censée reposer sur une approche professionnelle exigeante et continue. Le non-versement des indemnités devient ainsi un facteur de stress constant, en contradiction avec l’objectif de former des médecins compétents et disponibles pour répondre aux besoins de santé publique du pays.

Des revendications claires, un ultimatum lancé

Face à l’inaction, les représentants des étudiants à Tanger durcissent le ton. Le Bureau des étudiants réclame désormais le paiement immédiat de toutes les indemnités impayées, la mise en place d’un mécanisme clair, efficace et durable pour assurer la régularité des versements et l’instauration d’un calendrier contractuel transparent. «Cette fois, nous ne lâcherons pas. Ces retards répétés mettent en péril la qualité de notre formation», prévient un responsable étudiant. Il ajoute que des formes d’action plus visibles, y compris des protestations collectives, pourraient être engagées dès la semaine prochaine si aucune avancée concrète n’est constatée. Les étudiants affirment par ailleurs leur détermination à recourir à «toutes les formes légitimes» de contestation, pour défendre ce qu’ils estiment être un droit fondamental.

Un malaise national ?

Visiblement, la grogne des étudiants en médecine de Tanger est le symptôme d’un malaise général dans les Facultés de médecine du Royaume. Que ce soit à Casablanca, Rabat, Oujda ou Tanger, les revendications convergent : infrastructures insuffisantes, carences matérielles, retards administratifs, absence de dialogue avec les autorités de tutelle. En toile de fond, c’est la promesse d’un système de santé performant, fondé sur une formation de qualité, qui semble de plus en plus compromise.

À l’heure où le Maroc s’est engagé dans une réforme d’envergure de son système de santé, avec la généralisation de la couverture sociale, la création d’un service sanitaire de proximité et une redéfinition du rôle des professionnels de santé, les voix des étudiants rappellent qu’il ne saurait y avoir de réforme réussie sans formation de qualité. Pour eux, la dignité de la fonction médicale commence sur les bancs de la faculté, et elle ne doit faire l’objet d’aucun marchandage.
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